Malgré les obstacles, les femmes cinéastes arabes à l'assaut des sujets qui fâchent

L'actrice et réalisatrice irakienne Zahraa Ghandour pose pour une photo lors d'une interview en marge de la 5e édition du Festival du film de Gouna dans la station balnéaire égyptienne d'el-Gouna, sur la mer Rouge, le 21 octobre 2021. (Photo, AFP)
L'actrice et réalisatrice irakienne Zahraa Ghandour pose pour une photo lors d'une interview en marge de la 5e édition du Festival du film de Gouna dans la station balnéaire égyptienne d'el-Gouna, sur la mer Rouge, le 21 octobre 2021. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 07 décembre 2021

Malgré les obstacles, les femmes cinéastes arabes à l'assaut des sujets qui fâchent

  • Si à Hollywood, sur les 250 plus grosses productions de 2020, seules 18% avaient été réalisées par des femmes, le cinéma arabe a quasiment atteint la parité
  • «Le plus grand défi pour nous dans le monde arabe, c'est qu'il n'y a pas d'infrastructures, par exemple, la post-production doit se faire à l'étranger»

EL-GOUNA : Sur les tapis rouges des festivals d'Egypte, temple historique du cinéma arabe, des femmes se distinguent avec des documentaires qui exposent tabous et non-dits dans une région où salles et fonds pour le grand écran se font rares.

Si à Hollywood, sur les 250 plus grosses productions de 2020, seules 18% avaient été réalisées par des femmes, le cinéma arabe fait bien mieux. En 2019, avant la pandémie de Covid-19, la parité était quasiment atteinte, selon l'Université de Northwestern au Qatar.

Parmi les nouvelles cinéastes de la région, Zahraa Ghandour, 30 ans, qui raconte dans "Femmes de ma vie" un féminicide dans un Irak conservateur où la coutume tribale fait loi.

L'actrice et réalisatrice qui a participé à Bagdad à la révolte antipouvoir fin 2019, dénonce avec son documentaire une société "qui traite les féminicides comme s'il était normal que (les femmes) soient tuées par leurs familles ou dans la rue".

"En tant qu'Irakiens, nos vies sont instables mais le meurtre ciblé des femmes en particulier ne doit pas être banalisé", affirme-t-elle à l'AFP depuis le très mondain festival du film d'el-Gouna.

L'un des rôles principaux dans son film, Zahraa Ghandour se revendique d'une "nouvelle génération née dans les années 1990 et 2000 qui a émergé et tracé un nouveau cap", dans le 7e art comme en politique.

En prenant elle-même la caméra, la jeune femme qui a joué dans des productions occidentales explique qu'elle veut avec d'autres "s'affranchir des clichés dans lesquels nous enferme le cinéma international". 

Une liberté de ton qui a un prix, convient la cinéaste, cheveux bouclés et fossettes creusées par son sourire.

Dans son pays où quasiment aucun cinéma ne subsiste, "il n'y a pas de soutien, donc il faut chercher ailleurs", mais au-delà des frontières, "il y a des tendances et il faut y correspondre pour obtenir des financements", déplore-t-elle.

"Mais si j'ai envie de faire un film d'horreur par exemple? Je veux pouvoir faire ce que je veux tant que c'est un film de qualité", plaide-t-elle.

«D'autres histoires»

"Le plus grand défi pour nous dans le monde arabe, c'est qu'il n'y a pas d'infrastructures, par exemple, la post-production doit se faire à l'étranger", renchérit la productrice palestinienne Rafia Oraidi.

"Nous n'avons pas de studios sur mesure donc nos budgets sont énormes et nous sommes forcés de nous associer avec des co-producteurs", poursuit celle qui navigue dans le cinéma indépendant depuis une quinzaine d'années.

Pour son dernier opus, elle s'est alliée à la réalisatrice palestino-américaine Hind Choufani pour raconter une poignante quête transgénérationnelle dans "Ils ont planté des arbres étranges".

