Une nouvelle lueur d'espoir pour la paix au Moyen-Orient

Des Palestiniens se reposent dans un centre de distribution d'aide de l'UNRWA à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza (Fichier/AFP)
Des Palestiniens se reposent dans un centre de distribution d'aide de l'UNRWA à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza (Fichier/AFP)
Short Url
Publié le Mercredi 27 janvier 2021

Une nouvelle lueur d'espoir pour la paix au Moyen-Orient

Une nouvelle lueur d'espoir pour la paix au Moyen-Orient
  • Toute allusion à un accord de paix global entre Israël et les Palestiniens dans un avenir proche ne manquera pas de susciter l’étonnement
  • Après plus de vingt-sept ans d'efforts infructueux pour instaurer la paix, la communauté internationale doit poursuivre ses efforts et s'attaquer de front à la question, avec courage et détermination

Toute allusion à un accord de paix global entre Israël et les Palestiniens dans un avenir proche ne manquera pas de susciter l’étonnement. Depuis près de vingt ans, toutes les initiatives dans ce sens n’ont pas réussi à prendre forme, en raison de la réticence ou de l'incapacité de l'une des parties au moins à modifier ses positions et ses comportements habituels. 

Néanmoins, ces derniers mois, en particulier depuis la signature d'accords de normalisation entre Israël et un certain nombre de pays arabes, et plus récemment avec le résultat de l'élection présidentielle américaine, il semble qu’une nouvelle dynamique soit apparue pour remettre le processus de paix sur les rails. Est-ce seulement un vœu pieux? Probablement, mais toute lueur d'espoir de paix mérite au moins une certaine attention et que l’on se penche sur les conditions qui pourraient la rendre vraisemblable. 

Une réunion prometteuse a eu lieu au Caire au début du mois. Différents ministres des Affaires étrangères, allemand, français, jordanien et égyptien, ont discuté d'une éventuelle relance du processus de paix, affichant, avec une certaine prudence, un optimisme renouvelé: certains progrès pourraient être réalisés si l’on parvenait à réunir à nouveau Israéliens et Palestiniens à la table des négociations. L'administration Trump et son prétendu plan de paix, irréel, désormais relégués au passé, les efforts diplomatiques peuvent recommencer, même au stade préliminaire, pour prendre le pouls des deux côtés afin de savoir si un dialogue initial est possible. 

Après plus de vingt-sept ans d'efforts infructueux pour instaurer la paix prévue par les accords d'Oslo, la communauté internationale doit poursuivre ses efforts et s'attaquer de front à la question, avec courage et détermination. Au cours des négociations d’Oslo, le fait même qu’Israéliens et Palestiniens aient parlé de paix constituait un élément nouveau encourageant, qui pouvait générer un soutien national et international et faire avancer le processus. À la lumière des risques de conséquences tragiques, outre le contexte actuel au sein des deux sociétés, tout processus de paix devrait être conduit par la communauté internationale, limité dans le temps et axé sur les résultats. 

Pour les Palestiniens, en particulier, un processus sans résultats serait non seulement vain, mais profondément nuisible pour le camp de la paix. Après plus de soixante-dix ans durant lesquels des millions de leurs compatriotes ont vécu en tant que réfugiés, et plus d'un demi-siècle de vie sous occupation et blocus, les Palestiniens n'ont pas grand-chose à espérer des négociations, à moins de constater des changements radicaux sur le terrain. De nouvelles séries de pourparlers sans fin, qui ne donnent aucun résultat, signifieraient non seulement la prolongation, sinon la perpétuation de l'occupation et, dans les faits, sa légitimation. 

