Le régime iranien est persuadé que la prochaine administration américaine compte réintégrer l'accord nucléaire. Le président iranien Hassan Rohani a d’ailleurs récemment annoncé qu’il n’entretient «le moindre doute» sur un retour imminent à la normale quand le président américain élu Joe Biden accède à la Maison Blanche.
Rohani prévoit aussi une suspension immédiate des sanctions économiques. Les États-Unis se sont retirés de l'accord nucléaire de sept parties en 2018.
Parallèlement, des images satellites récemment publiées indiquent que les Iraniens construisent de nouvelles installations à proximité du site nucléaire souterrain fortifié de Fordow. Le régime n'a fait aucune déclaration publique au sujet des travaux, quoi qu’il concède l’existence de structures de défense similaires dans les installations nucléaires de Natanz.
Il existe également des preuves de travaux en cours sur d'autres sites moins importants qui n’auraient même pas été déclarés aux inspecteurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).
En octobre, la principale coalition de groupes d’opposition iraniens, connue sous le nom de Conseil national de la résistance iranienne (CNRI), a annoncé la découverte d’un site militaire contrôlé par l’Organisation de l’innovation et de la recherche défensive, la principale agence d’armement au sein du programme nucléaire iranien.
La nouvelle administration américaine devrait se souvenir avec attention de ces actes et reconnaître leur importance.
Biden adoptera une politique sans doute plus douce que celle de son prédécesseur, le président Donald Trump, mais la transition présidentielle n'a pas besoin de conduire les États-Unis à passer d'une «pression maximale» à une stratégie de conciliation. Une approche douce encouragerait à coup sûr le régime.
L'accord nucléaire n'est pas la seule maille à partir avec l'Occident. Il existe une autre affaire de crime contre l'humanité, vieille de 32 ans pour laquelle aucun responsable iranien n'a jamais été tenu pour responsable. En 1988, trente mille prisonniers politiques ont été exécutés d’une façon brutale sur une période de trois mois environ.
Le massacre a été mis en évidence quelques jours à peine avant la publication de nouvelles images de Fordow, lorsqu'une lettre a été rendue publique par un groupe d'experts des droits de l'homme de l'ONU. Dans leur rapport, ils exigent des informations du régime iranien, tout en admettant l'incapacité troublante des organismes internationaux à enquêter sur ce crime.
Ces meurtres n’ont fait l’objet d’aucune enquête de la part de l’Assemblée générale des Nations Unies, du Conseil de sécurité ou même de la Commission des droits de l’homme.
Les experts affirment que «l'incapacité de ces organes à agir a eu un impact dévastateur sur les survivants et leurs familles, ainsi que sur la situation globale des droits de l'homme en Iran. Ce laxisme a encouragé l'Iran à continuer à dissimuler le sort des victimes et de maintenir une stratégie de déviation et de déni qui perdure à ce jour.
Certains des principaux auteurs du massacre occupent encore des positions d’influence extraordinaire au sein des systèmes politiques et économiques iraniens, parmi eux figure l’actuel chef du pouvoir judiciaire et le ministre de la Justice.
Il n'est donc pas surprenant que les preuves indiquent une répression croissante de la dissidence en République islamique, en particulier face aux troubles populaires qui ont déterminé ces dernières années.
Des dizaines de manifestants pacifiques ont été massacrés au début de 2018, lorsque le pays s'est retrouvé au milieu d'un soulèvement national. Mais le nombre de morts a été éclipsé en novembre de l'année dernière, lorsque le Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) a ouvert le feu sur des foules de citoyens qui participaient à un plus grand soulèvement.
Au moins 1 500 personnes ont été tuées, ce qui confirme que les autorités restent attachées aux stratégies qui étaient monnaies courantes dans les années 1980.
Cette observation est celle que Biden et les autres décideurs politiques devraient prendre à cœur alors qu’ils établissent une voie pour des réponses occidentales collectives au comportement envahissant de l’Iran.
Les politiques américaines et européennes peuvent protéger le peuple iranien contre davantage de répression à l’encontre de ses droits fondamentaux. En même temps, des politiques mieux définies sont nécessaires pour faire pression sur le régime de manière à abandonner les activités qui pourraient lui faciliter l’acquisition d’une arme nucléaire.
Vient ensuite l’inquiétude concernant le rôle de l’Iran en tant que premier État commanditaire du terrorisme au monde. Cette menace, immédiate, est plus proche de nous puisque ses mandataires peuvent frapper pratiquement partout dans le monde, et à tout moment.
Les craintes liées au terrorisme iranien ont été confirmées en 2018, lorsque plusieurs complots terroristes soutenus par Téhéran ont été déjoués. Dans l’un des cas, des explosifs ont été déclenchés à l'extérieur de Paris lors d'un rassemblement organisé par le CNRI, et qui comptait des dizaines de milliers d'Iraniens.
Maryam Radjavi, présidente élue du CNRI, était la principale intervenante de l’événement dans la capitale française, rejoignant un nombre impressionnant de centaines de personnalités et de députés des parlements du monde. Ensemble, ils ont réclamé un changement démocratique en Iran. Quatre accusés, dont un haut diplomate iranien, sont actuellement jugés en Belgique, dans une affaire qui risque de changer la donne dans la politique occidentale.
Les 40 dernières années indiquent clairement que le comportement iranien ne fera qu’empirer. Le verdict est sans appel: une pression soutenue sur Téhéran est nécessaire, mais trop souvent sous-estimée.
Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain formé à Harvard. Il est un expert de premier plan de la politique étrangère de l'Iran et des États-Unis, un homme d'affaires et président du Conseil international américain. Il siège aux conseils d'administration de la Harvard International Review, du Conseil des relations internationales de Harvard et la Chambre de commerce États-Unis-Moyen-Orient pour le commerce et les affaires.
Twitter: @Dr_Rafizadeh
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Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com