La francophonie divise les Tunisiens

Un Tunisien grave des motifs sur un disque de cuivre dans le souk de Djerba sur l'île tunisienne, le 7 mai 2015. La Tunisie va accueillir le sommet de la francophonie à Djerba en novembre 2022. AFP PHOTO / FETHI BELAID
Un Tunisien grave des motifs sur un disque de cuivre dans le souk de Djerba sur l'île tunisienne, le 7 mai 2015. La Tunisie va accueillir le sommet de la francophonie à Djerba en novembre 2022. AFP PHOTO / FETHI BELAID
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Publié le Dimanche 20 mars 2022

La francophonie divise les Tunisiens

  • Le sommet de la francophonie que la Tunisie va accueillir à Djerba en novembre 2022 fait déjà polémique avant même son lancement
  • Officiellement, et selon une étude plus récente, 6 millions de Tunisiens utilisent le français dans leur vie quotidienne, mais la relation avec la langue de Molière semble se distendre

TUNIS: Sur fond de préparatifs du 18e Sommet des présidents et chefs de gouvernements des pays francophones, partisans et adversaires de la langue française et des relations avec la France s’affrontent.

Avant même d’avoir lieu, ce sommet que la Tunisie accueillera à Djerba, les 19 et 20 novembre 2022, est déjà singulier. En effet, l’édition tunisienne de ce rassemblement est l’une des rares à ce jour à avoir été chahutée.

Prévu en décembre 2020, l’événement a été reporté une première fois à novembre 2021, en raison de la pandémie de Covid-19, et une seconde fois à cause du retard pris par les autorités tunisiennes dans les préparatifs.

La crise politique qui oppose depuis plus de deux ans le président Kaïs Saïed au président de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) et du mouvement Ennahdha, Rached Ghannouchi, a en partie fait de ce sommet une victime collatérale. L’ancien président tunisien, Moncef Marzouki, allié d’Ennahdha, ne s’est-il pas vanté d’avoir été à l’origine de l’annulation – en fait du premier report – de l’événement?

Toutefois, Moncef Marzouki ne va pas jusqu’à s’en prendre à la langue française et à la francophonie. Un pas que d’autres opposants franchissent allègrement. C’est le cas notamment d’Abderraouf Ayadi, ancien membre dirigeant du parti du Congrès pour la République (CPR), qui voit dans «la consécration de la francophonie en Tunisie (…) une colonisation visant à frapper l’identité arabo-musulmane». Seifeddine Makhlouf, porte-parole de la coalition Al Karama, allié d’Ennahdha, est dans la même posture et même à la pointe de ce combat.

Al Karama a même soumis à l’ARP en 2016 un projet de résolution demandant à la France de s’excuser pour la période coloniale. Mais ce texte n’est pas passé, n’ayant obtenu que 77 voix sur les 109 requises. D’une façon générale, les états-majors politiques sont plus réservés sur cette question que leurs militants. Ennahdha, qui a contribué à faire tomber cette résolution, adopte cette ligne de conduite.

En revanche, le président Kaïs Saïed donne l’impression d’hésiter sur la position à adopter. D’une part, il estime que la situation de l’Algérie diffère de celle de la Tunisie qui, dit-il, n’était pas colonisée, mais seulement sous le régime du protectorat. D’autre part, il est proche de la posture d’Al Karama quand il déclare que «les Tunisiens ont cher payé leur indépendance» et «qu’ils ont droit à des excuses dont la seule formulation ne serait pas suffisante».

La controverse sur la francophonie porte aussi, inévitablement, sur la langue française. En novembre dernier, un groupe a lancé une campagne pour «se libérer de la langue française».

Un point de vue que ne partage pas Hassan Zargouni. Le patron de Sigma Conseil, un cabinet de sondages et d’études de marché, appelle à un choix simple. «Soit nous nous considérons comme un pays arabo-musulman et dans ce cas, le français est une langue coloniale, soit nous nous considérons comme un pays arabo-musulman, mais ouvert sur les cultures et qui essaie de renforcer les capacités de ses jeunes à avoir des opportunités sur les marchés du travail, notamment en Afrique, où 300 millions de personnes parlent français.»

Mohammed Sadok Lejri va plus loin. Cet universitaire s’oppose au remplacement de la langue de Molière par l’anglais. Il considère que le «français est une composante essentielle de l’identité des Tunisiens». Il appelle les francophones à «faire de la résistance plus manifeste, à se montrer plus explicites et revendicateurs» et à «ne plus craindre d’être traités de vendus à la France ou de déclencher le courroux des imbéciles et des obtus unilingues».

