Netanyahu a choisi la CPI plutôt que le CCG, et risque d'obtenir ce qu'il souhaitait

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Publié le Jeudi 14 novembre 2024

Netanyahu a choisi la CPI plutôt que le CCG, et risque d'obtenir ce qu'il souhaitait

Netanyahu a choisi la CPI plutôt que le CCG, et risque d'obtenir ce qu'il souhaitait
  • L'Arabie saoudite a de nouveau adopté une position publique et intransigeante contre l'agression israélienne lors du sommet arabo-islamique de cette semaine
  • Le prince héritier Mohammed bin Salman n'a pas mâché ses mots face à l'escalade de la violence à Gaza, au Liban et en Syrie


Alors que le président élu Donald Trump s'apprête à entrer à la Maison Blanche, les moments cruciaux de ces dernières semaines montrent clairement que le climat de la politique étrangère américaine et israélienne sera très différent en janvier prochain.

Israël serait bien avisé de comprendre qu'il ne peut pas continuer à ignorer l'appel mondial en faveur de la justice et de la paix. Sous l'impulsion de l'Arabie saoudite, la région fait preuve d'une unité et d'une assurance sans précédent depuis des années et exerce une influence dans le monde entier.

Les déclarations des dirigeants saoudiens et les résultats des sommets internationaux indiquent que l'ère des actions israéliennes incontrôlées touche à sa fin. Le Premier ministre Benjamin Netanyahu ferait bien d'y prêter attention : l'environnement géopolitique n'est plus un environnement qu'il peut contrôler par des manœuvres politiques ou par la bonne volonté des États-Unis ou d'autres alliés sympathisants.

Lors du sommet de la Future Investment Initiative qui s'est tenu le mois dernier à Riyad, le ministre saoudien des affaires étrangères, le prince Faisal bin Farhan, a fait une déclaration forte et sans ambiguïté. Interrogé sur la possibilité d'un accord de normalisation entre l'Arabie saoudite et Israël, il a déclaré à Becky Anderson de CNN qu'un tel accord était "hors de question". Il s'agit d'un message qu'Israël devrait interpréter comme une ligne rouge, et non comme une tactique de négociation. La région n'est pas disposée à accepter une nouvelle série d'accords d'Abraham qui ne tiennent pas compte de la création d'un État palestinien.

Qu'Israël se soucie encore de normaliser ses liens avec l'Arabie saoudite et le reste du monde musulman n'a aucune importance. Ses dirigeants devraient comprendre qu'avec autant de sang sur les mains, personne ne voudra les secouer : en fait, l'humeur actuelle est à la punition d'Israël pour ses violations et à sa responsabilisation en vertu du droit international.

L'Arabie saoudite a de nouveau adopté une position publique et intransigeante contre l'agression israélienne lors du sommet arabo-islamique de cette semaine. Le prince héritier Mohammed bin Salman n'a pas mâché ses mots face à l'escalade de la violence à Gaza, au Liban et en Syrie. Qualifiant les actions d'Israël de génocide, le prince héritier a appelé la communauté internationale à reconnaître les ravages causés au peuple palestinien. Sa condamnation a fait l'objet d'un soutien unanime dans le communiqué final du sommet, qui a renforcé les efforts de l'Arabie saoudite en faveur d'une position unifiée sur la question palestinienne et d'un engagement en faveur de la solution des deux États, qui, étant déjà acceptée par les Nations unies, ne nécessite pas légalement l'approbation d'Israël.

Pendant des décennies, le concept de la solution à deux États a été le consensus mondial pour la paix entre Israël et la Palestine. Mais chaque année, les politiques expansionnistes d'Israël et les souffrances persistantes à Gaza érodent cette possibilité, laissant la région au bord d'un conflit perpétuel. Le leadership de l'Arabie saoudite offre toutefois une voie à suivre, non seulement pour les Palestiniens, mais aussi pour la stabilité régionale. Les récentes mesures prises par le Royaume reflètent un effort pour construire une coalition de nations qui s'engagent à trouver des solutions réelles, et pas seulement des mots. De Riyad à Rabat, du Caire à Jakarta, les nations à majorité musulmane s'unissent pour insister sur l'autodétermination des Palestiniens et la fin de la violence qui sévit dans la région depuis des générations.