Encore en post-production, le film "suit le quotidien des habitants du village d'origine de la réalisatrice en Galilée", territoire appartenant aujourd'hui à Israël, où cette dernière "rencontre pour la première fois sa famille élargie 20 ans après la mort de ses parents", raconte la productrice.

Pour elle, il est primordial de "montrer qu'il y a beaucoup d'autres histoires en Palestine au-delà de la guerre, la destruction et l'occupation".

"Il y a une vie dont le rythme particulier est imperceptible dans les médias", insiste-t-elle mais qu'ont déjà réussi à dépeindre les figures de proue du cinéma palestinien indépendant, comme les réalisateurs Elia Suleiman ou Hany Abu-Assad, tous deux primés à l'international.

"Sans leur attention, leur patience et leur persévérance face aux conditions dans lesquelles on vit, nous n'aurions pas même un film sur les écrans", assure Mme Oraidi.

«Liberté d'expression»

A l'autre bout de la Méditerranée, la Tunisienne Fatma Riahi souhaite faire de son prochain documentaire en cours de réalisation, un "récit biographique et personnel".

Elle y explore les résonances entre l'histoire de son père, son rôle dans le coup d'Etat qui a renversé l'ex-président tunisien Habib Bourguiba en 1987, et la Tunisie post-révolution de 2011 qui a chassé son successeur, Zine el-Abidine Ben Ali.

"En tant que réalisatrice tunisienne, j'ai encore mon entière liberté d'expression", se félicite Mme Riahi.

Et elle entend bien utiliser cette liberté, rare au Moyen-Orient, pour "offrir une lecture alternative des 30 dernières années de l'histoire tunisienne, depuis les coups d'Etats aux révolutions et à ce que l'on vit actuellement avec Kaïs Saied", l'actuel président qui s'est arrogé fin juillet les pleins pouvoirs, explique-t-elle à l'AFP.

Si depuis 2011, le cinéma tunisien a bourgeonné, il reste trop masculin, estime cette trentenaire. 

"Il y a encore du chemin à faire", assure-t-elle.


Il mange la banane... qu'il a achetée 6 millions d'euros

Est-ce la bouchée la plus chère de l'histoire? Acheteur à 6 millions d'euros d'une oeuvre d'art, constituée d'une banane scotchée à un mur, un homme a tenu vendredi sa promesse: il a mangé le fruit. (AFP)
Est-ce la bouchée la plus chère de l'histoire? Acheteur à 6 millions d'euros d'une oeuvre d'art, constituée d'une banane scotchée à un mur, un homme a tenu vendredi sa promesse: il a mangé le fruit. (AFP)
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  • L'oeuvre consiste en une banane accrochée à un mur avec un gros morceau de scotch argenté. Intitulée "Comedian", elle a été créée par l'artiste iconoclaste et provocateur italien Maurizio Cattelan
  • Elle avait été vendue la semaine dernière à New York pour 6,2 millions de dollars (5,9 millions d'euros) lors d'une vente aux enchères organisée par la maison Sotheby's

HONG KONG: Est-ce la bouchée la plus chère de l'histoire? Acheteur à 6 millions d'euros d'une oeuvre d'art, constituée d'une banane scotchée à un mur, un homme a tenu vendredi sa promesse: il a mangé le fruit.

Dans un luxueux hôtel de Hong Kong, Justin Sun, entrepreneur sino-américain et fondateur de la plateforme de cryptomonnaies Tron, a englouti la banane devant des dizaines de journalistes et d'influenceurs.

Le trentenaire avait auparavant prononcé un discours qualifiant cette oeuvre d'art d'"iconique" et établi des parallèles entre l'art conceptuel et les cryptomonnaies.

"Elle est bien meilleure que les autres bananes", a-t-il déclaré après avoir avalé la première bouchée.

"C'est vraiment très bon", a-t-il souligné.

