Les intérêts du peuple iranien ont au moins un point commun avec les peuples de tous les pays du monde, c'est le démantèlement du programme nucléaire iranien dans son intégralité. Selon plusieurs de ses responsables, le régime iranien a jusqu'à présent dépensé des milliards de dollars (1 dollar = 0,86 euro) afin de fabriquer des armes nucléaires au lieu de construire des milliers d'hôpitaux, d'universités, d'écoles et de centres de recherche au service de la population.
Selon un journal prorégime, la théocratie iranienne a créé des tensions avec tous les pays afin de fabriquer l’arme nucléaire et a donc pris en otage l'économie iranienne avec des armes nucléaires. Et elle a pris en otage non seulement l'économie iranienne, mais aussi ses relations culturelles et commerciales avec les pays voisins. La théocratie iranienne n'a pratiquement aucun ami dans d’autres pays, à l'exception de ses propres milices.
Mais la théocratie iranienne n'est tout simplement pas prête à renoncer aux armes nucléaires.
Il les considère comme le garant de sa survie. Depuis la révélation du programme nucléaire en 2002 par l'opposition, le Conseil national de la résistance iranienne (CNRI), et même en dépit de l'accord de 2015, les mollahs continuent de tenter par divers moyens de maintenir l'infrastructure de leurs installations nucléaires. Il est trop naïf, voire stupide, de penser qu'un accord nucléaire pourrait être conclu avec le gouvernement d'Ebrahim Raïssi pour démanteler les installations nucléaires iraniennes.
Le cabinet du président actuel, Ebrahim Raïssi, est totalement «sécuritaire». Trente membres de son cabinet et de son équipe administrative sont d'anciens commandants du Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI) ou d'anciens membres du cabinet du président Ahmadinejad de 2008 à 2016. Récemment, un certain nombre de commandants de du CGRI ont été nommés gouverneurs de plusieurs provinces. Cependant, au cours des trois mois qui se sont écoulés depuis l'arrivée au pouvoir d'Ebrahim Raïssi, le cabinet n'a présenté aucun programme spécifique pour résoudre les problèmes économiques et l'inflation galopante ou pour reconstruire les relations extérieures avec les pays du monde entier. Ebrahim Raïssi a été «choisi» avant tout pour contrer les soulèvements à venir. Son cabinet sécuritaire en est la preuve.
Dans le domaine de la politique étrangère, Ebrahim Raïssi s'est engagé sur un chemin tortueux, dont l'avenir est très incertain.
À l'intérieur du pays, il n'y a pas de volonté spécifique pour finaliser le Plan d’action global commun (PAGC) en matière de programme nucléaire et répondre aux exigences du Groupe d’Action financière (Gafi).
Le régime iranien a posé des conditions préalables irréalistes, comme le fait que les États-Unis se retirent du Conseil de sécurité de l'Organisation des nations unies (ONU), ce qu’ils ne feront jamais et qui concerne les futurs présidents américains et sur lequel le président actuel ne peut rien faire. Le régime iranien a également demandé la levée de certaines sanctions qui relèvent de l'autorité du Congrès et non du président. Et fait ainsi traîner les négociations pour obtenir des concessions.
Négociations nucléaires
L'absence de réaction forte de l'Europe, telle que l'adoption d'une résolution par le Conseil des gouverneurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) de l’ONU, a encouragé le régime à créer des tensions et à forcer l'Europe à accepter le même accord de 2015, un accord qui a eu de grands avantages pour le régime iranien. Il a permis au régime de vendre du pétrole et de débloquer son argent, et il n'a pas empêché la possibilité d'une influence régionale et le développement de son programme de missiles longue portée. Donc pour atteindre cet objectif, le régime retarde les négociations. Sous le prétexte de la création du nouveau gouvernement, il quitte les pourparlers et prétend qu'il stocke de l'uranium enrichi nécessaire à la fabrication d'une bombe atomique. De cette façon, il ajoute aux inquiétudes des États-Unis et de l'Europe. Cependant, les informations obtenues montrent qu’au vu des explosions de Natanz, une des installations nucléaires iraniennes, et l’élimination de Mohsen Fakhrizadeh, le père du programme nucléaire iranien, il n'est pas possible de produire une bombe atomique avant longtemps.
Mais récemment, Rafael Grossi, directeur général de l’AIEA, a déclaré qu'il retournerait en Iran dans les prochains jours.
Il semble également vouloir rencontrer le président iranien, Ebrahim Raïssi. Cette affaire et le volume des visites diplomatiques récentes montrent que le P5+1 (groupe de six grandes puissances qui, en 2006, ont mis en commun avec l'Iran leurs efforts diplomatiques à l'égard de son programme nucléaire), à bout de patience, entend envoyer un message clair et très fort à l'Iran, d'autant que le Conseil des gouverneurs de l'AIEA est prévu en novembre.
Seul un langage fort adressé au régime iranien devrait être utilisé pour le contraindre à démanteler son programme nucléaire et mettre fin au chantage de l'Europe. Selon un ancien chef de la recherche stratégique sous Mohammed Khatami, l'ancien président de l'Iran, de la même façon que la reddition à la résolution 598 de la guerre Iran-Irak et la libération des otages américains à la suite de la pression internationale, cette fois aussi, un consensus international pour faire pression sur l'Iran, en plus des pressions écrasantes de l'effondrement économique et des craintes d'un nouveau soulèvement, pourraient contraindre Ali Khamenei, qui n'a pas d'autre choix, de se soumettre aux exigences du P5+1.
L'Europe sera par conséquent aux côtés du peuple iranien, qui paie le prix de la nucléarisation du régime dans une pauvreté sans précédent depuis quarante ans. Ainsi, elle trouvera également un très bon partenaire commercial et culturel.
Hamid Enayat est un expert de l'Iran et un écrivain basé à Paris, où il a fréquemment écrit sur les questions iraniennes et régionales au cours des trente dernières années.
TWITTER: @h_enayat
NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.