La décision de l’Arabie saoudite ainsi que de ses partenaires du Conseil de coopération du Golfe (CCG) de ressusciter les relations diplomatiques gelées avec le Liban depuis la crise suscitée en octobre 2021 par les déclarations de l’ex-ministre de l’Information libanais, Georges Kordahi, à l’encontre de Riyad, s’inscrit dans une nouvelle approche arabe vis-à-vis du Liban où devraient se dérouler le 15 mai prochain des élections législatives qui revêtent une importance cruciale quant à l’avenir de la «formule nationale» libanaise.
Quand on évoque la «formule nationale», il s’agit du régime à l’origine de la création du Liban en 1926. Les élections législatives de 2022 seront suivies en octobre prochain de la désignation, par le prochain Parlement, d’un nouveau président. Ces deux échéances, si elles ne rencontrent pas d’obstacle, devraient nous donner une idée plus claire de ce que sera le Liban pour les six prochaines années.
Il est en effet évident que le pays du Cèdre est en phase transitoire et, d’une manière ou d’une autre, c’est un nouveau Liban qui devrait émerger. Si les élections législatives se soldent par une victoire sans appel du parti pro-iranien, le Hezbollah, le Liban sombrera encore plus dans une période d’isolation de son entourage arabe ainsi que de la communauté internationale. Le pire serait que cette victoire ouvre la voie à de dramatiques changements au niveau du régime.
La décision des pays du Golfe de réactiver leur présence diplomatique au Liban devrait inciter les Libanais qui refusent de se soumettre à la mainmise du Hezbollah
-Ali Hamade
Le projet du parti pro-iranien a toujours été de grignoter petit à petit l’appareil de l’État. De rendre le Liban ingouvernable, et la Constitution ainsi que les lois inapplicables. Le Hezbollah a toujours eu pour but d’infiltrer les institutions de l’État libanais, non pour asseoir sa position, mais pour mieux les saboter de l’intérieur. Cette mission n’est pour le moment qu’une demi-réussite et rien n’est perdu. Mais il va falloir que les masses libanaises attachées aux valeurs souverainistes, républicaines et démocratiques, se mobilisent durant les élections législatives. Il faudra prendre d’assaut les bureaux de vote et soutenir les listes souverainistes qui font barrage au Hezbollah.
Le retour de la diplomatie arabe à Beyrouth s’inscrit donc dans une logique de soutien aux Libanais qui refusent de se soumettre à la mainmise iranienne. C’est un message à tous les Libanais que le monde arabe, en particulier les pays du Golfe, ne laissera pas le Liban aux mains de l’Iran. C’est un appel à résister, avec l’appui des Arabes, à toute tentative d’arracher le Liban à son environnement arabe, en le dépossédant de son identité arabe originelle.
La décision des pays du Golfe de réactiver leur présence diplomatique au Liban devrait inciter les Libanais qui refusent de se soumettre à la mainmise du Hezbollah, à se rassembler et faire barrage le jour des élections aux listes soutenues par le parti pro-iranien. C’est une mission d’envergure que devront accomplir les souverainistes libanais. Mais c’est également une mission qui incombe aux soutiens arabes d’appuyer de leur côté ce mouvement de «libération» nationale intercommunautaire. Le Liban a besoin de ses partenaires arabes pour résister, en vue de gagner la bataille pour sa survie en tant que pays libre, pluraliste et démocratique.
La bataille pour sauver le Liban de la mainmise iranienne ne s’arrêtera pas au lendemain des élections législatives du 15 mai prochain. Elle devra être suivie d’une autre bataille, aussi dure, pour empêcher la désignation d’un nouveau président pro-Hezbollah. Les Libanais devront être vigilants et intraitables sur ce sujet. Un autre Michel Aoun ne doit en aucun cas être élu, le poste de président de la république étant la clé de voûte pour la défense du régime et de l’identité du Liban.
Le retour des diplomates arabes au Liban est une phase importante dans cette volonté de préserver un Liban arabe. Un État souverain et fort de son rôle au sein de la famille arabe ainsi que dans la communauté internationale. Mais c’est avant tout la responsabilité des Libanais eux-mêmes.
Ali Hamade est journaliste éditorialiste au journal Annahar, au Liban.
Twitter: @AliNahar
NDLR: Les opinions exprimées dans cette rubrique par leurs auteurs sont personnelles, et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d’Arab News.