L'oeuvre consiste en une banane accrochée à un mur avec un gros morceau de scotch argenté. Intitulée "Comedian", elle a été créée par l'artiste iconoclaste et provocateur italien Maurizio Cattelan.

Elle avait été vendue la semaine dernière à New York pour 6,2 millions de dollars (5,9 millions d'euros) lors d'une vente aux enchères organisée par la maison Sotheby's.

Justin Sun a déclaré avoir ressenti de l'"incrédulité" dans les dix premières secondes après avoir remporté la vente. A l'issue des dix secondes suivantes, il avait décidé qu'il mangerait la banane.

"La manger lors d'une conférence de presse peut aussi faire partie de l'histoire de cette oeuvre d'art", a-t-il expliqué vendredi.

L'oeuvre existe en trois exemplaires. Elle est censée interroger la notion d'art et sa valeur. Elle a beaucoup fait parler d'elle depuis sa première exposition en 2019 à Miami.

Le propriétaire d'une des oeuvres reçoit un certificat d'authenticité ainsi que des instructions sur la manière de remplacer le fruit lorsqu'il commence à pourrir.

Justin Sun a comparé vendredi les oeuvres conceptuelles comme "Comedian" à l'art NFT ("jeton non fongible") et à la technologie blockchain décentralisée.

"La plupart de ces objets et idées existent en tant que (propriété intellectuelle) et sur internet, par opposition à quelque chose de physique", a-t-il souligné.

Justin Sun a par ailleurs annoncé cette semaine un investissement de 30 millions de dollars (28,4 millions d'euros) dans World Liberty Financial, plateforme de placement et d'emprunt en cryptomonnaie, soutenue par le président élu américain Donald Trump.

Les participants à l'événement de vendredi ont chacun reçu un rouleau de ruban adhésif et une banane en guise de souvenir.


Secrets de Cuisine : Le Chef Jonas Plangger de Myra Jeddah Partage ses Conseils et une Recette de Madeleines aux Fruits

Le chef pâtissier allemand Jonas Plangger. (Fourni)
Le chef pâtissier allemand Jonas Plangger. (Fourni)
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  • Le secret de toute cuisine, qu'elle soit à la maison, en milieu professionnel ou ailleurs, réside dans une planification minutieuse

Dubaï : Il y a trois ans, le chef pâtissier allemand Jonas Plangger a accepté une offre d'Amro Bagedo, fondateur et PDG de Kraiv en Arabie Saoudite, pour diriger le lancement de la pâtisserie et du concept de “restaurant ouvert en continu” Myra Jeddah, en tant que chef pâtissier exécutif. Une décision qui, à l'époque, a presque mis son mariage en péril.

Habitué à voyager à l’étranger pour son travail, Plangger a accepté le poste, expliquant que son “intuition” l’avait poussé à dire oui dès que le défi lui avait été présenté. Ce n’est qu’après avoir pris sa décision qu’il en a informé sa femme, qui n’a pas été particulièrement ravie de ne pas avoir été consultée.

Heureusement, cette décision s’est révélée fructueuse tant sur le plan personnel que professionnel pour M. Plangger et sa famille, qui se sont désormais épanouis et bien établis dans le Royaume.

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Myra Jeddah, où Jonas Plangger est le chef pâtissier exécutif (fourni).

Selon lui, Myra est en pleine expansion. “Le petit-déjeuner représente une part essentielle de notre activité, le déjeuner se porte également très bien, et c’est le soir que la demande de gâteaux atteint son apogée”, confie-t-il à Arab News. “Nous bénéficions d’une clientèle solide et constante tout au long de la journée”.

Une clientèle qu’il considère particulièrement exigeante.

“Le client saoudien est extrêmement exigeant,” confie M. Plangger. “Il souhaite tout, et tout de suite, avec des attentes très élevées... mais une fois conquis, il devient l’un des clients les plus fidèles que l’on puisse avoir”.