Pour Netanyahou, la situation ne pourrait être plus claire. Sa stratégie de longue date, qui consiste à faire appel aux alliés occidentaux tout en ignorant le monde arabe et musulman, est aujourd'hui mise à rude épreuve. Il peut compter sur le soutien d'une administration bienveillante à Washington, mais il y a des limites à ce qu'elle peut lui apporter. L'époque où les États-Unis pouvaient opposer un veto inconditionnel à toute action internationale contre Israël est révolue. Un nouveau gouvernement américain entrera en fonction avec un monde arabe et islamique uni, ainsi qu'une grande partie de la communauté internationale, tous poussant à la responsabilisation et à une solution concrète à deux États.

Il suffit d'examiner le paysage juridique pour comprendre la pression qui s'exerce désormais sur Israël. Les poursuites judiciaires pour ses actions à Gaza ont déjà été portées devant les tribunaux internationaux, y compris la Cour pénale internationale, avec des allégations de crimes de guerre et de génocide. M. Netanyahu et son gouvernement pourraient croire qu'ils sont à l'abri de telles répercussions juridiques ou que le droit international peut être contourné par des alliés puissants. Cependant, comme l'a montré l'Arabie saoudite, le vent tourne. L'ère de l'impunité est remise en question et la coalition mondiale qui se forme autour de la Palestine n'est pas une coalition qu'Israël peut simplement balayer du revers de la main.

La réalité indéniable de Gaza est au cœur de ce changement. Les horreurs qui s'y sont déroulées ne peuvent être considérées comme des dommages collatéraux ou de la "légitime défense". Il s'agit, selon de nombreux témoignages et définitions, d'un génocide, de la destruction systématique d'un peuple. Les images d'enfants souffrant, de familles déchirées et de quartiers entiers réduits à l'état de ruines ont mobilisé les populations du monde entier. Le monde, y compris les voisins d'Israël, dit "assez". La position de l'Arabie saoudite n'est pas isolée : elle s'inscrit dans le cadre d'une demande croissante de responsabilité. Israël ne peut espérer maintenir sa trajectoire actuelle sans en subir les conséquences.

Il convient de noter que le gouvernement de M. Netanyahou avait la possibilité de forger des alliances historiques au Moyen-Orient : un avenir dans lequel Israël coexisterait pacifiquement avec les États du CCG et l'ensemble du monde arabe et musulman était à portée de main. Au lieu de cela, en poursuivant sur la voie de la violence et du non-respect des droits de l'homme, Israël s'est aliéné des alliés potentiels et s'est placé sous la surveillance d'organismes internationaux. Le choix de la paix ou de l'isolement reste entre les mains de Netanyahou, mais le moment de choisir s'éloigne rapidement.

Pour Israël, les choses sont écrites sur le mur. L'Arabie saoudite, avec son influence en tant que puissance régionale et chef religieux, indique clairement que la voie de la paix passe par le respect des droits des Palestiniens et la poursuite d'une véritable solution à deux États. Israël doit abandonner son approche actuelle et se rendre compte qu'il ne peut plus compter sur la "chance". Alors qu'une coalition mondiale se forme, Israël a deux options : il peut soit rejoindre le chemin de la paix, soit se retrouver de plus en plus isolé sur la scène mondiale.

L'avenir d'Israël dépend désormais de sa volonté de s'engager sur la voie d'une paix véritable et durable. Le monde arabe, emmené par l'Arabie saoudite, est prêt à soutenir cette vision, mais il ne transigera pas sur les principes de justice et de dignité. Il est temps pour Israël de s'éveiller aux nouvelles réalités, sous peine de perdre bien plus que ce qu'il a à gagner en poursuivant ses politiques actuelles.

Faisal J. Abbas est le rédacteur en chef d'Arab News.

X: @FaisalJAbbas

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français. 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com