Tout aussi préoccupant ces dernières années a été l’état d’esprit qui prévaut au sein de la communauté internationale. Selon elle, puisqu’un accord de paix global est impossible à réaliser, il est inutile d’essayer d’éviter l’enracinement de la situation actuelle ou même de l’empêcher de se détériorer. Au cours des quatre dernières années, le gouvernement israélien a bénéficié d'un appui américain pour étendre davantage ses colonies et caresser l'idée d'une annexion de certaines parties de la Cisjordanie. Cela a conduit à s’interroger sur le fait de savoir si un État palestinien indépendant se concrétiserait un jour, sans parler d'un État dont la capitale serait Jérusalem, tandis que le sort de 5,5 millions de réfugiés palestiniens, qui ont absolument besoin qu’on apporte une réponse juste et équitable à leurs conditions de vie, difficiles depuis des décennies, est ignoré. 

Il n'y a aucune raison de remettre en cause la sincérité de ceux qui se sont réunis au Caire en cherchant à ressusciter des relations dans l'impasse entre Israéliens et Palestiniens, mais il est légitime de se demander ce qu'ils sont prêts à faire pour que cela devienne une réalité. Au cours des prochains mois, les politiciens israéliens et palestiniens seront préoccupés par leurs élections respectives, ce qui rendra presque impossible tout dialogue constructif dans un esprit de compromis. Pourtant, il existe désormais une opportunité, étant donné la nouvelle administration américaine, probablement dynamique, les accords de normalisation, la perspective d'élections de l'Autorité palestinienne et le rétablissement de la coopération de cette dernière, basée sur l'engagement d'Israël envers les accords passés, d'unir les forces et de préparer le terrain pour un dialogue de paix. 

Dans une déclaration commune, à la fin de la réunion du Caire, les participants ont défini ce qui pourrait devenir la base des négociations, à condition d’user de leur influence pour y parvenir. Ces dernières années, des changements se sont produits, dans de nombreux pays de la communauté internationale, vers l'acceptation, comme un fait accompli, des actions unilatérales prises par Israël dans les territoires palestiniens occupés, admettant presque que cela constituerait la nouvelle référence pour les négociations de paix. Mais cette approche, même tacite, est contre-productive, sape les règles et le rôle du droit international. En outre, elle est moralement condamnable. 

Par conséquent, la déclaration des quatre ministres des Affaires étrangères au Caire, selon laquelle les résolutions précédentes de l'ONU doivent être la base de toute négociation future – ce qui signifie que toute négociation future sur un compromis territorial devrait être basée sur les frontières de juin 1967 –, est cruciale. Des compromis territoriaux peuvent être nécessaires, mais ils ne doivent pas être fondés sur la légitimation des actes illégaux d’Israël, qui consistent à construire des colonies en Cisjordanie et à y installer plus d’un demi-million de colons juifs. Au lieu de cela, la déclaration dénonce le fait que le projet de colonies sape la perspective d'un accord de paix basé sur une solution à deux États, avec Jérusalem-Est comme capitale de la Palestine. 

Un autre signe qui montre que le monde a poussé un soupir de soulagement lors du départ de Trump est l’accent mis dans la déclaration du Caire sur le «rôle indispensable de l’United Nations Relief and Works Agency [Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient, ou UNRWA] dans l’apport d’une assistance humanitaire et de services essentiels aux réfugiés palestiniens». Si un tel appel à la communauté internationale pour honorer ses engagements envers l'UNRWA est opportun, compte tenu de la pénurie chronique des ressources de l'organisation, des mesures doivent également être prises pour que soient associés des représentants de la communauté des réfugiés palestiniens dans toute négociation future – cela afin de garantir que les droits des réfugiés soient reconnus et pris en considération. 

Si la communauté internationale souhaite sérieusement faire revivre le processus de paix, elle doit suivre la vision présentée au Caire, mais elle doit également veiller à ce que toute personne élue cette année en Israël et en Palestine comprenne que se détourner de cette vision aurait de graves conséquences. 

Yossi Mekelberg est professeur de relations internationales à la Regent University de Londres, où il dirige le Programme des Relations Internationales et des Sciences Sociales. Il est professeur associé dans le Programme de la région du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord (Mena) à Chatham House. Il collabore régulièrement avec les médias écrits et en ligne. Twitter : @Ymekelberg 

NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français. 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur arabnews.com