Les récentes déclarations du ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, concernant le retour attendu des États-Unis dans l'accord nucléaire de 2015 sous la nouvelle administration Biden, sont le signe indéniable d’attentes grandissantes de la part de l'Iran concernant de futures négociations.
À entendre les déclarations de Mohammad Javad Zarif, qui a affirmé que l'Iran était prêt à ce que Washington revienne au Plan d'action global conjoint (JCPOA), on pourrait croire que c’est l’Iran qui dicte ses conditions aux États-Unis, mais des questions telles que le programme de missiles iranien restent non négociables.
Zarif ne tient pas compte des observations faites par le président Rohani, qui a pris note des récentes déclarations de Jake Sullivan, le nouveau conseiller à la sécurité nationale de Joe Biden. Ce dernier a assuré que la nouvelle administration américaine forcerait Téhéran à se conformer aux conditions de l'accord initial sur le nucléaire, et encadrerait l’Iran. Il s’est arrêté avant d’aborder la question du programme balistique de l’Iran ou celle des interventions hostiles de Téhéran dans les affaires souveraines des alliés régionaux des États-Unis, ce que Biden avait déjà mentionné auparavant.
Ce changement de ton dans les déclarations de l'administration Biden a poussé Rohani à se précipiter pour annoncer que l'Iran était prêt à se conformer à toutes les obligations nucléaires stipulées dans l'accord nucléaire, dans le but de courtiser la nouvelle administration. En revanche, Zarif comprend parfaitement que le programme de missiles de l’Iran est l’une des questions les plus controversées de l’accord nucléaire, et souhaite l’utiliser comme monnaie d'échange pour garantir le retour de Washington à l’accord.
À entendre les déclarations de Mohammad Javad Zarif, qui a affirmé que l'Iran était prêt à ce que Washington revienne au Plan d'action global conjoint (JCPOA), on pourrait croire que c’est l’Iran qui dicte ses conditions aux États-Unis.
Ces manœuvres diplomatiques laissent penser que le retour des États-Unis dans l’accord JCPOA semble inévitable, mais les véritables motivations des États-Unis ne restent pas claires à ce stade. Lorsque Barack Obama a conclu le JCPOA en 2015, la principale justification de cet accord intérimaire d’une durée de quinze ans était de donner au régime iranien l'occasion de changer son comportement afin de l'intégrer dans la communauté internationale, en en faisant un État comme un autre respectant le droit international et les normes régissant les relations entre les pays.
Si l’on raisonne logiquement, il est impossible de convenir d'un accord pour empêcher un pays de commettre des actes pervers qui menacent la sécurité et la paix mondiales pendant quinze ans, et lui permettant de mettre à exécution ses menaces au moment où l’accord expire. Dans les faits, il n’y avait pas de réformistes en Iran capables de persuader le régime d'être plus ouvert à l'Occident. En outre l’accord n’a pas été révisé par les membres du JCPOA en tenant compte des politiques belliqueuses du régime iranien envers la communauté internationale et les voisins régionaux de l’Iran.
L'objectif fondamental initial de l’accord oublié
Malgré cet espoir illusoire de paix et de normalisation né de l'accord sur le nucléaire, le régime iranien en a immédiatement profité pour soutenir ses proxys et ses alliés dans la région, renforçant son programme de missiles, achetant des armes, renforçant ses vastes appareils répressifs nationaux et intensifiant le despotisme intérieur – exactement comme les États régionaux l'avaient anticipé.
Lorsque Donald Trump est arrivé au pouvoir, il a annoncé que l'accord n'avait pas atteint ses objectifs. mais il n'a pas mentionné l'objectif principal: intégrer l’Iran dans la communauté internationale. Il s’est plutôt focalisé sur l’incapacité de l’accord à freiner les ambitions nucléaires du régime. C’est à partir de ce moment que la crise a commencé. L'objectif fondamental initial a été oublié et les moyens sont devenus la fin. Cinq ans plus tard, la question reste toujours en suspens: l'Iran est-il considéré comme un État normal et a-t-il été intégré à la communauté internationale?
Si l’on raisonne logiquement, il est impossible de convenir d'un accord pour empêcher un pays de commettre des actes pervers qui menacent la sécurité et la paix mondiales pendant quinze ans, puis lui permettent de mettre à exécution ses menaces au moment où l’accord expire.
Une fois que les États-Unis se sont retirés du JCPOA, les autres signataires ont considéré son retour comme vital afin de permettre la bonne continuité de l’accord. Cependant, ils sont restés indifférents aux inconvénients potentiels de l’accord. Le retour imminent de Washington à l’accord est devenu un objectif, les outils et les moyens pour y parvenir devraient être poursuivis.
L’Iran a trompé le monde en faisant oublier l’objectif principal de l’accord, faisant croire à la communauté internationale que la question principale était le respect du régime; en fait, il ne s’agissait pas là de la finalité de l’accord, mais des moyens.
L’Iran poursuit également cette confusion délibérée entre les moyens et les fins à un autre niveau, plus profond, que l’on comprend mieux si on remet en question les affirmations de l’Iran sur son propre objectif pacifique derrière «l’acceptation» de l’accord.
Le régime estime que sa stratégie de «défense avancée» offre les meilleures garanties pour sa survie et pour maintenir la base d’appui critique du régime. En d'autres termes, l'accord nucléaire dans son intégralité n'est, du point de vue de Téhéran, rien d'autre qu'un outil pour la survie du régime, qui consiste à détourner l’attention l’Occident sur l’accord nucléaire, qui peut être discuté, entravé et retardé, plutôt que sur la viabilité du régime. En raison de cette stratégie, le régime lui-même n'est plus soumis au même examen ou à l'hostilité de l’Occident, tellement l’attention est focalisée sur l’accord sur le nucléaire.
Pour mettre fin au plan absurde du régime visant à transformer les moyens en fin, nous devons insister pour nous concentrer sur l'objectif final initial de l'accord nucléaire, c'est-à-dire intégrer l'Iran dans la communauté internationale et en faire un État normal qui ne constitue pas une menace pour la sécurité. et la sécurité de la communauté internationale. Nous devons reléguer les différents moyens utilisés pour atteindre cette fin à leur juste place et éviter d'opter pour des moyens qui se sont avérés infructueux par le passé.
La nouvelle administration américaine devrait se souvenir des objectifs qui ont poussé Obama à signer l'accord et se demander si un retour à l'accord peut, de manière réaliste, être considéré comme un moyen efficace d'intégrer l'Iran dans la communauté internationale et de le transformer en un État comme les autres.
Le Dr Mohammed al-Sulami est à la tête de l'Institut international d'études iraniennes (Rasanah).
Twitter: @mohalsulami
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