Compte tenu des changements politiques et sécuritaires en cours dans le monde et les alliances futures attendues, il est désormais nécessaire pour les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord de prendre des décisions sécuritaires et militaires essentielles pour maintenir la stabilité dans la région. Les répercussions de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les sanctions économiques internationales unifiées contre Moscou et la possibilité de conclure un nouvel accord nucléaire avec l’Iran augmenteront certainement la portée et la gravité des défis sécuritaires à venir dans la région.
La relance du Plan d’action global commun (PAGC) avec le régime iranien ouvrira le robinet d’argent de Téhéran et il enrichira ses milices par procuration en Irak, au Liban, en Syrie et au Yémen. Il renforcera par ailleurs leur influence et leurs atrocités contre ce que le régime iranien considère comme des gouvernements hostiles et il portera atteinte à leurs citoyens innocents.
Le conflit américain et européen avec la Russie a mis en évidence l’importance de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (Otan) dans la protection de ses membres contre d’éventuelles menaces militaires et il devrait susciter l’idée d’une alliance arabe similaire pour empêcher toute action agressive contre ces pays.
Serait-ce donc une solution? Si tel est le cas, serait-il possible de former une alliance aussi puissante?
L’idée d'une alliance de sécurité au Moyen-Orient n’est pas nouvelle. On en parle depuis les années 1950. Le pacte de Bagdad (qui ne comptait qu’un seul membre arabe – l’Irak – aux côtés de la Turquie, de l’Iran, du Pakistan et du Royaume-Uni) a duré près de deux décennies à partir du milieu des années 1950.
Selon David Des Roches, du Near East and South Asian Center de la National Defense University de Washington, l’idée d’une Otan arabe ou même d’une Otan du Golfe présente trois problèmes qui rendraient difficile la formation d’une telle alliance. «Il n’existe pas de vraie relation d’égal à égal. La population égyptienne a toujours été d’une telle importance qu’elle dominerait n’importe quelle alliance. L’Arabie saoudite joue à peu près le même rôle au sein du Conseil de coopération du Golfe (CCG). Lorsque les gens appellent à la constitution d’une Otan au Golfe, cela ressemble en quelque sorte à une alliance entre les États-Unis, les Pays-Bas, le Portugal et la Grèce. Les tailles des pays sont si différentes que vous ne pouvez pas avoir d’alliance véritablement équitable», indique-t-il.
Le deuxième problème serait le rôle d’Israël, car les enjeux israélo-palestiniens compliqueront toujours un tel arrangement.
Le troisième problème, selon M. Des Roches, est le manque de confiance entre les pays de la région.
Cependant, même avec ces arguments tout à fait valables, une coalition arabe active est absolument nécessaire pour mettre fin à la menace iranienne et empêcher toute potentielle ingérence russe dans la région. Un plan militaire de défense unifié, le déploiement de systèmes de missiles efficaces dans les pays de cette alliance, le partage de renseignements et une force multinationale sont des choix pertinents pour sécuriser l’ensemble de la zone et faire face au terrorisme radical.
En évoquant les pays qui rejoindraient probablement cette alliance militaire, David Des Roches cite ceux qui sont les plus proches de l’Occident, comme le Maroc, la Jordanie, Bahreïn et les Émirats arabes unis (EAU). «L’Arabie saoudite pourrait éventuellement passer dans ce camp. L’Égypte reste un joker, car elle est farouchement nationaliste et jalouse de sa souveraineté. Mais elle rejoindrait l’alliance si elle estimait qu’il y avait des avantages sécuritaires et financiers significatifs», ajoute-t-il. Le Koweït, selon lui, serait également dans ce camp si Israël était tenu à l’écart.
«Indépendamment de toutes ces différences, la nécessité d’une alliance militaire forte, bien équipée et professionnellement formée, semble plus qu’évidente.» - Dalia al-Aqidi
Indépendamment de toutes ces différences, la nécessité d’une alliance militaire forte, bien équipée et professionnellement formée, semble plus qu’évidente.
Et si l’Iran décidait de s’emparer de certains territoires irakiens ou syriens pour les utiliser comme bases afin de mener de nouvelles attaques militaires dans la région? Et si la Turquie annexait certaines régions du nord de l’Irak? Et si une solution pacifique ne voyait pas le jour au Yémen? Et si un gouvernement irakien affilié au régime iranien décidait d’envahir à nouveau le Koweït? Et si Hassan Nasrallah installait un système de missiles à la frontière libano-israélienne? Et si la Russie tendait la main à l’Afrique du Nord?
Des pays tels que l’Égypte, l’Arabie saoudite, les EAU et le Maroc devraient sérieusement envisager d’établir une Otan arabe avec des conditions strictes pour tous les pays qui souhaitent y adhérer.
Il est temps que les pays modérés du Moyen-Orient gagnent en puissance en ne dépendant que d’eux-mêmes et en unissant leurs efforts pour lutter contre toute menace qui pèse sur eux.
Dalia al-Aqidi est chercheure principale au Center for Security Policy. Twitter: @DaliaAlAqidi
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com