De plus grands efforts pour mettre fin à la crise de confiance entre l'Arabie saoudite et l'Iran

Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Faisal ben Farhane, (à gauche) serrant la main de son homologue iranien, Hossein Amir-Abdollahian. (AFP)
Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Faisal ben Farhane, (à gauche) serrant la main de son homologue iranien, Hossein Amir-Abdollahian. (AFP)
Short Url
Publié le Mercredi 21 juin 2023

De plus grands efforts pour mettre fin à la crise de confiance entre l'Arabie saoudite et l'Iran

De plus grands efforts pour mettre fin à la crise de confiance entre l'Arabie saoudite et l'Iran
  • On a récemment observé certains contenus médiatiques iraniens négatifs sur l'Arabie saoudite, ce qui constitue une violation des principes de non-ingérence dans les affaires intérieures
  • L'Arabie saoudite prend des mesures de renforcement de la confiance, à commencer par les procédures officialisant la reprise des relations diplomatiques, comme l'invitation du roi Salmane au président iranien à se rendre dans le Royaume

Ces derniers jours, les médias iraniens ont rapporté que l'Iran avait invité l'Arabie saoudite à se joindre à une alliance navale commune en cours de préparation. Outre l'Iran, l'alliance comprendra des États du Golfe comme l'Arabie saoudite et aura pour vocation de protéger la sécurité maritime des pays du Moyen-Orient et de définir des garanties pour la sécurité de la navigation internationale grâce à de nouveaux accords de sécurité.

Ceux-ci devraient probablement et principalement reposer sur les armées des États membres de l'alliance prévue plutôt que sur des alliances militaires extrarégionales stationnées dans la sphère de sécurité de la région. L'Iran a réitéré ses efforts pour forger une alliance maritime trilatérale, en partenariat avec la Russie et la Chine. Cette invitation faite au Royaume intervient dans le contexte de la poursuite par ces deux importants pays de la région du rétablissement de leurs relations diplomatiques, dans le cadre d'un accord de rapprochement signé à Pékin.

Il est naturel que les puissances régionales exerçant une influence sur les questions régionales et désireuses de protéger la sécurité et la stabilité de la région croient en l'efficacité des efforts collectifs pour protéger la sphère de sécurité du Moyen-Orient. Cela se poursuivra sans interruption tant que les pays appelant à de tels efforts respecteront les principes de souveraineté nationale, d'unité, d'intégrité territoriale et de bon voisinage. D’autres principes s’ajoutent, comme celui de la non-ingérence dans les affaires intérieures des États souverains ou encore le règlement de différends qui n'ont pas été résolus depuis des décennies, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU et aux accords de règlement signés.

En outre, les pays membres de l'alliance prévue devraient renoncer aux projets préjudiciables qui suscitent des inquiétudes et des doutes quant aux intentions existant derrière leur contribution, dans les efforts de sécurité collective. Lorsque les conditions seront réunies, des accords de sécurité régionale pourraient être adoptés par les pays de la région.

Les pays membres de l'alliance prévue devraient renoncer aux projets préjudiciables qui suscitent doutes et inquiétudes

Dr Mohammed Al-Sulami

La mise en œuvre de cette équation et des nouveaux arrangements sécuritaires sur le terrain est entravée par les conséquences de la crise de confiance qui dure depuis des décennies entre plusieurs pays de cette alliance prévue. Cette crise a été créée par des situations et des comportements qui ont miné la paix et la sécurité régionales. Cela a ensuite attisé des conflits et exacerbé les tensions au Moyen-Orient, créant ainsi davantage de divisions et épuisant certains États-nations, conduisant l'Arabie saoudite et l'Iran – deux poids lourds régionaux exerçant une influence massive sur les questions régionales – à être très éloignés et à compliquer davantage la crise entre eux. Cependant, cette crise a commencé à s'atténuer, les deux pays ayant choisi de privilégier des mesures de renforcement de la confiance depuis la signature de l'accord de rapprochement en vertu duquel ils ont rétabli leurs relations diplomatiques.

L'Iran est conscient des conséquences d'une violation des termes de l'accord signé avec l'Arabie saoudite sous le parrainage de la Chine. Le Guide suprême iranien a ordonné à la radio-télévision du pays de cesser toute couverture négative, commentaires désobligeants et critiques à l'encontre du Royaume. Quoi qu’il en soit, après cet accord, on a observé certains contenus médiatiques iraniens négatifs sur l'Arabie saoudite, constituant une violation des principes de non-ingérence dans les affaires intérieures des pays et de respect de leur souveraineté. 

Les médias iraniens ont rapidement supprimé ce contenu après avoir réalisé à quel point cela pourrait potentiellement avoir un impact sur les mesures prises en l’état actuel des choses. Ces dernières semaines, on a remarqué que les médias iraniens étaient revenus à leur ancien discours, accumulant critiques et insultes contre le Royaume dans les agences de presse et les journaux liés au régime iranien, comme les agences de presse Tasnim, Fars et Mehr.

La reprise des critiques à l'encontre de l'Arabie saoudite nuit aux mesures de restauration de la confiance

Dr Mohammed al-Sulami

En fait, la reprise des critiques à l'encontre de l'Arabie saoudite nuit aux mesures de restauration de la confiance, ainsi qu'à la dissipation des appréhensions du Royaume quant aux intentions de l'Iran et à l'orientation de ses relations extérieures. Un tel discours aura un impact sur la volonté du Royaume de forger de nouveaux partenariats et de s'engager dans une future coopération avec l'Iran dans les différents domaines de la sécurité et du commerce.

L'Arabie saoudite va de l'avant avec les mesures de renforcement de la confiance, à commencer par les procédures officialisant la reprise des relations diplomatiques, comme l'invitation du roi Salmane au président iranien, Ebrahim Raïssi, à visiter le Royaume et la visite du ministre saoudien des Affaires étrangères dans la capitale iranienne, qui sera suivie de la réouverture des ambassades  – une étape qui devrait avoir lieu dans les prochains jours. Toutes ces mesures sont prises dans le souci du Royaume de renforcer les relations et de regarder vers l’avenir avec de grandes perspectives, d'une manière qui profite mutuellement aux deux pays.

En conclusion, la poursuite de l'ingérence dans les affaires intérieures d'autres pays – interdite non seulement par l'accord signé à Pékin mais aussi par toutes les résolutions de l'ONU – va à l'encontre des dispositions de l'accord et des nouvelles directives récemment définies par le Guide suprême iranien pour la politique étrangère iranienne. Cela vient s'ajouter à la réaffirmation par l'ancien ministre des Affaires étrangères, Javad Zarif, dans un post sur Twitter, selon lequel il n’y a pas de jeu à somme nulle en politique étrangère, ce qui signifie que toutes les parties peuvent réaliser des gains et préserver leurs intérêts, plutôt que les intérêts d'une seule partie. Des opportunités majeures et des intérêts communs nécessitant davantage d’étapes pour être construits et maintenus sont à portée de main des deux pays plutôt que de diminuer et tromper la confiance.

Le Dr Mohammed al-Sulami est président de l'Institut international d'études iraniennes (Rasanah).

Twitter: @mohalsulami

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est celle de l’auteur et ne reflète pas nécessairement le point de vue d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com