Comment les réfractaires à la Coupe du monde ont quitté le ballon des yeux

L'Argentine de Lionel Messi a remporté dimanche la première Coupe du monde de la FIFA au Moyen-Orient (Photo, Reuters).
L'Argentine de Lionel Messi a remporté dimanche la première Coupe du monde de la FIFA au Moyen-Orient (Photo, Reuters).
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Publié le Mardi 20 décembre 2022

Comment les réfractaires à la Coupe du monde ont quitté le ballon des yeux

Comment les réfractaires à la Coupe du monde ont quitté le ballon des yeux
  • Bien qu’il s’agisse de l'une des Coupes du monde les mieux planifiées, les plus sûres et les plus réussies, la plupart de la publicité sur le Qatar était négative
  • En tant que pays le plus riche du monde en termes de PIB par habitant, le Qatar n'a pas besoin de faire de la récupération sportive

Le rideau se baisse sur Qatar 2022, l'une des Coupes du monde les plus spectaculaires de l'histoire du football, tant sur le terrain qu'en dehors !

Pour ce qui est du football en soi, le suspense, les surprises et les formidables performances de la plupart des équipes ont été si passionnants que même les non-initiés à ce sport (comme moi) ont été captivés.

En effet, de la victoire historique de l'Arabie saoudite sur l'Argentine (qui fait des Faucons verts la seule équipe à avoir battu les nouveaux champions du monde) à l'ascension épique du Maroc en demi-finale, en passant par la victoire du Japon sur l'Allemagne, le mois qui vient de s'écouler a été particulièrement riche en rebondissements.

Les plus sceptiques n'attribuent aucun mérite au Qatar, le pays hôte. Ils affirment – sans doute à raison – que tous les résultats obtenus sur le terrain sont dus uniquement aux efforts des footballeurs eux-mêmes, de leurs entraîneurs, et même à la technologie VAR qui a permis d'annuler ou de valider de nombreuses décisions cruciales en matière de buts et de penalties.

En dehors du terrain, le Qatar en a eu pour son argent (220 milliards de dollars selon les estimations) en matière de publicité. Malheureusement, bien qu’il s’agisse de l'une des Coupes du monde les mieux planifiées, les plus sûres et les plus réussies, la plupart de cette publicité était négative.

Certes, le Qatar est conscient de ses lacunes en matière de droits de l'homme, de son rôle dans l'accueil de terroristes recherchés par les Nations unies et les États-Unis, et des tentatives flagrantes de son précédent gouvernement de s'immiscer dans les affaires de ses voisins. Aucun tournoi sportif ne peut effacer tout cela. Cependant, la seule façon d'en finir avec de tels problèmes reste finalement de les résoudre; et nous avons vu un agréable vent de changement souffler sur le Golfe depuis l'accord d'AlUla conclu entre le Qatar, ses voisins du Conseil de coopération du Golfe et l'Égypte en janvier 2021.

Néanmoins, je soutiens ici que les accusations de «sportwashing» lancées à plusieurs reprises contre le Qatar dans les médias occidentaux, en particulier les publications britanniques, sont à la fois irréfléchies et hypocrites.

Premièrement, si le Qatar a effectivement dépensé tout cet argent pour améliorer son image, quel incroyable gaspillage. Comme l'a déclaré Simon Anholt, fondateur du Nation Brands Index, dans une interview accordée à Arab News en novembre dernier, les grands événements tels que les tournois sportifs ne contribuent en rien à améliorer l'image de marque d'un pays. «Il est prouvé que l'organisation ou l'accueil d'un grand événement sportif, comme la Coupe du monde de football ou les Jeux olympiques d'été, n'a aucun impact, de manière générale, sur l'image du pays, du moins pas au-delà de quelques mois», a-t-il déclaré. «Au bout de six mois environ, les gens l'auront oublié.»

Les accusations de «sportwashing» lancées à plusieurs reprises contre le Qatar dans les médias occidentaux, en particulier les publications britanniques, sont à la fois irréfléchies et hypocrites.

Faisal J. Abbas

Deuxièmement, en tant que pays le plus riche du monde en termes de PIB par habitant, le Qatar n'a pas besoin de faire de la récupération sportive. Je doute que quiconque à Doha s'inquiète de la façon dont il est perçu à Londres, par exemple, alors qu'il possède déjà des pans entiers de la ville, ou de la perte du tourisme alors qu'il n'a pas besoin de ces revenus et qu'il n'a de toute façon pas assez de chambres d'hôtel pour une industrie touristique viable.

Soyons clairs: il ne s'agit pas tant de défendre le Qatar que de s'en prendre à l'hypocrisie et au deux poids deux mesures ahurissants de certains de ses détracteurs au Royaume-Uni. Ces derniers se sont tus lorsque la Coupe du monde 2018 s'est déroulée en Russie, malgré l'annexion de la Crimée et l'invasion de l'est de l'Ukraine. On ne comprend pas pourquoi une Coupe du monde au Qatar dérangerait davantage les défenseurs britanniques des droits de l'homme que le fait que le petit État du Golfe possède les joyaux de la couronne de leur propre capitale.

Le journal britannique The Observer a rapporté au cours du mois que l'État du Qatar était le dixième plus grand propriétaire foncier du Royaume-Uni, avec près de 2,1 millions de mètres carrés de propriétés. Parmi les biens du portefeuille de la Qatar Investment Authority figurent Harrods, le grand magasin de luxe de Knightsbridge; le Shard, le plus haut bâtiment de Grande-Bretagne, construit avec près de 2 milliards de livres sterling d'investissements qataris; le Forbes House; les casernes de Chelsea; et les hôtels Savoy et Grosvenor House. Elle est également copropriétaire du quartier d'affaires de Canary Wharf et détient une participation de 20 % dans l'aéroport d'Heathrow, sans compter les avoirs personnels des membres de la famille royale qatarie.

Il est certain que les activistes britanniques pourraient plus facilement faire pression sur leur gouvernement pour bloquer de tels investissements que d'essayer d'empêcher un État souverain d'accueillir un tournoi de football.

Je n'entends pas par-là demander aux médias britanniques de cesser de parler des droits de l'homme au Qatar, mais, le cas échéant de se concentrer plutôt sur les questions qui comptent vraiment et de laisser les autres profiter du football!

 

Faisal J. Abbas est rédacteur en chef d'Arab News.

Twitter: @FaisalJAbbas

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com