Une tragédie sans précédent a frappé la Russie le 22 mars dernier, lorsque des hommes armés ont lancé une attaque brutale contre l’hôtel de ville de Crocus, à Moscou. Plus de 140 personnes ont été tuées. Les événements de ce jour fatidique – l’attaque la plus meurtrière sur le sol russe depuis des décennies – ont plongé la nation dans le deuil et le choc.
Dans une démonstration de violence effrayante, des militants armés de fusils et d’engins incendiaires ont pris d’assaut la salle quelques instants seulement avant le début d’un concert, tirant sans discernement sur des spectateurs qui ne se doutaient de rien. Le carnage qui a suivi a mis en évidence la brutalité de l’attaque, rappelant l’horreur du terrorisme international. Au milieu du chaos et de la destruction, le spectre du terrorisme se faisait de plus en plus menaçant. L’État islamique au Khorassan a revendiqué cet acte odieux, ce qui a exacerbé l’angoisse des personnes touchées.
La diffusion des images de l’attaque a brutalement rappelé la menace omniprésente que représentent les idéologies extrémistes et elle a souligné la nécessité urgente d’une action collective pour combattre les forces de la haine et de la division. Cet attentat a rappelé le danger terrible que pose l’organisation terroriste Daech et le changement qu’elle a opéré au niveau des zones géographiques de ses actions.
L’opération de Moscou a clairement mis en évidence la capacité d’adaptation de Daech et son aptitude à perpétrer des actes de terreur au-delà de ses frontières géographiques traditionnelles. Malgré des échecs importants, notamment la perte de territoires cruciaux, l’organisation pose un défi de taille à la sécurité mondiale.
Deux semaines à peine avant l’attaque, des responsables américains avaient informé la Russie, publiquement et en privé, de l’existence d’«extrémistes» qui avaient «l’intention imminente» de mener une telle attaque. Cet échange essentiel de renseignements s’inscrit dans le cadre d’un principe directeur au sein de la communauté du renseignement américain connu sous le nom d’«obligation de mise en garde». Ce principe veut que les agences de renseignement américaines donnent la priorité au partage d’informations critiques sur les menaces imminentes chaque fois que cela est possible. Cet engagement s’applique, indépendamment de l’identité des cibles potentielles – alliés, adversaires ou à mi-chemin entre les deux.
L’attaque terroriste a tiré la sonnette d’alarme aux États-Unis, comme l’a indiqué le secrétaire d’État, Antony Blinken, qui a rappelé la menace persistante que représente Daech. Malgré les efforts considérables déployés pour lutter contre cette menace au fil des années, M. Blinken a souligné que l’attaque de Moscou était un indicateur frappant du potentiel de violence durable du groupe.
S’exprimant du département d’État, il a présenté ses condoléances aux familles des victimes innocentes et insisté sur la nécessité de déployer des efforts soutenus pour empêcher Daech de reprendre du poil de la bête et de commettre de nouveaux actes de terreur. Les propos de M. Blinken sont un appel à l’action. Il a répété combien il était important d’affronter et de neutraliser la menace posée par les groupes radicaux pour garantir la sécurité des communautés du monde entier.
«Malgré des échecs importants au Moyen-Orient, Daech continue de poser un défi de taille à la sécurité mondiale.»
Dalia al-Aqidi
Cet événement a déclenché un débat crucial qui nous incite à réfléchir à une question fondamentale: si un pays comme la Russie, connu pour ses contrôles rigoureux aux frontières et sa surveillance méticuleuse des points de passage, est toujours vulnérable aux attaques terroristes, qu’en est-il des États-Unis?
Sous l’administration Biden, le pays a été témoin d’un flux important d’immigrants illégaux qui traversent ses frontières sans restriction ni contrôle. Cette poussée, qui se produit dans un paysage complexe de politiques d’immigration et de défis de mise en application, soulève des inquiétudes légitimes quant à la capacité des États-Unis à se défendre contre la menace imminente de l’extrémisme.
Les États-Unis peuvent-ils se protéger efficacement contre les dangers posés par des éléments extrémistes, en particulier lorsque leurs frontières sont si poreuses? Cette question est au cœur du discours sur la sécurité nationale et exige un examen nuancé des cadres politiques et de leurs implications pour protéger le pays des menaces.
Apportant récemment leur témoignage, un général militaire et le directeur du renseignement national ont lancé un cri d’alarme au sujet de la menace importante posée par Daech et ses affiliés. Ils ont mis en avant leur analyse des attaques potentielles à l’intérieur du pays. Cependant, selon l’évaluation nationale des risques de financement du terrorisme réalisée par le département du Trésor pour 2024, la principale menace terroriste contre le pays émane actuellement d’individus qui résident dans le pays. Ces derniers, influencés par des idéologies associées à des groupes comme Al-Qaïda et Daech ou par la violence de l’extrémisme national, sont prêts à mener des attaques meurtrières de manière indépendante sans les ordres directs d’une quelconque organisation terroriste.
Cette évaluation souligne la nature évolutive du terrorisme, en particulier l’influence croissante de la radicalisation en ligne via les réseaux sociaux. Ces plates-formes sont un terrain virtuel fertile pour les individus sensibles aux idéologies extrémistes. Elles leur fournissent un moyen de se connecter, de se radicaliser et de coordonner des attaques avec une détection limitée. Par conséquent, le paysage de la sécurité intérieure est devenu de plus en plus complexe, ce qui nécessite une approche multiforme des efforts de lutte contre le terrorisme.
Un rapport similaire du département de la sécurité intérieure soutient que le terrorisme, qu’il provienne de sources étrangères ou nationales, demeure une menace importante pour la sécurité des États-Unis en 2024. Cependant, le paysage des menaces évolue et de nouveaux défis émergent aux côtés des menaces traditionnelles. Le département en question estime que, à l’avenir, le risque de violence qui émane d’individus radicalisés à l’intérieur du pays persistera à un niveau élevé. Cette menace se caractérise par le fait que des acteurs isolés ou de petits groupes mènent des attaques avec un minimum de mises en garde préalables, ce qui pose des défis importants aux forces de l’ordre et aux services de renseignement.
Le rapport souligne que les organisations terroristes étrangères comme Al-Qaïda et Daech cherchent activement à reconstruire leurs capacités à l’étranger. Ces groupes entretiennent de vastes réseaux mondiaux de partisans, ce qui fait craindre qu’ils soient en mesure de prendre les États-Unis pour cible.
C’est pour cette raison que la vigilance et des mesures proactives sont essentielles afin de contrer la nature multiforme du terrorisme moderne. Alors que les États-Unis font face à des menaces en constante évolution, les décideurs politiques, les forces de l’ordre et la communauté au sens large doivent s’attaquer aux causes profondes de l’extrémisme. Cela comprend des efforts robustes pour lutter contre la radicalisation en ligne, améliorer les mécanismes de partage de renseignements et renforcer la résilience des communautés contre les influences extrémistes.
En adoptant une approche globale qui s’attaque à la fois aux signes et aux facteurs sous-jacents du terrorisme, les administrations américaines peuvent mieux protéger le pays et atténuer le risque d’attaques futures.
Dalia al-Aqidi est directrice exécutive de l’American Center for Counter Terrorism.
X: @DaliaAlAqidi
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com