Officiellement, et d’après une étude plus récente, 6 millions de Tunisiens utilisent le français dans leur vie quotidienne. Ce qui ferait d’eux les champions dans ce domaine proportionnellement à la population dans la région: 52% en Tunisie, contre seulement 35% au Maroc, 33% en Algérie et 13% en Mauritanie.

Pourtant, la donne est peut-être en train de changer et la relation du Tunisien avec le français semble se distendre. Mohammed Gontara, journaliste et enseignant à l’Institut de presse et des sciences de l’information de Tunis (IPSI), en atteste en rapportant une anecdote véridique. «Dans les années 1990, lorsque, dans un cours sur la publicité, je parlais de taux de pénétration, j’arrachais un sourire entendu aux étudiants. Aujourd’hui, je ne provoque plus aucune réaction», observe-t-il.

En outre, alors qu’il y a une trentaine d’années, près de la moitié des étudiants de l’IPSI rédigeait en français, «aujourd’hui seule une minorité – 5% ou moins – en est capable», témoigne l’enseignant.

Selon les derniers chiffres de l’Institut français de Tunis (IFT), 13 000 Tunisiens suivent ces cours de français et 17 500 sont inscrits dans les 21 établissements (écoles primaires, collèges et lycées) dispensant le programme scolaire appliqué dans l’Hexagone. Mais on ignore si la tendance dans les deux domaines est à la hausse ou à la baisse.

À Djerba, les habitants ne sont nullement dans cet état d’esprit. «Ils sont heureux d’accueillir le sommet de la francophonie parce qu’il vient relancer l’activité du tourisme, principale activité de l’île, durement éprouvée par la pandémie de Covid-19. Ils sont aussi très sensibles à l’effort consenti par les autorités pour améliorer les infrastructures de Djerba à cette occasion», observe l’avocat Moncef Barouni, originaire de l’île.


Aux confins de Gaza, Macron appelle à une reprise rapide de l'aide humanitaire

Accueilli à al-Arich par son homologue égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, M. Macron a également condamné "avec force" les attaques visant les humanitaires et secouristes dans la bande de Gaza, deux semaines après la mort de secouristes tués par des tirs israéliens dans le territoire palestinien. (AFP)
Accueilli à al-Arich par son homologue égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, M. Macron a également condamné "avec force" les attaques visant les humanitaires et secouristes dans la bande de Gaza, deux semaines après la mort de secouristes tués par des tirs israéliens dans le territoire palestinien. (AFP)
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  • "La situation aujourd'hui est intenable et elle n'a jamais été aussi grave", a déclaré le président français, appelant "à une reprise le plus rapidement possible de l'aide humanitaire"
  • La quasi-totalité des 2,4 millions d'habitants de la bande de Gaza ont été déplacés au moins une fois par les combats et vivent dans un territoire dévasté et assiégé depuis le début de la guerre

AL-ARISH: Emmanuel Macron a affirmé mardi que la reprise de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza était "la priorité des priorités", lors d'une visite à al-Arich, avant-poste égyptien du soutien humanitaire à Gaza où la situation est "intenable, selon le président français.

Cette rare visite d'un dirigeant européen aux confins de la bande de Gaza intervient dans un contexte tendu, alors que Israël a repris ses opérations militaires le 18 mars après deux mois de trêve. Israël bloque par ailleurs depuis le 2 mars l'entrée de l'aide humanitaire à Gaza.

"La situation aujourd'hui est intenable et elle n'a jamais été aussi grave", a déclaré le président français, appelant "à une reprise le plus rapidement possible de l'aide humanitaire", "la priorité des priorités", selon lui.

La quasi-totalité des 2,4 millions d'habitants de la bande de Gaza ont été déplacés au moins une fois par les combats et vivent dans un territoire dévasté et assiégé depuis le début de la guerre déclenchée le 7 octobre 2023 par l'attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas en Israël.

Accueilli à al-Arich par son homologue égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, M. Macron a également condamné "avec force" les attaques visant les humanitaires et secouristes dans la bande de Gaza, deux semaines après la mort de secouristes tués par des tirs israéliens dans le territoire palestinien.

"Nous condamnons évidemment avec force ces attaques, et il faut qu'ensuite la vérité soit établie comme il se doit,  parce que le monde a des règles, et c'est une bonne chose", a-t-il déclaré.