“Nous sommes prêts à lancer la marque à Riyad, la prochaine grande étape, et j'ai vraiment hâte d'y être”, confie-t-il. “L'entreprise connaît une expansion rapide, et c'est une période incroyablement enthousiasmante. Mon équipe, qui me soutient depuis le premier jour, me remplit de fierté. Ce sont des pâtissiers talentueux, et nous sommes fiers de ce que nous créons. Comparé à ce que le marché offre actuellement, je suis convaincu que nous réussissons à nous distinguer”.

Quel est le meilleur conseil que vous donneriez aux passionnés ?

Le secret de toute cuisine, qu'elle soit à la maison, en milieu professionnel ou ailleurs, réside dans une planification minutieuse. Prenez une feuille de papier, notez vos étapes : 1, 2, 3, 4, 5, et suivez-les avec méthode. Ce que font souvent les débutants—et ce que j'ai moi-même fait par le passé—c'est essayer de tout faire en même temps. Mais cela ne fonctionne pas. Une liste claire des tâches à accomplir est essentielle. Travaillez de manière propre, organisée, et réfléchie, avec une vision précise de ce que vous faites. Planifiez tout : le four est-il préchauffé ? Ai-je mes bols ? Mon tamis ? Tous mes ingrédients sont-ils prêts ? Parce que si, au moment critique, il vous manque de la farine, qu’elle est rangée dans un placard introuvable, ou pire, que vous devez appeler quelqu’un pour savoir où elle est, c’est la catastrophe assurée.

Quel ingrédient peut améliorer le goût de n’importe quel plat ?

Pour moi, c’est la gousse de vanille. Elle est, sans aucun doute, le “turbo” de tous les desserts : elle confère une élégance subtile et une touche de luxe à chaque préparation. Je suis totalement fasciné par cet ingrédient. Bien qu’il soit coûteux, il enrichit chaque plat d’une profondeur de saveur inégalée.

Et quel est l’ingrédient le plus sous-estimé ?

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Probablement la cannelle. Bien sûr, tout le monde la connaît comme ingrédient incontournable dans un crumble aux pommes ou un roulé à la cannelle, mais son potentiel va bien au-delà. Au Moyen-Orient notamment, elle est utilisée dans une incroyable variété de desserts. Même dans une simple génoise à la vanille, l’ajout d’un demi-gramme de cannelle peut rehausser les saveurs de manière subtile, sans que son goût domine. C’est une épice à la fois raffinée et incroyablement sous-estimée.

Quand vous allez au restaurant, arrivez-vous à éviter de critiquer la nourriture, ou est-il impossible de désactiver votre “esprit de chef” ?

Non, je n’y arrive pas. Quand j’apprécie quelque chose, que ce soit sur le plan personnel ou professionnel, cela me rend très heureux. Cependant, je ne peux m’empêcher de remarquer les détails, parfois en pinaillant, ce qui est assez naturel. Cela fonctionne dans les deux sens : les chefs sont certes plus critiques, mais lorsqu’un établissement fait preuve d’efforts, avec un service de qualité, une excellente cuisine et une expérience globale réussie, j’aime sincèrement prendre le temps de féliciter et de reconnaître ce travail.

Quel est le problème le plus courant que vous remarquez dans les autres restaurants ?

Le manque d’assaisonnement. Je peux tolérer bien des choses : un restaurant surchargé où le service est affecté, ou un plat qui ne correspond pas tout à fait à mes préférences. Mais une nourriture fade, c’est impardonnable. Cela révèle un manque d’attention et démontre que le chef n’a pas pris le temps de goûter ses propres plats.

Quelle est votre cuisine préférée ?  

La cuisine italienne. C’est la quintessence de la simplicité : des saveurs pures et authentiques. J’adore les pâtes. Lors d’un récent voyage en Italie, j’ai découvert à quel point cette cuisine est unique. Avec seulement quatre, cinq, ou six ingrédients, ils parviennent à créer des plats incroyables. J’adore cette approche.

