PARIS : A mi-mandat, le président français Emmanuel Macron a décidé de s’attaquer à un dossier bien épineux : la lutte contre les séparatismes, qu’il va détailler au cours de ses futurs déplacements dans les régions françaises, dont le premier se fera dans la ville des Mureaux, à l’ouest de Paris.
Selon l’Elysée, ce déplacement est le fruit d’un travail « entamé il y a deux ans » et élaboré « en chambre et sur le terrain ». Pour ce qui est du travail en chambre il s’agit en fait d’une réflexion pilotée par Macron lui-même sur le thème « Quels sont les séparatismes qui menacent la République et fragilise notre société ? » et quelles réponses peuvent y être apportées ?
Ces réflexions ont nécessité une expertise juridique, étant donné qu’elles touchent « à des sujets extrêmement sensibles » dont la liberté, la liberté d’association et la laïcité. Pendant ce temps, un travail a été mené parallèlement sur le terrain et en deux ans il fonctionne déjà et donne des résultats.
Il est impératif d’agir pour empêcher que certaines parties du territoire national soit instrumentalisées pour construire une société parallèle.
Le ministère de l’Intérieur indique à ce propos que des associations religieuses ont été démantelées, que des mosquées illégales et des écoles dont le fonctionnement était incompatible avec les lois de la République ont été fermées. L’effort doit se poursuivre pour mettre fin à ce travail de noyautage mis en place par les mouvances radicales afin d’isoler un certain nombre de personnes du reste de la société française.
Il est impératif d’agir pour empêcher que certaines parties du territoire national soit instrumentalisées pour construire une société parallèle. C’est pour cela que l’Elysée considère qu’une lutte doit être menée contre tous ceux qui se servent de la religion pour remettre en cause les lois républicaines.
Approche défensive et offensive
Cette lutte suppose une double approche : une approche défensive qui consiste à défendre la République, et également une approche offensive qui consiste d’après l’Elysée à « amener la République à tenir ses promesses et à promouvoir ses valeurs dans les territoires et auprès des personnes qui subissent ces pressions séparatistes. »
Partant de ce diagnostic il faudra s’appuyer sur une loi en cours d’élaboration qui repose selon le ministère de l’Intérieur sur plusieurs axes.
- renforcer la neutralité dans l’ensemble du service public et ses dépendances pour freiner la monté du fait religieux.
- renforcer les procédures pour garantir la transparence des associations et clarifier leurs organigrammes et objectifs.
- exercer une surveillance accrue sur l’action éducative et renforcer les contrôles du contenu de l’enseignement dans les établissements hors contrat ainsi que pour la scolarisation à domicile.
- garantir la transparence des objectifs des lieux de cultes et de leur financement.
Pour ce qui est du calendrier, l’Elysée indique que le projet de loi sera finalisé à la mi-octobre et sera soumis par la suite aux représentants des cultes et autres acteurs concernés. Ces derniers ont déjà été mis au parfum de la loi en cours de préparation à travers différents contacts réalisés avec le ministre de l’Intérieur Gerald Darmanin et récemment le président de la République. L’étape suivante sera celle de la consolidation du projet de loi qui sera soumis au Conseil des ministres début décembre et sera débattu à l’Assemblée nationale en janvier prochain.
L’avenir de la société française en jeu
On peut dès à présent imaginer les débats houleux qui vont accompagner ces différentes étapes et les inévitables surenchères qui seront enclenchées par les extrêmes de droite, mais également de gauche. En attendant, il est utile de souligner que la nouveauté de cette approche réside dans son caractère global, qui consiste à priver le radicalisme islamisme de ses moyens de proliférer et à amener la République à assumer les responsabilités qui sont les siennes et qu’elle a abandonné dans des régions bien connues de tous.
C’est cette absence de la République qui a servi de faille et permis à l’islamisme de s’infiltrer et de s’enraciner sur les territoires. Il est donc logique que les pouvoirs publics colmatent ces failles et ramènent l’ensemble des régions françaises dans le giron de la République. Il est grand temps que ces régions cessent d’être des sortes de ghettos de pauvreté de chômage et de décrochage scolaire, en raison d’une négligence accumulée depuis des décennies et justifiée par un manque de moyens.
On peut dès à présent imaginer les débats houleux qui vont accompagner ces différentes étapes et les inévitables surenchères qui seront enclenchées par les extrêmes de droite, mais également de gauche.
Il est aussi grand temps que la République qui a toujours brandi le slogan de l’intégration s’investisse dans la réalisation de ce but et abolisse les innombrables obstacles qui obstruent ce chemin. L’égalité des chances et l’égalité de tous les enfants de la République dans leurs droits et leurs devoirs doit devenir une réalité et non rester un vœu pieux qui s’exprime uniquement à l’occasion de grands discours. La lutte contre l’islamisme, qui s’est encore manifesté il y a quelques jours à travers l’attentat perpétré prés des anciens locaux du journal satirique Charlie Hebdo, est une nécessité.
Cette lutte il faut finalement la réussir, car son issue est étroitement liée à l’avenir de la société française et du vivre ensemble, et son échec sera synonyme de fractures, d’affrontements et de durcissement de la haine et de l’extrémisme sous toute ses formes. Cette réussite est également une nécessité pour de nombreux musulmans de France qui naissent et grandissent dans la crainte de l’amalgame et de la stigmatisation dont ils sont souvent la cible pendant leur vie entière, des rangs de l’école au marché du travail.
Elle est une nécessité pour éviter que la France berceau des droits de l’homme ne bascule sous l’emprise d’une extrême droite qui se renforce et se conforte à chaque nouvel attentat islamiste commis sur le sol français, surtout en cette période de grandes difficultés économiques et sociales dues à la pandémie de Covid-19.
Reste à souhaiter bonne chance au président de la République afin qu’il réussisse là où tous ses prédécesseurs ont échoué, en espérant qu’il saura trouver le financement nécessaire à son projet, dont le coût global reste indéterminé.
Arlette Khoury vit et travaille à Paris depuis 1989.
Pendant 27 ans, elle a été journaliste au bureau parisien d’Al-Hayat.
TWITTER : @khouriarlette
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.