Et si l’une des conséquences sociétales de la pandémie de la Covid-19 en France était une poussée violente du racisme et de la xénophobie ?
Il ne s’agit pas d’assombrir encore plus un horizon qui l’est déjà, mais cette interrogation se pose à la vue de l’ampleur des dégâts économiques que subit le pays.
Les experts et psychologues s’accordent sur le fait qu’on ne naît pas raciste mais on le devient.
Le cheminement d’une personne vers ce penchant est d’ordre individuel mais se nourrit d’un contexte général, d’un sentiment d’incertitude, de peur ou de menace.
Ce rejet de l’autre a accompagné les sociétés depuis la nuit des temps et se trouve exacerbé en temps de grande crise ou guerre ou, le cas échéant, de pandémie. L’apparition des premiers cas de coronavirus en France s’est accompagnée par un rebond du racisme à l’égard de la communauté asiatique et spécifiquement chinoise en raison de l’apparition du virus dans la ville de Wuhan au centre de la Chine.
Pour se défendre face à la discrimination qu’ils subissaient, ces ressortissants se sont réfugiés dans l’humour en faisant circuler sur les réseaux sociaux le slogan « je ne suis pas un virus ».
Par la suite avec la propagation du virus sur le territoire français la discrimination et l’hostilité se sont tournées vers les italiens en raison du grand nombre de cas d’infections au coronavirus enregistré dans les régions limitrophes du sud de la France.
Des appels clairs à la fermeture totale des frontières nationales se sont fait entendre par certains politiciens notamment de l’extrême droite.
Les experts et psychologues s’accordent sur le fait qu’on ne naît pas raciste mais on le devient.
Le cheminement d’une personne vers ce penchant est d’ordre individuel mais se nourrit d’un contexte général, d’un sentiment d’incertitude, de peur ou de menace.
Depuis la sortie du confinement le 11 Mai dernier, la vie a repris sans pour autant retrouver une quelconque “normalité” et la vie des français est désormais empreinte de morosité et d’incertitude par rapport à l’avenir.
Les craintes liées à la pandémie - qui n’a pas dit son dernier mot et qui menace les français d’un nouveau rebond - se conjugue avec une crise économique, voire une récession, sans précédent.
Le quotidien des français s’articule désormais autour des nouveaux chiffres économiques.
Tout comme la Covid-19 n’a fait aucune distinction entre ses victimes, touchant les différentes catégories sociales, les dégâts économiques causés par la pandémie ont concerné tous les secteurs d’activités.
Transports ferroviaires, transports aériens, hôtellerie et restauration, commerce, services, bâtiment, agricultures, rien que des activités sinistrées par l’arrêt brutal de l’économie nationale et mondiale.
Tout comme les emplois précaires et saisonniers ont disparu dans différents secteurs laissant sur le carreau des dizaines de milliers de personnes, les grands groupe tels que « LVMH » ou « Kering » exportateurs de produits de luxe dans le monde entier misent entre autre désormais sur les ventes via internet pour atténuer leurs pertes.
L’ensemble de la zone Euro a enregistré un recul du PIB de 12,1 % alors que ce recul a atteint en France 13,8 % selon l’institut national des statistiques et études économiques « INSEE ».
Une certitude se dessine: une crise d’une telle ampleur peut enfoncer la France dans un chômage de masse avec la conséquence redoutée de cet état de fait: l’accroissement des inégalités.
Les autorités françaises ont multiplié les plans d’aides dans les différents secteurs avec un double objectif : sauver les entreprises et l’emploi.
Un plan de relance de 100 milliards d’Euros a été adopté pour remettre l’économie sur les rails mais les plans sociaux se multiplient ainsi que les faillites d’entreprises et de petits commerces.
D’ailleurs le chef de l’Etat Emmanuel Macron a reconnu dans une déclaration récente que les licenciements et les plans sociaux allaient bondir en automne laissant transparaître que le pouvoir redoutait une rentrée chaude sur le plan social.
Quoi de plus fertile pour le regain du racisme et de la xénophobie que ce genre de terreau ?
Ce mal sournois qui oscille entre latence et expression flagrante est bien présent en France (comme partout ailleurs) sous ses différentes formes et expressions et pointe son nez dans certains milieux à situation extrêmement précaire.
Les chiffres dévoilés par la commission nationale consultative des droits de l’homme (ENCDH) pour l’année 2019, c’est-à-dire avant les ravages de la Covid-19 sont éloquents.
Ils indiquent que 18 % des français se disent racistes et que 49 % d’entre eux sont hostiles aux immigrés.
Parallèlement les crimes et délits à caractère raciste ont connu selon l’ENCDH une augmentation de l’ordre de 11% l’année précédente.
La lutte contre le racisme a beau faire l’objet d’un consensus, il n’en reste pas moins qu’il est bien enraciné dans le pays et que la France n’est pas à l’abri d’un vaste mouvement de protestation social dû au chômage et à l’accroissement de la précarité en même temps que des tensions sociétales dû à une flambée du racisme.
Arlette Khouri vit et travaille à Paris depuis 1989.
Pendant 27 ans, elle a été journaliste au bureau parisien d’Al-Hayat.
TWITTER : @khouriarlette
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.