AVIGNON : Dans un grand recueillement, une foule de policiers et d'Avignonnais s'est rassemblée dimanche devant l'hôtel de police d'Avignon en hommage à un brigadier de 36 ans, Eric Masson, tué mercredi lors d'une intervention contre un point de trafic de drogue.
Un hommage national lui sera rendu mardi à 15H00 à la préfecture de Vaucluse, a-t-on appris auprès de la police locale.
Sur les marches du commissariat, situé juste à l'extérieur des remparts de la ville, et sur le large boulevard adjacent, quelque 5 000 personnes, selon la police, ont observé une minute de silence, à l'appel des syndicats de la profession, face au portrait du père de famille mort en service.
Beaucoup de policiers, en civil dont certains avec leur brassard orange, mais aussi des habitants, font la queue sur plusieurs dizaines de mètres pour déposer une fleur ou laisser un mot sur les registres de condoléances déjà bien fournis. Des applaudissement pour la police et une Marseillaise résonnent de temps à autre.
Ses coéquipiers étaient présents mais non sa famille qui a fait part de son besoin de tranquillité dans ce moment de deuil et souhaite se tenir éloignée de toute agitation politique et médiatique.
Dans la foule, une dame qui préfère taire son nom a du mal à cacher ses larmes. "Mon fils était avec lui, il lui a tenu la main quand il mourait. Il est dévasté. Moi je ressens une colère immense contre ce système. Pourquoi tant de haine?", confie cette mère d'un des brigadiers de l'équipe d'Eric Masson.
Appelés mercredi sur un point de trafic de drogue bien connu, dans le centre historique d'Avignon, les policiers de la brigade d'intervention départementale Vaucluse-Gard, en civil, dont Eric Masson, avaient procédé au contrôle d'une cliente "de ce qui ressemblait à un échange de stupéfiants", selon le procureur Philippe Guémas.
Alors que la femme venait d'être arrêtée par les deux policiers, "deux individus s'avançaient (...) et l'un des deux, porteur d'une sacoche en bandoulière, (leur) demandait ce qu'ils faisaient là", a expliqué M. Guémas: "Eric Masson déclinait sa qualité de policier et l'individu sortait une arme de poing et faisait feu à deux reprises, l'atteignant au thorax et à l'abdomen". Le policier est mort sur place.
Pas "guerriers mais "gardiens de la paix"
Le tireur et son complice ont pris la fuite et sont toujours activement recherchés.
"Vous êtes venus si nombreux. Il devrait y avoir plus de monde. L'individu qui a fait ça à Eric est en fuite, mais qu'il tremble, l'échéance n'est que retardée", a lancé un policier avignonnais au micro.
"Ce qu'on ressent, c'est même plus de la colère car on est résigné. Ça ira de pire en pire car il n'y a pas de soutien. Derrière, la justice ne suit pas", déplore Nicolas, un ancien collègue marseillais d'Eric Masson.
Il confie ses doutes, sa vocation ébranlée. "On aime ce qu'on fait", tempère à ses côtés un collègue, Franck.
"Nous ne sommes pas des guerriers mais des gardiens de la paix", insiste Bruno Bartoccetti, secrétaire régional du syndicat Unité SGP, qui espère des mesures plus fermes contre "des dealers qui aujourd'hui sont armés".
"Il faut donner à la justice les moyens de sanctionner", aoute-t-il.
Lundi, tous les syndicats de police doivent être reçus par le Premier ministre Jean Castex.
Fabien Vanhemelryck, secrétaire général d'Alliance police nationale, réclame lui "des peines incompressibles pour chaque catégorie d'infractions".
"La lutte contre les trafics de stupéfiants, partout sur le territoire national, s'apparente à une guerre. Cette guerre, nous la menons grâce à des soldats, (...) les policiers et les gendarmes de France. Aujourd'hui, un de ces soldats est mort en héros", avait déclaré mercredi le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.
Le département de Vaucluse, l’un des dix plus pauvres de France, a connu une hausse du trafic de drogue ces dernières années, comme plusieurs villes de l'arc méditerranéen, selon des responsables policiers et judiciaires interrogés récemment par l’AFP.