Depuis le 27 septembre dernier, le Haut Karabakh, enclave arménienne autonome, faisant jadis partie de la République d’Azerbaïdjan, a renoué avec la guerre.
Le cessez-le feu précaire, et jamais consolidé, instauré en 1994 par la Russie et soutenu par la communauté internationale, a volé en éclats.
Par négligence ou impuissance, le groupe dit « groupe de Minsk » coprésidé par les Etats-Unis, la France et la Russie, n’est pas parvenu en 26 ans à instaurer une solution définitive, l’Azerbaïdjan refusant jusqu’à ce jour de reconnaître l’autonomie du Haut Karabakh, petit territoire peuplé d’environ 150 000 habitants qui a fait sécession en 1991.
La riposte des Azéris fut une guerre qui a fait 30 000 morts environ, pour déboucher finalement sur une trêve négociée par la Russie et la création du « groupe de Minsk », chargé par l’OSCE (organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) de médiation dans ce conflit.
Au fil des années, les bases du conflit restent identiques, les Azéris ne renonçant pas à vouloir restaurer leur souveraineté sur le Haut-Karabakh soutenu par la République voisine d’Arménie.
Face au nouvel embrasement considéré comme le plus meurtrier depuis des années, le « groupe de Minsk » se retrouve à la case départ et réitère dans un communiqué publié par les ministres des Affaires étrangères des Etats-Unis, de la France et de la Russie sa volonté d’apaisement.
Les trois ministres ont qualifié les combats de « menace inacceptable pour la stabilité dans la région », appelé à un cessez-le feu et exhorté les parties à « reprendre le processus de règlement ».
Les coprésidents affichent donc une volonté commune pour faire cesser les hostilités et reprendre un processus censé mettre un terme à cet ancien conflit.
Par négligence ou impuissance, le groupe dit « groupe de Minsk » coprésidé par les Etats-Unis, la France et la Russie, n’est pas parvenu en 26 ans à instaurer une solution définitive, l’Azerbaïdjan refusant jusqu’à ce jour de reconnaître l’autonomie du Haut Karabakh.
Là aussi les paramètres sont identiques à ce qu’ils l’étaient auparavant sauf que la tâche aujourd’hui est plus compliquée, notamment en raison de l’implication de la Turquie.
Il ne suffit plus d’œuvrer pour réconcilier ce qu’un expert cité par le journal « Le Figaro » décrit comme « deux nationalismes non réconciliables », il faut également contenir une Turquie de plus en plus expansionniste et agressive.
Dans sa toute dernière déclaration, le président turc Recep Tayyip Erdogan a clairement jeté de l’huile sur le feu en exhortant l’Azerbaïdjan à continuer le combat jusqu’à la reprise du contrôle sur le Haut Karabakh, confortant la détermination des Azéris à poursuivre la guerre jusqu’au retrait total des Arméniens de l’enclave.
La Turquie se tiendra toujours aux côtés des Azéris, affirme-t-il, soulignant que « tant que la question du Karabakh n’est pas résolue, il ne sera pas mis fin au conflit ».
Une fois n’est pas coutume, de la Syrie à la Libye ainsi qu’en Méditerranée orientale, Erdogan multiplie les provocations pour assouvir sa mégalomanie, disent les uns, pour s’imposer comme leader des musulmans selon les autres.
Erdogan ne se contente pas de soutenir verbalement l’Azerbaïdjan, mais il lui fournit une assistance militaire avérée.
Plus grave encore, le president français Emmanuel Macron a affirmé en marge du dernier conseil européen réuni à Bruxelles que « selon nos propres renseignements, 300 combattants ont quitté la Syrie à travers Gaziantep (en Turquie) pour rejoindre Bakou (capitale de l’Azerbaïdjan). Ils viennent de groupes djihadistes présents dans la région d’Alep ».
Et d’ajouter que « d’autres contingents se préparent, à peu près de la même taille », ce qui signifie qu’une « ligne rouge est franchie » par la Turquie.
En effet par ses agissements que fustige de son côté la Russie, Erdogan met au défi l’OTAN, organisation dont son pays est membre, ainsi que l’Union européenne.
Une fois n’est pas coutume, de la Syrie à la Libye ainsi qu’en Méditerranée orientale, Erdogan multiplie les provocations pour assouvir sa mégalomanie, disent les uns, pour s’imposer comme leader des musulmans selon les autres.
Toujours est-il que dans un contexte international de plus en plus marqué par un net repli des Etats-Unis, le président turc ne rate pas une occasion qui lui permet d’élargir sa sphère d’influence et de s’ériger comme acteur dans les différentes crises.
Le président français a beau alerter l’Alliance atlantique et l’Europe sur les dangers de la politique turque et la nécessité de la sanctionner, il ne suscite pas une grande adhésion.
Durant sa tournée récente en Europe, le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo avait à cœur de mobiliser les Européens face à la montée en puissance de la Chine et de la Russie, sans faire grand cas de la menace que représente la Turquie.
Sur le plan européen et malgré les multiples mises en garde françaises le succès n’était pas non plus au rendez vous.
Face à la chancelière allemande Angela Merkel qui privilégie constamment la diplomatie à la sanction, la France a dû se contenter d’un compromis.
Le conseil européen a décidé de s’engager avec la Turquie dans des négociations sur le thème du bon voisinage.
Ces négociations doivent durer jusqu’au mois de décembre prochain. Si elles ne débouchent sur rien, des représailles seront alors envisagées.
L’Europe a raté une nouvelle occasion de montrer au monde une image homogène, solide et efficace et la politique étrangère commune tant convoitée par les pères fondateurs est plus que jamais un rêve évanescent.
Pourtant dans notre monde multipolaire marqué par des conflits de plus en plus multiples, une politique européenne commune constituerait indéniablement un socle de stabilité.
Arlette Khoury vit et travaille à Paris depuis 1989.
Pendant 27 ans, elle a été journaliste au bureau parisien d’Al-Hayat.
TWITTER : @khouriarlette
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.