Les ambitions expansionnistes du président turc Recep Tayyip Erdogan en Libye, ainsi que ses menaces répétées contre les Émirats arabes unis, l’Égypte et d’autres pays, ne signifient pas pour autant qu’il marque des points sur la scène internationale. Généralement, la politique étrangère est une extension de la politique intérieure et le principal devoir du président turc est de promouvoir la sécurité de la nation. Alors qu’il poursuit sa politique de suppression des libertés et des libertés civiles en Turquie, il fait également des ravages explosifs dans de nombreux pays.
La politique étrangère d'Erdogan repose sur deux piliers : le soutien aux islamistes partout dans le monde et une diplomatie paranoïaque, qui pour augmenter la sécurité dans son pays et protéger ses frontières, attaque ses voisins, comme c’est le cas actuellement en Syrie, en Irak avec les Kurdes. Mais sans surprise, sa politique étrangère interventionniste va bientôt s’effondrer. La Turquie n’aura d’autre choix que de retrouver son rôle traditionnel de puissance régionale limitée, et souvent faible.
Multipliant usurpations et mensonges, Erdogan s'est arrogé la suprématie sur le monde islamique, composé de nombreuses nations, chacune ayant des droits égaux pour se défendre et instituer l'unité et le progrès des musulmans. Poussé par un désir de domination, il cherche à asseoir une autorité absolue sur d’autres dirigeants musulmans, en utilisant des messages tyranniques et démagogiques.
En même temps, il a transformé la Turquie en une nation où le pouvoir judicaire est sous sa botte, et dans lequel les citoyens sont intimidés. Au lieu de se faire le porteur de la tradition islamique d'harmonie avec l'Europe et l'OTAN et d’être un médiateur entre l'Est et l'Ouest, il a au contraire construit un empire théocratique. Il n’a fait que mettre des braises sur le feu, relançant la guerre civile en Libye, malgré les efforts nationaux pour y mettre fin.
Ses abus en politique étrangère sont poussés à l’extrême. Ainsi, il ne croit pas que chaque nation a des droits égaux pour protéger sa souveraineté, assurer sa sécurité et être un membre actif de la communauté des nation. Il a au contraire ressuscité la tradition guerrière dans la région, embauchant des troupes de mercenaires pour mener ses guerres en Syrie, en Libye et contre les Kurdes et les déployer dans la zone qu'il veut ruiner et dévaster. La politique étrangère d'Erdogan n'a d'autre but que la prise du pouvoir. Son objectif n’est pas seulement de protéger son territoire, mais aussi de l’agrandir.
La politique étrangère d'Erdogan repose sur deux piliers : le soutien aux islamistes partout dans le monde et une diplomatie paranoïaque, qui pour augmenter la sécurité dans son pays et protéger ses frontières, attaque ses voisins, comme c’est le cas actuellement en Syrie, en Irak avec les Kurdes
Le rêve illusoire de ressusciter un Empire ottoman défunt
Les Etats, pour déstabiliser les autres, agissent souvent au moyen d’opérations secrètes, mais Erdogan, lui, ne se préoccupe même pas dissimuler ses actes, et mène au contraire des attaques frontales en manière de politique étrangère, brutales et explicites, sûr de sa puissance. Il a alimenté l’instabilité en Libye, en envoyant des milices syriennes qui lui sont fidèles pour défendre le gouvernement de Tripoli, dont les actions ont contribué à la division du pays. Même un pays comme le Tchad, avec ses ressources pétrolières et minérales, n’a pas échappé à sa colère. Malgré des succès à court terme dans ces deux pays, son bilan sera un échec à long terme.
Faut-il encore rappeler qu'Erdogan a dirigé les Frères musulmans d'Égypte depuis le renversement du gouvernement du président Mohammed Morsi en 2013 et a tenté de saper la légitimité du gouvernement d'Abdel Fattah El-Sissi ? Il répand ses messages de propagande en Egypte, dans les Emirats arabes unis et dans bien d’autres nations honorables.
Si Erdogan espère jouer le rôle d’un nouveau sultan ottoman, il ne pourra jamais ressusciter cet empire défunt. S'il veut créer des enclaves pour les islamistes en Europe, en Syrie, en Libye et parmi les Kurdes, c'est absurde car leur existence ne repose sur aucun fondement politique. Encore une fois, la politique étrangère d'Erdogan n'a d'autre but que la prise du pouvoir, et l'agrandissement du territoire turc.
Espérons que sa politique sera un échec, ce qui signifierait que la Turquie prendrait un nouveau départ et que ses relations avec le monde seraient plus modérées. Les successeurs d’Erdogan ramèneront-ils la Turquie dans le giron des nations civilisées ? Très probablement oui. Ses interventions risquées et dangereuses ne sont pas contraignantes pour quiconque dirigera la Turquie après lui. Il y a une désapprobation des politiques d'Erdogan. Cela pourrait créer une résistance à sa politique, qui pourrait obtenir de bons résultats.
Enfin, personne ne devrait craindre ses projets grandioses, car beaucoup en Turquie admettent qu'ils n'ont aucune chance de réussir. La Turquie sous la direction d’Erdogan ne souhaite pas la paix. Sa politique comment à être contre-attaquée. Le gouvernement allemand a demandé à la Turquie qu’elle respecte les droits maritimes de la Grèce en Méditerranée orientale. Cela pourrait être une bonne occasion pour commencer à limiter le pouvoir d’Erdogan.
Maria Maalouf est une journaliste libanaise. Elle détient un diplôme en sociologie de l’Université de Lyon.
Twitter: @bilarakib
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com