Aucun de nous n'est à l'abri de conflits, à moins que nous le soyons tous

Le Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, apparaît à l'écran lors du Forum de dialogue politique libyen, à Tunis, en Tunisie, le 9 novembre 2020 (Reuters)
Le Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, apparaît à l'écran lors du Forum de dialogue politique libyen, à Tunis, en Tunisie, le 9 novembre 2020 (Reuters)
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Publié le Jeudi 08 avril 2021

Aucun de nous n'est à l'abri de conflits, à moins que nous le soyons tous

Aucun de nous n'est à l'abri de conflits, à moins que nous le soyons tous
  • Le Royaume-Uni a célébré cette semaine le 30e anniversaire de la résolution de 1991 sur la «zone d'exclusion aérienne» qui a sauvé la région kurde d'Irak des attaques meurtrières de Saddam Hussein
  • Le gouvernement libyen, avec l'inclusion marquante de femmes de premier plan, semble déterminé à démontrer que de nouvelles voix seront entendues

L’événement n’est pas passé inaperçu: le Royaume-Uni a célébré cette semaine le 30e anniversaire de la résolution de 1991 sur la «zone d'exclusion aérienne» qui a sauvé la région kurde d'Irak des attaques meurtrières de Saddam Hussein. Une rue Sir John Major a d’ailleurs été inaugurée à Erbil, la capitale du Kurdistan irakien.

L'ancien Premier ministre britannique a en effet joué un rôle central dans l’élaboration de la résolution 688 du Conseil de sécurité de l'ONU. Son travail et l'intervention de plusieurs États pour protéger les personnes victimes d'attaques infâmes n'ont jamais été oubliés.

L’un des aspects de l'intervention libérale consistait à mettre en œuvre la volonté, la confiance et la capacité d’acteurs puissants – de près comme de loin – afin d'agir efficacement pour sauver des vies, en collaboration avec les citoyens des États touchés qui pensaient que leur vie valait plus que l'enfer qu’ils vivaient, et que des jours meilleurs viendraient.

Les temps ont changé. Les interventions des démocraties libérales et de leurs alliés ont eu lieu, comme en Irak, ou n’ont pas eu lieu, comme en Syrie, avec des conséquences tout aussi désastreuses.

Le Royaume-Uni s’emploie désormais avec enthousiasme à encourager les perspectives de paix dans deux pays – la Libye et le Yémen – où son engagement a été discutable, tout en continuant à soutenir un retour à la diplomatie avec l’Iran grâce à la relance de l’accord nucléaire. L’intervention du gouvernement britannique auprès de l’Otan en Libye est très controversée, notamment aux yeux du Parlement britannique lui-même.

Toutefois, les conséquences de l’action du gouvernement de David Cameron après l'éviction horrible de Mouammar Kadhafi sont clairement visibles sur la feuille de route du gouvernement d'unité nationale libyen, maintenant que la guerre et l’équilibre des forces ont fait place à l’opportunité d’un avenir meilleur, que mérite le peuple libyen.

Le Royaume-Uni n'était pas le seul pays qui pensait, en 2011, que des bottes étrangères sur le terrain étaient de nature à contrarier les efforts locaux visant à réconcilier les factions politiques, militaires et tribales. La Grande-Bretagne a fourni d’importants efforts afin d’aider à mettre en place les institutions gouvernementales dont la Libye a été privée pendant si longtemps sous le régime de Kadhafi. En réalité, ces efforts, qui intervenaient après sept ans de détresse, se sont avérés prématurés avant la récente rencontre historique qui a eu lieu dans la ville libyenne de Syrte.

Cependant, c’est au cœur de l'accord qui a été conclu après les efforts acharnés des politiciens locaux et des envoyés de l'ONU que se révèle le fondement de ces institutions, avec des élections justes, débarrassées de troupes étrangères imposant au peuple libyen leur volonté.

Le gouvernement libyen, avec l'inclusion marquante de femmes de premier plan, semble déterminé à démontrer que de nouvelles voix seront entendues et qu’il est essentiel que cet effort aboutisse pour l'harmonie de la région. Si les forces étrangères reviennent et le contrecarrent, l'impact ne se fera pas seulement sentir en Libye.

Le Royaume-Uni n'était pas engagé de la même manière au Yémen. Toutefois, en soutenant la coalition qui cherchait à empêcher l'éviction des Houthis du gouvernement légitime, il a fait face à de rudes critiques internes. Les médias britanniques ont mis du temps à être impartiaux pour décrire le conflit, omettant souvent l'impact de la présence des Houthis dans les zones touchées et se concentrant sur l’effet des frappes aériennes de la coalition ailleurs.

Néanmoins, en tant que membre au Conseil de sécurité, le Royaume-Uni a consciencieusement cherché à travailler avec toutes les parties afin de soutenir les émissaires de l'ONU qui s'efforcent de trouver une solution, après avoir déclaré publiquement il y a quelque temps qu'il ne voyait aucune solution militaire au conflit.

Seule la voie diplomatique et politique peut donner au Yémen l'opportunité d’instaurer après l’ère d’Ali Abdallah Saleh un dialogue national permettant aux vraies voix des Yéménites – en particulier celles des femmes et des jeunes – de construire l’avenir du pays.

Le Royaume-Uni s’emploie désormais avec enthousiasme à encourager les perspectives de paix dans deux pays – la Libye et le Yémen – où son engagement a été discutable, tout en continuant à soutenir un retour à la diplomatie avec l’Iran grâce à la relance de l’accord nucléaire.

Alistair Burt

Le Royaume-Uni pense toujours qu’un monde dans lequel l'Iran respecterait l’accord consistant à ne pas utiliser d'armes nucléaires serait meilleur. C’est la raison pour laquelle il soutient le retour provisoire à ces négociations qui font couler beaucoup d’encre en ce moment.

Le reste du monde, loin d'être irréprochable dans son histoire récente ou plus lointaine, s'est habitué à l’idée d’un Moyen-Orient et une Afrique du Nord en conflit ou exposés a des différends sans fin. La pandémie récente nous a offert une nouvelle phrase – «Nul n’est en sécurité si tout le monde n’est pas en sécurité» – sans cesse répétée par des gouvernements de tous bords qui redoutent l’impact de la contagion. Comme le monde et la région seraient différents si nous adaptions ce concept et si nous disions: «Personne n’est en paix à moins que tous ne le soient», ou encore: «Personne n'est nourri si tout le monde ne l’est pas».

La contagion que nous devrions craindre concerne les zones de troubles qui comptent un nombre croissant de jeunes n’ayant apparemment rien à perdre tandis que le reste du monde est en train de se remettre de ce virus. Nous nous trompons si nous pensons qu'une telle contagion est facilement maîtrisable.

 

Alistair Burt est un ancien député britannique qui a occupé à deux reprises des postes ministériels au ministère des Affaires étrangères et du Commonwealth: en tant que sous-secrétaire d'État parlementaire de 2010 à 2013 et en tant que ministre d'État pour le Moyen-Orient de 2017 à 2019. Twitter: @AlistairBurtUK

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