Quel est votre plat préféré ?  

Les gâteaux de la Forêt-Noire. Étant originaire de cette région, ils occupent une place particulière dans mon cœur, et nous les prenons très au sérieux. Les préparer est un véritable plaisir, car ils incarnent mes racines et reflètent mon identité. C’est cette connexion personnelle qui me pousse à les réaliser avec autant de passion.

La première fois que vous en avez réalisé un, avez-vous ressenti une grande pression ?

Pour être honnête, durant mon apprentissage dans une boulangerie, nous en réalisions environ 80 par jour. C’est ainsi que j’ai appris, à partir de rien, au cœur même de la Forêt-Noire.

Quel type de comportement chez les clients avez-vous le plus de mal à supporter ?

Quand quelqu’un assaisonne un plat sans même l’avoir goûté, c’est quelque chose que je ne supporte pas. Je trouve cela extrêmement impoli et un manque de respect envers le chef. Goûtez d’abord, au moins.

Quel est, selon vous, le plat le plus difficile à maîtriser ?

Du point de vue d’un chef, les plats les plus complexes à maîtriser sont ceux qui reposent sur une simplicité absolue, sans embellissements pour masquer les imperfections. Il n’y a aucune place pour l’erreur. En pâtisserie, par exemple, on peut parfois camoufler une erreur avec du chocolat, mais dans des cuisines comme celle des sushis, tout repose sur deux éléments : le riz et le poisson. Si le riz n’est pas parfaitement cuit, si le poisson n’est pas d’une qualité irréprochable, ou si la technique est défaillante, le plat est compromis. En pâtisserie, cet enjeu s’applique particulièrement à des réalisations comme la cuisson d’un croissant, par exemple. Une seule erreur, que ce soit dans le laminage ou la cuisson, peut ruiner le résultat final. Peu de gens mesurent l’effort et la précision nécessaires pour produire un croissant parfait.

Comment vous décrivez-vous en tant que chef en cuisine ?

Ferme mais juste. Je suis animé par une passion profonde, parfois débordante. Les choses peuvent devenir intenses, mais j’aime diriger et, surtout, enseigner pour aider mon équipe à progresser. La discipline est, pour moi, non négociable. Mon expérience dans des établissements étoilés Michelin m’a appris que sans discipline, rien n’est possible. Mon équipe, composée de talents venus des quatre coins du monde, est unie par un principe commun qui nous guide : la discipline.


Les 30 ans de la PlayStation, console qui a fait basculer le jeu vidéo dans l'âge adulte

Une PlayStation originale est exposée dans le hall d'entrée du siège de Sony, au centre de Tokyo, le 27 novembre 2024. Le 3 décembre 2024 marquera le 30e anniversaire de la première sortie de la PlayStation de Sony au Japon, qui a transformé le monde des jeux vidéo. (AFP)
Une PlayStation originale est exposée dans le hall d'entrée du siège de Sony, au centre de Tokyo, le 27 novembre 2024. Le 3 décembre 2024 marquera le 30e anniversaire de la première sortie de la PlayStation de Sony au Japon, qui a transformé le monde des jeux vidéo. (AFP)
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  •  Le 3 décembre 1994 sort au Japon la PlayStation, première incursion de Sony dans le jeu vidéo
  • Cette machine, lancée par des séries devenues cultes comme "Tekken", est le fruit d'une brouille entre l'inventeur du Walkman et le leader du marché au début des années 1990, Nintendo

PARIS: Le 3 décembre 1994 sort au Japon la PlayStation, première incursion de Sony dans le jeu vidéo. Un succès mondial, notamment auprès d'un public plus adulte, qui a propulsé le constructeur japonais au rang d'acteur majeur du secteur.

