En toute objectivité, la première semaine de la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP26) a marqué un bon départ pour cette réunion dont la vocation est de sauver le monde.
Les prises de bec - que les États-Unis semblent avoir déclenchées pour agacer leur rival mondial, à savoir la Chine - ne doivent pas occulter les véritables progrès réalisés en matière de lutte contre le changement climatique.
Certains succès méritent certes d'être soulignés. Il s'agit notamment de l'engagement de 105 nations à enrayer la désertification et à se lancer dans le reboisement massif afin d'atténuer les émissions de CO2 et de protéger la biodiversité : l'Arabie saoudite peut à juste titre se targuer d'avoir ouvert la voie à cette initiative grâce à la Saudi Green Initiative (Initiative saoudienne verte). Ce projet a été financé à hauteur de 19 milliards de dollars par des fonds gouvernementaux et privés.
Par ailleurs, les échéances fixées pour atteindre l'objectif de zéro émission de gaz à effet de serre ont elles aussi progressé. Ainsi, l'Inde mérite d'être citée pour son engagement à atteindre un bilan carbone neutre d'ici à 2070, même si cette date ne semble pas plaire aux écologistes.
En revanche, d'importants obstacles continuent d'entraver la réalisation de cet objectif. En marge de la conférence, des conversations ont été menées avec des responsables saoudiens ; elles ont fait ressortir quatre domaines principaux qui attendent encore d'être résolus par les négociateurs qui occupent désormais le devant de la scène au moment où les chefs d'État et de gouvernement quittent Glasgow.
La première problématique est celle du charbon. Quelques-uns des plus grands consommateurs d'énergie au monde (comme la Chine et l'Inde), ainsi que certains des plus grands producteurs de charbon (comme la Russie et l'Australie), ne sont pas encore prêts à se séparer de ce combustible. Leur position a été renforcée par la pénurie d'énergie à laquelle est confrontée une grande partie de l'Occident.
En revanche, il semble que ces pays tablent sur les progrès technologiques susceptibles de réduire la pollution due à la production de charbon et de conserver, dans le même temps, les avantages liés à cette source d'énergie si riche - cette approche peut également s'appliquer au pétrole.
Le monde est certes désireux d'atteindre des objectifs ambitieux en matière de lutte contre le réchauffement climatique ; il convient toutefois de faire preuve de pragmatisme à cet égard.
Frank Kane
Par ailleurs, l'article 6 de l'Accord de Paris, qui porte sur les marchés du carbone au niveau mondial, est loin d'être achevé. Pour certains experts en énergie, cet article est essentiel à la réalisation de l'objectif « zéro émission », mais il reste encore un long chemin à parcourir sur cette question si complexe. En quelques mots, le monde n'a pas encore réussi à mettre en place un mécanisme efficace pour contrebalancer les émissions de CO2 dans le cadre des efforts déployés pour atteindre le niveau zéro. Voilà un obstacle de taille.
En troisième lieu vient le problème épineux des allocations en faveur des combustibles fossiles. Cette question est souvent associée au Moyen-Orient. Mais en réalité, de nombreux pays occidentaux encouragent leur populations à continuer d'utiliser le charbon, le gaz et le pétrole pour leur approvisionnement énergétique.
Certains progrès ont été réalisés sur ce point lors du sommet du Groupe des Vingt (G20) organisé en Italie et les négociateurs saoudiens sont convaincus qu'un compromis sur ce sujet hautement politique peut être atteint à Glasgow.
Vient enfin la question la plus épineuse de toutes. L'Accord de Paris prévoit de maintenir l'augmentation de la température moyenne de la planète en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels. Mais toutes les prévisions suggèrent que cet objectif sera difficile à atteindre.
Certains pays - en particulier les pays européens - souhaitent aller plus loin et se fixer l’objectif de 1,5°C. Le monde est certes désireux d'atteindre des objectifs ambitieux en matière de lutte contre le réchauffement climatique ; il convient toutefois de faire preuve de pragmatisme à cet égard.
Pour l'Arabie saoudite, il convient de recourir à toutes les techniques de lutte contre le changement climatique, comme le prévoit le modèle de l'économie circulaire du carbone. Le Royaume invite à renoncer aux objectifs ambitieux mais peu pratiques.
Il ne fait aucun doute que les pays participants pourront parvenir à un accord sur la déclaration finale dans une semaine. Toutefois, pour résoudre les problèmes pressants que sont le changement climatique et le réchauffement de la planète, cet accord devra être judicieux et réalisable. Il ne doit pas constituer uniquement une manœuvre diplomatique fondée sur des compromis et des évasions.
- Frank Kane est un journaliste économique plusieurs fois primé qui habite Dubaï.
Twitter : @frankkanedubai
NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com.