Biden doit s’attaquer à la livraison d’armes aux Houthis par l’Iran

À la suite d’une attaque de drones sur les installations d’Aramco dans la ville d’Abqaiq, en Arabie saoudite, un nuage de fumée s’élève dans le ciel le 14 septembre 2019. (Reuters)
À la suite d’une attaque de drones sur les installations d’Aramco dans la ville d’Abqaiq, en Arabie saoudite, un nuage de fumée s’élève dans le ciel le 14 septembre 2019. (Reuters)
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Publié le Dimanche 07 février 2021

Biden doit s’attaquer à la livraison d’armes aux Houthis par l’Iran

Biden doit s’attaquer à la livraison d’armes aux Houthis par l’Iran
  • Le régime iranien viole l’embargo sur les armes imposé par les Nations unies en approvisionnant les Houthis du Yémen en armes
  • Sa Constitution stipule dans son préambule qu’elle «assure la base nécessaire pour garantir la poursuite de la révolution dans le pays ainsi qu’à l’étranger»

Plutôt que de récompenser les dirigeants iraniens par un retour à l’accord nucléaire du Plan d’action global conjoint et par une levée des sanctions contre le régime, l’administration du président américain, Joe Biden, doit traiter en priorité le rôle dévastateur de l’Iran dans le conflit du Yémen.

Le régime iranien viole en effet l’embargo sur les armes imposé par les Nations unies en approvisionnant les Houthis du Yémen en armes. Rien que la semaine dernière, les experts des Nations unies ont accusé des entités et des individus iraniens de livraison d’armes.

Voilà un extrait du rapport annuel des contrôleurs des sanctions: «De plus en plus de preuves attestent que des individus ou des entités iraniens envoient des armes et des composants d’armes aux Houthis». Selon ce rapport, les experts «ont recensé plusieurs itinéraires d’approvisionnement en mer d’Arabie empruntés par les navires traditionnels (boutres) des Houthis». Les armes confisquées sont des missiles guidés antichars, des fusils de sniper et des lance-grenades à propulsion, similaires à ceux qui sont fabriqués en Iran. L’administration Biden a gardé le silence sur ce rapport pourtant si important.

Et ce n’est pas la première fois que les experts des Nations unies associent le régime iranien aux Houthis et à leur arsenal. En 2017, un groupe d’experts avait déjà signalé qu’il était fort improbable que les Houthis soient en mesure de fabriquer de tels missiles eux-mêmes. «La conception, les caractéristiques et les dimensions des pièces examinées par le groupe d’experts correspondent à celles du missile Qiam-1 fabriqué en Iran», indiquait le rapport.

Par ailleurs, le régime iranien enfreint de manière flagrante la résolution 2231 du Conseil de sécurité des Nations unies, qui «exige que l’Iran n’entreprenne aucune activité liée aux missiles balistiques conçus pour porter des armes nucléaires, y compris le lancement de missiles en recourant à cette technologie».

À ce jour, l’Arabie saoudite constitue la principale cible des armes iraniennes fournies aux Houthis. Ces derniers offrent à l’Iran un atout géopolitique essentiel, dans la mesure où ils sont capables de viser tous les pays du Golfe. En 2017, le premier quotidien officiel iranien, Kayhan, dont le rédacteur en chef est un conseiller du Guide suprême, Ali Khamenei, et nommé par ce dernier, a publié en première page un article intitulé: «Les Houthis lancent un missile sur Riyad. La prochaine cible sera Dubaï.»

Le régime iranien – ainsi que son mandataire au Yémen – continue de faire preuve d’une stratégie féroce et impitoyable en perpétrant des actes terroristes. En 2017, les Houthis ont attaqué une installation nucléaire à Abu Dhabi – un acte qui aurait probablement provoquer un grand nombre de victimes parmi les civils. Heureusement, le tir de missile a échoué.

Les dirigeants iraniens eux-mêmes avouent aider les Houthis. Selon le religieux influent Mehdi Tayeb: «Les missiles ont été fournis aux Houthis en plusieurs étapes par les Gardiens de la révolution et avec le soutien et l’assistance de la marine iranienne». En 2015, Esmail Ghaani, commandant en second de la force Al-Qods à l’époque, confiait: «L’Iran a fourni des missiles aux Houthis par étapes, avec le soutien et l’assistance de la marine iranienne. Ceux qui défendent le Yémen ont été entraînés sous la bannière de la République islamique.»

Le régime iranien a donc multiplié les efforts pour perfectionner la production de missiles par les Houthis, car le conflit au Yémen revêt pour l’Iran une importance qui va bien au-delà de sa volonté de provoquer ses rivaux du Golfe qu’il s’est engagé à détruire. Il s’agit plutôt d’une croisade idéologique qui cherche à unir le monde musulman sous son régime islamiste – un régime qui percevra chaque tentative de paix comme un simple contretemps.

Après tout, la vocation révolutionnaire du régime fait partie de sa Constitution qui stipule dans son préambule qu’elle «assure la base nécessaire pour garantir la poursuite de la révolution dans le pays ainsi qu’à l’étranger». La Constitution précise en outre que l’armée iranienne et le Corps des gardiens de la révolution islamique «auront pour mission non seulement de garder et de préserver les frontières du pays, mais également de servir la vocation idéologique […] d’étendre la souveraineté de la loi de Dieu (chiite) aux quatre coins du monde […] dans l’espoir que ce siècle soit marqué par l’établissement d’un gouvernement universel sacré et par la défaite de tous les autres gouvernements».

Le régime iranien – ainsi que son mandataire au Yémen – continue de faire preuve de stratégie féroce et impitoyable en perpétrant des actes terroristes.

Dr. Majid Rafizadeh

La livraison ininterrompue d’armes aux Houthis par l’Iran permet également de mieux comprendre les tactiques et les stratégies à long terme des mandataires formés et armés par l’Iran au Moyen-Orient, qui reposent sur quatre piliers: la déstabilisation, le conflit, les assassinats, et le rejet de toute solution provenant des sunnites ou de l’Occident.

Pour illustrer l’engagement de l’Iran à respecter ces quatre piliers, prenons pour exemple l’assassinat de l’ancien président du Yémen, Ali Abdallah Saleh. En 2017, deux jours après avoir lancé un appel à résoudre le conflit – et au moment où la communauté internationale se réjouissait de voir que la guerre civile de trois ans et le conflit, qui semblait intraitable au Yémen, allaient prendre fin beaucoup plus tôt que prévu –, Ali Abdallah Saleh a été assassiné par la milice houthie soutenue par l’Iran.

L’administration Biden est donc tenue de condamner les dirigeants iraniens qui fournissent des armes aux Houthis.

 

Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain diplômé de Harvard. Twitter: @Dr_Rafizadeh.

L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com