Les violations des droits de l’homme par le régime iranien et ses milices à travers le Moyen-Orient sont de plus en plus flagrantes et épouvantables. Les dirigeants iraniens et leurs mandataires agissent visiblement en toute impunité.
En Iran, il existe plusieurs catégories sur lesquelles la communauté internationale devrait se concentrer. Tout d'abord, la répression et l'exécution des prisonniers politiques et des personnes qui protestent contre l'establishment théocratique ont atteint un niveau sans précédent. Selon le récent Rapport mondial 2021 de Human Rights Watch, le régime de Téhéran est l'un des principaux bourreaux dans le monde. Il a exécuté plus de 230 personnes en 2020, parmi lesquelles des individus qui étaient enfants à l’époque des faits qu’on leur reproche.
Pour pouvoir exécuter des prisonniers politiques, la justice iranienne accable les prévenus d’accusations très vagues, qu’elle qualifie de «crimes pour la sécurité nationale». Ces «crimes» comprennent moharebeh («inimitié contre Dieu»), ifsad fil arz («semer la corruption sur Terre») et baghi («rébellion armée»).
Ce n’est pas seulement le nombre d’exécutions qui est effroyable, mais la nature de certaines d’entre elles. Depuis le début de l'année dernière, ces exécutions ont impliqué des mineurs, des femmes et des individus qui appartiennent à des groupes ethniques et religieux minoritaires, notamment des Arabes ahwazis, des Kurdes et des sunnites. Bien que l’Iran ait ratifié la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant, le gouvernement du président Hassan Rohani n’a fait aucun effort pour modifier le code pénal du pays, qui autorise l’exécution de filles âgées neuf ans à peine.
Au sujet de la persécution des Ahwazis et des Baloutches, Diana Eltahawy, directrice adjointe d'Amnesty International pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord, déclare: «La récente escalade des exécutions de Baloutches et d'Arabes ahwazis soulève de sérieuses inquiétudes quant au fait que les autorités utilisent la peine de mort pour répandre la peur sur les minorités ethniques défavorisées, ainsi que sur la population en général.»
Le rapport de Human Rights Watch mentionne également l'exécution de personnalités de premier plan telles que Navid Afkari. Ce champion de lutte et ses frères ont été torturés pour les forcer à témoigner les uns contre les autres et à extraire des «aveux», qui ont ensuite été diffusés à la télévision. Afkari a décrit dans une lettre son supplice: «Pendant environ cinquante jours, j'ai dû endurer les tortures physiques et psychologiques les plus horribles. Ils me battaient avec des bâtons et des matraques, me frappant les bras, les jambes, l'abdomen et le dos. Ils plaçaient un sac en plastique sur ma tête et m’ont torturé jusqu'à ce que je suffoque, à deux doigts de la mort. Ils ont également versé de l'alcool dans mon nez».
Téhéran tente d’instiller la peur dans la société et veut envoyer à la population l’avertissement suivant: toute opposition sera très durement sanctionnée.
Dr Majid Rafizadeh
Le journaliste dissident Rouhollah Zam est une autre personnalité bien connue qui a été exécutée à la fin de l’année 2020. Il vivait en exil en France et aurait été enlevé par des agents qui travaillaient pour le régime iranien peu de temps après avoir quitté le pays pour l'Irak, le 11 octobre 2019. Zam dirigeait le site d’actualités en ligne Amad News. Sa chaîne, sur l'application de messagerie Telegram, aurait compté plus d'un million d'abonnés.
En exécutant des personnalités aussi importantes, Téhéran tente d’instiller la peur dans la société et veut envoyer à la population l’avertissement suivant: toute opposition sera très durement sanctionnée.
Pour réprimer davantage les prisonniers politiques, le système judiciaire iranien interdit aux accusés de recourir à un avocat et de bénéficier d’un procès équitable. L'absence de procédure régulière, les aveux forcés et la torture physique ou psychologique sont au premier plan du processus par lequel le pouvoir judiciaire condamne les accusés à la peine de mort. Comme l'indique le rapport de Human Rights Watch, «les tribunaux iraniens, et en particulier les tribunaux révolutionnaires, sont loin de fournir des procès équitables et ils utilisent des aveux probablement obtenus sous la torture comme preuves devant la cour. Les autorités n'ont pas enquêté de manière sérieuse sur les nombreuses allégations de torture contre des détenus. Elles restreignent régulièrement l’accès des détenus à un avocat, en particulier pendant la période d’enquête initiale».
En 2020, les libertés fondamentales des citoyens ordinaires, y compris celles d’expression, de réunion, d’association et de religion, se sont détériorées en Iran. Le régime a particulièrement intensifié sa discrimination à l’encontre des minorités religieuses telles que les baha’is.
Pendant ce temps, en Irak, en Syrie et au Yémen, les milices iraniennes suivent l'exemple de leur financeur lorsqu'il s'agit de commettre des violations flagrantes des droits de l'homme. Par exemple, en plus de lancer des roquettes sur d'autres pays comme l'Arabie saoudite, les Houthis, soutenus par l'Iran, utilisent au Yémen des mines terrestres, ce qui provoque des morts et des blessés parmi les civils. Les forces houthies continuent également «de harceler et de poursuivre les dissidents, notamment des universitaires, des avocats, des étudiants, des minorités religieuses et des journalistes. Les autorités houthies ont poursuivi trente-cinq parlementaires au mois de mars car les tribunaux contrôlés par les Houthis les avaient condamnés à mort par contumace pour trahison. Les militantes des droits humains ont été réprimées par les parties au conflit en raison de leur travail sur les droits des femmes.»
Un pas a récemment été fait dans la bonne direction: Joe Wilson, membre du Congrès américain, a présenté ce mois-ci, à la veille de Norouz – le Nouvel An iranien – un projet de loi qui tient le régime responsable de ses violations des droits de l’homme. Ce texte loi, connu sous le nom de «Loi iranienne sur les droits de l'homme et la responsabilité de 2021», inclut le Hezbollah et les milices soutenues par l'Iran en Syrie et en Irak. Mais ce projet de loi ne suffit pas à lui seul. Il incombe à l'ONU d'intervenir et d'agir immédiatement afin de tenir les dirigeants iraniens et leurs milices responsables des crimes contre l'humanité qu'ils commettent.
Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain formé à Harvard. Homme d'affaires et expert de premier plan sur la politique étrangère iranienne et américaine, il est président de l'International American Council. Il siège aux conseils d'administration de la Harvard International Review, du Harvard International Relations Council et de la Chambre de commerce et d'affaires des États-Unis et du Moyen-Orient.
NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com