Le 23 mars, 15 personnes ont été tuées par des tirs israéliens sur des ambulances à Rafah, point de passage entre l'Egypte et Gaza à 50 km d'al-Arich, selon l'ONU et le Croissant-rouge palestinien. Le drame suscite un tollé international et le chef de l'armée israélienne a ordonné lundi une "enquête plus approfondie".

"Pas un projet immobilier" 

"La protection des civils et du personnel humanitaire ainsi qu'un plein accès de l'aide humanitaire constituent des obligations en vertu du droit international et du droit international humanitaire et doivent être respectées", avaient déjà plaidé lundi au Caire les présidents Macron et al-Sissi ainsi que le roi Abdallah II de Jordanie, dans une déclaration conjointe.

Ils ont aussi "appelé à un retour immédiat au cessez-le-feu pour que les Palestiniens soient protégés et reçoivent de l'aide humanitaire en quantité et dans les plus brefs délais".

Un message réitéré de vive voix à Donald Trump dans un appel téléphonique à quatre, juste avant que le président américain ne reçoive le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, à la Maison Blanche.

Interrogé mardi lors d'un point de presse à al-Arich sur les déclarations de Donald Trump, qui avait évoqué une prise de contrôle de la bande de Gaza par les Etats-Unis pour la reconstruire et en faire la "Riviera du Moyen-Orient", M. Macron a répondu que le territoire palestinien n'était "pas un projet immobilier".

"La réalité, c'est que vous avez 2 millions de personnes qui sont enfermées (...)  Après des mois et des mois de bombardements d'une guerre terrible, des dizaines de milliers de personnes ont perdu la vie. Vous avez des dizaines de milliers d'enfants qui sont mutilés sans famille. C'est ça dont on parle quand on parle de Gaza. C'est pas d'un projet immobilier", a souligné M. Macron.

Depuis octobre 2023, plus de 330 travailleurs humanitaires, la plupart d'entre eux appartenant à l'Unrwa, l'agence des Nations unies d'aide aux réfugiés palestiniens, ont été tués dans la bande de Gaza, selon les données de l'ONU datant de novembre.


L'angoisse de familles d'otages à Gaza après la reprise des frappes israéliennes

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son gouvernement soutiennent, contre l'avis de la plupart des familles et proches d'otages, qu'une pression militaire accrue est le seul moyen de forcer le Hamas à rendre les otages, morts ou vivants, encore captifs dans Gaza. (AFP)
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son gouvernement soutiennent, contre l'avis de la plupart des familles et proches d'otages, qu'une pression militaire accrue est le seul moyen de forcer le Hamas à rendre les otages, morts ou vivants, encore captifs dans Gaza. (AFP)
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  • "On ne sait pas grand-chose mais une chose qui est sûre, c'est que la pression militaire sur Gaza met en danger les otages", dit-elle dans un entretien à l'AFP
  • Son fils, aîné d'une fratrie de trois enfants, a été capturé le 7 octobre 2023 dans une base en lisière de Gaza, alors qu'il "était en pyjama et sans arme"

JERUSALEM: "Nos enfants sont en danger", affirme Herout Nimrodi, dont le fils Tamir, soldat israélien enlevé à l'âge de 18 ans est toujours captif dans la bande de Gaza, exprimant comme d'autres proches d'otages l'angoisse quotidienne des familles depuis qu'Israël y a repris ses bombardements.

"On ne sait pas grand-chose mais une chose qui est sûre, c'est que la pression militaire sur Gaza met en danger les otages", dit-elle dans un entretien à l'AFP.

Son fils, aîné d'une fratrie de trois enfants, a été capturé le 7 octobre 2023 dans une base en lisière de Gaza, alors qu'il "était en pyjama et sans arme".

Le jeune homme, qu'elle qualifie de "joyeux, curieux, altruiste, créatif", était soldat dans l'unité du Cogat, organisme du ministère de la Défense supervisant les activités civiles dans les Territoires palestiniens.

Il a eu le temps d'envoyer un message à sa mère évoquant les tirs de roquettes, mais 20 minutes après cet appel, il a été enlevé avec deux autres soldats, tués deux mois plus tard dans Gaza, dans des conditions non encore totalement élucidées.

"Négociations" 

Mme Nimrodi n'a reçu aucun signe de vie de son fils depuis la vidéo de son enlèvement diffusée par le Hamas le 7 octobre 2023, le jour où le mouvement islamiste a déclenché la guerre.

La trêve ayant tenu du 19 janvier au 17 mars a permis le retour de 33 otages israéliens, dont huit dans des cercueils, en échange de la libération de quelque 1.800 prisonniers palestiniens détenus par Israël.