Cette machine, lancée par des séries devenues cultes comme "Tekken", est le fruit d'une brouille entre l'inventeur du Walkman et le leader du marché au début des années 1990, Nintendo.

Le partenariat qu'ont noué les deux entreprises, visant à sortir un lecteur de CD compatible avec la console Super Nintendo, tombe à l'eau lorsque le créateur de Mario fait volte-face pour s'allier avec Philips.

"Sony s'est retrouvé dans une position humiliante et décide de lancer la +Play Station+ (le nom du prototype développé pour Nintendo, NDLR) en tant que console indépendante", raconte Hiroyuki Maeda, spécialiste japonais de l'histoire des jeux vidéo.

Conscient de sa position de novice, le fabricant d'équipements électroniques vise alors les jeunes adultes, notamment via des campagnes de publicité au ton décalé.

"C'est un public qui a un meilleur pouvoir d'achat que les enfants, qui étaient souvent la cible des consoles Nintendo", explique Philippe Dubois, président de l'association française pour la préservation du patrimoine numérique M05.

Capable de lire les CD audio, la machine séduit au-delà du jeu vidéo. Un élément marketing que reprendront la Playstation 2 et son lecteur DVD (160 millions d'exemplaires écoulés dans le monde, plus gros succès de la gamme PlayStation), puis la PS3 et son lecteur Blu-Ray.

- Ruée vers la 3D -

Pour Hiroyuki Maeda, "la PlayStation a changé l'histoire des jeux vidéo. Elle a vraiment tout transformé: le matériel, les logiciels, la distribution et le marketing."

Car ce changement de cible s'accompagne aussi d'une révolution technologique.

"Pour beaucoup de joueurs, elle a été une porte d'entrée vers l'évolution majeure du milieu des années 90: le passage à la 3D", assure Philippe Dubois.

Jeux de sports, de combats, de course... De nombreux studios se tournent vers cette console pour expérimenter autour de cette nouvelle technologie, attirés par des kits de développement moins chers que ceux de la concurrence et le format CD, encore peu répandu et aux capacités de stockage bien plus élevées qu'une cartouche de jeu.

Cette ruée vers la 3D accouche de classiques comme "Tomb Raider" (1996), "Resident Evil" (1996) et "Final Fantasy VII" (1997).

Avec ces jeux, "on a découvert des sensations, des émotions qu'on n'avait pas connues avec les consoles d'avant", se souvient Cyril 2.0, 46 ans, qui fait découvrir la ludothèque de la machine sur sa chaine YouTube.

Ce Français de 46 ans possède près de 1.400 titres de la première PlayStation.

"Les jeux, c'est le plus important sur une console", souligne-t-il, devant sa collection répartie sur plusieurs bibliothèques. Mais il ajoute qu'à la différence de Nintendo, "on est plus attaché à la marque PlayStation qu'à des personnages en particulier".

- Héritage -

Le pari est largement gagné pour Sony: le constructeur, qui visait au minimum un million de ventes pour amortir le coût de développement, en écoulera plus de 102 millions.

Son souvenir est toujours vif dans l'esprit des créateurs d'aujourd'hui.

"C'est la première console où j'ai des souvenirs de jeux qui m'ont marqué et qui maintenant m'inspirent", témoigne Bastien Giafferi, développeur français derrière "The Operator", succès de la scène indépendante en 2024.

Cet héritage transparaît également dans les différentes générations de la console, qui en est à sa cinquième et a connu des versions portables au succès bien moins important.

Début novembre, Sony a aussi lancé une version Pro — plus puissante — de sa PlayStation 5, ainsi qu'une gamme de produits en édition limitée reprenant la teinte grise de la console originale.

"Les habitudes, les jeux, les marques, les icônes, tout ce qu'elle a lancé au niveau de la culture du jeu vidéo... Je pense qu'il n'y aura plus d'équivalent", regrette toutefois Philippe Dubois, qui prédit une disparition prochaine des consoles au profit du jeu en streaming sur internet.