C’est avec un soulagement évident, mais également avec lucidité, que la France a accueilli l’élection de Joe Biden à la présidence des États-Unis.
Dès l’annonce des résultats, le président français, Emmanuel Macron, a adressé un message de félicitations au président élu: «Nous avons beaucoup à faire pour relever les défis d’aujourd’hui. Agissons ensemble.»
Si les Européens en général sont en droit de se réjouir de la victoire de Biden contre l’actuel président Donald Trump, Macron en particulier ne peut que s’en féliciter.
Fini les coups d’éclat, les turbulences et les volte-face tonitruantes de Trump.
Les relations transatlantiques reprendront leur cours d’avant, l’Europe et la France retrouveront leurs positions d’alliées des États-Unis et non celles d’adversaires dans lesquelles les a retranchées le président sortant.
À partir du 20 janvier prochain, date de l’intronisation de Biden, les relations reprendront leur cours sain, et les désaccords, qui ont existé de tout temps entre Washington et ses alliés européens, seront traités selon les règles de la diplomatie et de la courtoisie.
Il est grand temps de tourner la page des provocations, de la politique des Tweet souvent insultants pour œuvrer tranquillement au règlement des conflits et des crises de ce monde auxquels sont venus se greffer la crise sanitaire et ses conséquences multiples.
Il suffit de revenir sur les péripéties qui ont marqué les relations franco-américaines sous la présidence de Trump pour constater qu’il était impensable, voire dangereux, que la même situation perdure pendant quatre autres années.
25 mai 2017: première rencontre entre Trump et Macron à l’ambassade américaine à Bruxelles.
Les médias du monde entier ont relayé la vigoureuse poignée de main entre les deux chefs d’État.
Il est grand temps de tourner la page des provocations, de la politique des Tweet souvent insultants pour œuvrer tranquillement au règlement des conflits et des crises de ce monde auxquels sont venus se greffer la crise sanitaire et ses conséquences multiples.
Macron a relevé le défi face à son homologue qui cherchait à affirmer sa supériorité par cette ferme poignée de mains.
La messe était dite: Macron a bien signifié à Trump fraîchement élu qu’ils sont alliés, éventuellement amis, mais qu’il ne baissera pas sa garde.
Il ne croyait pas si bien faire, Trump ne tarde pas à déclencher les hostilités en procédant au retrait des États-Unis de l’accord de Paris sur le climat.
La réponse de Paris ne se pas fait attendre: Macron fustige la décision de Washington comme étant une grave erreur et affirme que la France jouera désormais son rôle dans le monde de concert avec les pays européens, dont l’Allemagne.
Le président français va même jusqu’à détourner le fameux slogan de campagne de Trump «Make america great again» en assurant vouloir agir pour «Make our planet great again».
Malgré cet épisode, Macron, qui est connu pour privilégier le dialogue et non la confrontation, convie Trump et son épouse aux festivités du 14-juillet, la Fête nationale française.
Le couple présidentiel américain répond à l’invitation et tombe sous le charme des attentions amicales qui lui sont prodiguées côté français.
Trump fera par la suite l’éloge de son homologue français en le décrivant comme «une très bonne personne».
Tout va donc pour le mieux au niveau des relations franco-américaines? Répondre par l’affirmative reviendrait à occulter l’acharnement de Trump à vouloir déconstruire tout ce qui a été réalisé avant lui, sous prétexte de préserver les intérêts de son pays et de son peuple.
En effet, Trump ne tarde pas à s’attaquer à l’Accord sur le nucléaire iranien, fruit de plusieurs longues années de négociations entre l’Iran et la communauté internationale.
Macron a toujours insisté sur la nécessité du respect de toutes les parties envers leurs engagements dans le cadre de l’Accord, en appelant à le compléter à travers des négociations sur le volet balistique et les activités régionales iraniennes.
Encore une fois il privilégie le dialogue pour calmer les ardeurs de Trump, allant même jusqu’à faciliter une rencontre entre lui et le président iranien, Hassan Rohani, en marge du sommet du G20 organisé par la France à Biarritz.
Les États-Unis finissent par se désengager de l’Accord ignorant la position affichée par la France pour agir de concert, et par les voies diplomatiques, à l’amélioration de ses termes.
Les déceptions s’accumulent du côté français et renforcent la certitude que Trump fait fi du multilatéralisme et des relations transatlantiques.
Le président américain fera cavalier seul sur le «deal du siècle» et sur la décision de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël. Il se désengage, sans aucune négociation préalable, de ses alliés européens du théâtre d’opérations militaires au Moyen-Orient, et il ne se soucie nullement des écarts et des provocations de la Turquie, membre de l’Alliance atlantique à d’autres pays également membres de cette même organisation.
Les déceptions s’accumulent du côté français et renforcent la certitude que Trump fait fi du multilatéralisme et des relations transatlantiques.
Il soutient ouvertement la sortie du Royaume-Uni de l’Europe et affiche sa sympathie pour les dirigeants européens nationalistes.
Vue de Paris, la ligne de conduite de Trump est nuisible tant sur le plan diplomatique que militaire, elle vise à exacerber les tensions dans les rangs européens.
Loin de se contenter de la guerre économique qu’il a déclarée à la Chine, le président américain tente de mettre les Européens au pas par des mesures économiques hostiles.
Les menaces de sanctions pleuvent sur les produits européens. Elles visent les voitures, les produits laitiers, l’alcool…
L’Europe est figée, incapable d’organiser la riposte. Macron monte au créneau et affirme avoir l’intention de taxer les géants américains du numérique, ce qui lui vaut d’être qualifié de «stupide» par la Maison-Blanche.
Tout au long de ces quatre années de mandat, Trump a littéralement épuisé ses alliés européens.
Il était plus que temps pour eux de tourner la page et de revenir à la normalité des relations diplomatiques des deux côtés de l’Atlantique.
Dorénavant, les accords et, surtout, les désaccords seront de nouveau traités de manière classique.
Arlette Khoury vit et travaille à Paris depuis 1989.
Pendant vingt-sept ans, elle a été journaliste au bureau parisien d’Al-Hayat.
TWITTER : @khouriarlette
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.