Mais le 18 mars, après plusieurs semaines de désaccord avec le Hamas sur la façon de prolonger le cessez-le-feu, Israël a repris des opérations militaires à grande échelle dans la bande de Gaza, en commençant par des bombardements intenses.

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son gouvernement soutiennent, contre l'avis de la plupart des familles et proches d'otages, qu'une pression militaire accrue est le seul moyen de forcer le Hamas à rendre les otages, morts ou vivants, encore captifs dans Gaza.

Sur les 251 otages enlevés lors de l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023, 58 sont toujours retenus à Gaza, dont 34 morts selon l'armée israélienne.

"Pendant un an et demi, ça n'a pas marché, ce qui a fonctionné, ce sont les négociations et la pression [du président américain Donald Trump]", affirme Mme Nimrodi, déplorant, comme le président israélien Isaac Herzog le 25 mars que "la question des otages [ne soit] plus la priorité en Israël".

Tamir Nimrodi, qui a eu 20 ans en captivité, est l'un des 24 otages présumés vivants encore à Gaza mais l'un des rares dont aucune preuve de vie n'a été fournie depuis son enlèvement.

Mme Nimrodi participe régulièrement aux rassemblements des familles d'otages à Tel-Aviv, mais toutes ne sont pas d'accord entre elles et certains proches des captifs soutiennent le choix des armes plutôt que la négociation.

"Le Hamas ne libérera jamais les otages de bon coeur et sans pression militaire, on ne les reverra jamais", affirme Tzvika Mor, dont le fils Eitan a été enlevé du festival de musique Nova.

Fondateur du Forum Tikva ("Espoir" en hébreu), qui regroupe plusieurs proches d'otages, M. Mor estime que "chaque fois que le Hamas dit: pouce, le gouvernement négocie au lieu de lui mettre plus de pression pour libérer tous les otages en une seule fois".

"Tellement dur" 

Mais pour Dani Miran, pilier des rassemblements pour les otages dont le fils Omri, 48 ans, a été enlevé de son domicile au kibboutz Nahal Oz, "la crainte que nos otages soient touchés par des frappes israéliennes est quotidienne".

M. Miran, qui va avoir 80 ans, raconte que "les otages qui sont revenus ont témoigné que quand l'armée israélienne attaque à Gaza, les otages en subissent les conséquences".

Il se dit renforcé par le soutien "du peuple" et assure rester "fort" pour son fils, qui a deux filles.

"On vient de fêter les deux ans d'Alma, sa plus jeune fille, son second anniversaire sans son père, c'est tellement dur", dit-il.

"Je veux prendre Omri dans mes bras et lui dire comment tout le peuple se bat pour que tous les otages reviennent en une seule fois", a-t-il dit au micro lors du rassemblement hebdomadaire samedi soir à Tel-Aviv.

Quelques jours avant la Pâque juive, fête qui célèbre la liberté retrouvée des Hébreux après l'esclavage en Egypte, selon la Bible, Mme Nimrodi, dont le prénom Herout signifie "Liberté", attend son fils.

"Il aime tellement cette fête", ajoute-t-elle.

 


L'Arabie saoudite achève les préparatifs de son pavillon pour l'Exposition universelle de 2025

Avec plus de 700 événements et activités, le pavillon vise à offrir une expérience immersive aux visiteurs. (SPA)
Avec plus de 700 événements et activités, le pavillon vise à offrir une expérience immersive aux visiteurs. (SPA)
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  • Avec plus de 700 événements et activités, le pavillon vise à offrir une expérience immersive aux visiteurs.
  • Il mettra en lumière le paysage culturel et innovant de l'Arabie saoudite

DUBAI : L'Arabie saoudite a achevé la construction et les préparatifs de son pavillon pour l'Expo 2025, qui ouvrira ses portes à Osaka le 13 avril.

Avec plus de 700 événements et activités, le pavillon vise à offrir une expérience immersive aux visiteurs.

Il mettra en lumière le paysage culturel et innovant de l'Arabie saoudite, tout en dévoilant de nouvelles initiatives conçues pour encourager le public japonais à explorer le royaume et à s'y connecter.

Au cours des deux derniers mois, le pavillon saoudien a lancé une tournée dans sept villes japonaises, offrant aux communautés locales et aux touristes la possibilité de profiter de l'hospitalité saoudienne et d'explorer la culture du Royaume.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

Cet article a été publié à l'origine sur Arab News Japan