Les véritables intentions du régime iranien

Le président iranien, Hassan Rouhani, et le directeur de l’OEAI, Ali Akbar Salehi, à la centrale nucléaire de Bouchehr. (Wikimedia Commons)
Le président iranien, Hassan Rouhani, et le directeur de l’OEAI, Ali Akbar Salehi, à la centrale nucléaire de Bouchehr. (Wikimedia Commons)
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Publié le Mardi 10 mai 2022

Les véritables intentions du régime iranien

Les véritables intentions du régime iranien
  • Le CNRI a dévoilé les activités nucléaires de l’Iran à plusieurs reprises, ce qui a rendu extrêmement difficile pour l’establishment théocratique de dissimuler ses activités secrètes
  • On soupçonne que le régime iranien réalise la dimension militaire de son programme nucléaire sur le site militaire de Partchine

Depuis des décennies, certains universitaires, analystes et politiciens se demandent si le programme nucléaire du régime iranien est conçu à des fins pacifiques ou pour fabriquer des armes nucléaires. En examinant attentivement les preuves, il devient évident que la fabrication d’armes nucléaires a toujours fait partie du programme nucléaire de Téhéran.
Si l’on met de côté les activités clandestines du régime au cours des trois dernières décennies, certains dirigeants iraniens ont révélé de manière plutôt surprenante des secrets sur les activités nucléaires de Téhéran. Par exemple, le 29 novembre 2021, l’ancien directeur de l’Organisation de l’énergie atomique d’Iran (OEAI), Fereydoun Abbassi-Davani, était le premier responsable iranien à admettre qu’il faisait partie d’un programme destiné à fabriquer des armes nucléaires: «Lorsque la croissance globale du pays a commencé à impliquer des satellites, des missiles et des armes nucléaires, et a dépassé de nouvelles limites de connaissances, la question est devenue plus sérieuse pour eux.»
Le deuxième responsable iranien à admettre que le programme nucléaire iranien a toujours revêtu une dimension militaire est l’ancien Premier ministre iranien Ali Motahari. Il a déclaré le 20 avril 2022, lors d’un entretien avec Iscanews à Téhéran, que l’Iran était intéressé par l’obtention d’armes nucléaires depuis le début. Il a fait remarquer qu’un pays qui prévoit d’avoir un programme nucléaire à des fins pacifiques ne commence jamais par l’enrichissement de l’uranium, mais crée d’abord des réacteurs. En d’autres termes, commencer par l’enrichissement de l’uranium est une erreur si un pays veut secrètement fabriquer des armes nucléaires: «L’enrichissement de l’uranium directement crée l’illusion que nous voulons fabriquer une bombe», a-t-il lancé, avant de poursuivre: «Dès le début, lorsque nous avons entamé l’activité nucléaire, notre objectif était de fabriquer une bombe et de renforcer les forces de dissuasion, mais nous n’avons pas pu maintenir le secret sur cette question, et les rapports secrets ont été révélés par un groupe d’hypocrites.»
«Hypocrites» est un mot souvent utilisé au pluriel par le régime iranien pour désigner le groupe d’opposition, le Conseil national de la résistance iranienne (CNRI). Ce groupe a dévoilé les activités nucléaires de l’Iran à plusieurs reprises, ce qui a rendu extrêmement difficile pour l’establishment théocratique de dissimuler ses activités secrètes.
L’organisation a révélé pour la première fois les activités nucléaires clandestines de l’Iran sur deux sites majeurs, Natanz et Arak, en 2000. En raison des relations du CNRI en Iran, les informations qu’il fournit sont considérées très crédibles. Frank Pabian, conseiller en matière de non-prolifération nucléaire au Laboratoire national de Los Alamos, a indiqué au New York Times que le CNRI avait «raison dans 90% des cas».
En outre, en 2017, des informations essentielles supplémentaires sur les activités nucléaires de l’Iran ont été divulguées par le CNRI. L’ex-président américain Donald Trump a enchaîné en affirmant que Téhéran «ne respectait pas l’esprit de l’accord». Michael Anton, ancien porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, avait assuré à l’époque que ses collègues «évaluaient soigneusement» les informations du CNRI. Le rapport du CNRI indiquait: «Des informations fiables (...) montrent que le “centre nerveux” du projet d’armes nucléaires du régime iranien, responsable de la conception de la bombe, poursuit ses travaux. À la suite de (...) la conclusion de l’accord sur le nucléaire en 2015, non seulement l’unité est restée en place et ses activités n’ont pas diminué, mais il est maintenant clair que dans certains domaines, ses activités se sont même étendues.»
On soupçonne que le régime iranien réalise la dimension militaire de son programme nucléaire sur le site militaire de Partchine. Téhéran n’a pas autorisé l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) à inspecter ou à contrôler un grand nombre de ses sites nucléaires.
Téhéran déguise leur véritable nature en qualifiant certains d’entre eux de sites militaires ou de centres de recherche conventionnels. Lors des négociations nucléaires de 2015, l’Iran était déterminé à ce que Partchine échappe à l’inspection de l’AIEA.

Il incombe à la communauté internationale d’empêcher le régime de parvenir à fabriquer des armes nucléaires.

Dr Majid Rafizadeh

Pour soutenir leur affirmation selon laquelle le programme nucléaire iranien est conçu à des fins pacifiques, les dirigeants iraniens se réfèrent à une fatwa émise par Ali Khamenei interdisant la fabrication d’armes nucléaires. Toutefois, cette déclaration religieuse de Khamenei est très probablement un moyen de dissimulation.
Comme l’a dit l’ancien directeur général de l’AIEA Mohammed el-Baradei: «Plusieurs personnes, dont le président égyptien Moubarak, m’ont expliqué que, selon la théologie chiite, il est parfois acceptable de tromper pour la bonne cause. Ce concept est appelé taqqiya (dissimulation), ce qui signifie se protéger soi-même ou protéger les personnes dont nous sommes responsables. J’ai clairement fait comprendre à notre homologue iranien que, quelles que soient les origines de ce comportement, ses refus et ses dissimulations permanentes avaient profondément nui à sa crédibilité auprès de la communauté internationale. Dès le départ, les Iraniens avaient creusé un trou qui allait miner leurs propres efforts diplomatiques, ce que j’ai appelé un déficit de confiance.»
En bref, il devrait désormais être clair que le programme nucléaire de l’Iran a une dimension militaire. Il incombe à la communauté internationale d’empêcher le régime de parvenir à fabriquer des armes nucléaires.

Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain diplômé de Harvard. Twitter: @Dr_Rafizadeh
 
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com