Depuis que Joe Biden est devenu président des États-Unis, le régime iranien a progressivement assoupli sa position afin de ressusciter l'accord nucléaire du Plan d'action global conjoint (JCPOA), une attitude vécue comme une humiliation par la République islamique, connue pour se vanter de sa puissance, de sa résilience et de son opposition aux demandes américaines.
Avant l'entrée en fonction de l'administration Biden au mois de janvier, les dirigeants iraniens avaient adopté une position ferme à l'égard de l'accord nucléaire, estimant que le nouveau président ressemblerait à Barack Obama pour ce qui est de la ferme volonté de reprendre l'accord nucléaire avec Téhéran. Après tout, Biden était vice-président de l'administration Obama, qui a négocié le JCPOA; et, lorsqu'il s’est présenté à la présidence, il a clairement indiqué qu'il souhaitait recourir à la diplomatie pour ramener Téhéran au pacte nucléaire.
Croyant que l'accord nucléaire serait relancé d’ici à quelques jours, les dirigeants iraniens se sont enhardis et ils ont exigé, au départ, que les États-Unis reviennent au pacte nucléaire et lèvent toutes les sanctions sans la moindre condition. En outre, le régime a commencé à menacer Washington dans le but de projeter sa puissance et d’inciter davantage l'administration Biden à revenir à l'accord nucléaire de 2015. Par exemple, les autorités iraniennes ont commencé à enrichir de l'uranium à 20% de pureté dans l'installation nucléaire souterraine de Fordow, ce qui signifie qu’il n’y a plus qu’un petit pas technique à faire pour obtenir un niveau de qualité militaire.
Le Corps des gardiens de la révolution islamique a emboîté le pas en ciblant la navigation internationale, comme la saisie d'un pétrolier battant pavillon sud-coréen. Le Parlement iranien a également fait son travail en adoptant une loi qui oblige le gouvernement à expulser tous les inspecteurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) du pays si les sanctions américaines n'étaient pas levées avant le 21 février.
Le régime habilité avait également commencé à exiger une compensation financière. La justice iranienne a exigé que les États-Unis versent 130 milliards de dollars (soit 109 milliards d’euros) en raison des dommages causés par ses sanctions. De même, le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammed Djavad Zarif, a déclaré l’année dernière lors d’un forum organisé par le Council on Foreign Relations (CFR) de New York: «Compensez nos pertes… Le fait de ne pas essayer de renégocier ce qui a déjà été négocié est une preuve de bonne foi.»
Les dirigeants iraniens pensaient que la Maison Blanche aurait hâte de relancer l’accord sur le nucléaire avec l’administration prétendument modérée du président Hassan Rohani avant l’élection présidentielle iranienne du mois de juin, ce qui pourrait bien aboutir à l’élection d’une personnalité politique dure.
Moins de deux mois après l'entrée en fonction de l'administration Biden, Téhéran a commencé à assouplir sa position.
Cependant, les choses ont commencé à changer lorsque l'administration Biden n'a pas affiché le vif désir que les dirigeants iraniens attendaient au sujet d’un éventuel retour à l'accord nucléaire. Les déclarations de la Maison Blanche ont également jeté un froid sur les projets du régime iranien. Rob Malley, l’envoyé du département d’État pour l’Iran, a souligné que c’était à l’Iran de décider. Il a ajouté: «Nous n'avons pas l'intention de baser le rythme de nos discussions sur les élections iraniennes: c’est le point jusqu’où nous pourrons aller qui définira le rythme, conformément à la défense des intérêts de sécurité nationale des États-Unis. En d'autres termes, nous ne précipiterons ni ne ralentirons les choses à cause des élections iraniennes.»
Biden a également déclaré que son administration ne lèverait pas les sanctions contre l'Iran afin d'inciter la République islamique à venir à la table des négociations. La Maison Blanche a plutôt insisté sur le fait que le gouvernement iranien doit respecter ses engagements dans le cadre de l'accord nucléaire pour que les sanctions soient levées.
Aujourd'hui, moins de deux mois après l'entrée en fonction de l'administration Biden, Téhéran a commencé à assouplir sa position afin de revenir à l'accord nucléaire de 2015. Les demandes constantes de compensation financière ont disparu des annonces des dirigeants iraniens. En outre, en dépit de la loi interdisant aux inspecteurs de l’AIEA de surveiller les sites nucléaires iraniens après le 21 février, le régime est parvenu à un accord avec le chef de l’AIEA destiné à autoriser les inspecteurs à y accéder pour les trois prochains mois. L'administration Rohani n'aurait pas conclu un tel accord sans l'approbation du Guide suprême, Ali Khamenei.
Zarif est également revenu sur sa position ferme et a proposé un «retour coordonné» de l'accord nucléaire. Il a souligné que le chef de la politique étrangère de l'Union européenne, Josep Borrell, pourrait aider à «synchroniser» ou «coordonner» les tentatives de l'Iran et des États-Unis pour revenir au JCPOA.
Le retrait des demandes fermes du régime iranien concernant l’accord nucléaire montre l’importance de l’influence des sanctions que les États-Unis détiennent sur Téhéran.
Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain diplômé de Harvard. Twitter : @Dr_Rafizadeh
NDLR: Les opinions exprimées par les auteurs dans cette section sont les leurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d'Arab News.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com