L'accord conclu cette semaine sur les frontières maritimes entre le Liban et Israël est une bonne nouvelle, vu que la question a longtemps été problématique et controversée. En effet, l'accord établit les eaux territoriales de chaque pays et détermine leurs droits relatifs aux gisements de gaz et de pétrole dans la grande région de la Méditerranée orientale.
Pour que l'accord soit réussi, il doit être interprété comme un large consensus entre Israël et le Liban qui pourra être invoqué chaque fois que des différends surviendront entre les deux pays. Si les deux parties ne sont pas d'accord sur le nombre de kilomètres que chaque pays se verra attribuer dans les eaux de la Méditerranée, une simple ouverture d'esprit et une exécution flexible du plan maritime suffiraient à apaiser les tensions.
Cet accord ne doit cependant pas être perçu comme un prélude à un traité de paix entre Israël et le Liban, ni comme une trahison quelconque envers le peuple palestinien: l'intérêt national du Liban n'est pas le même que celui des Palestiniens.
D'autres facteurs importants sont associés à cet accord. Il s'agit là d'une affirmation de la souveraineté libanaise, le Liban ayant gagné de l'espace, de l'eau et des ressources naturelles. C'est également une affirmation de la politique étrangère du Liban, dans la mesure où le Liban a pu régler un différend frontalier difficile sans entrer en guerre. Il faut à présent espérer que cet accord maritime réduira les tensions entre Israël et le Liban, et établira un consensus minimal sur les éléments essentiels de la politique étrangère libanaise.
Certains groupes tentent déjà de rejeter le pacte maritime, mais il faut leur résister. Se retirer de l'accord serait nuisible à la sécurité nationale du Liban. De nombreux efforts ont été déployés pour y parvenir et les forces politiques qui s'y opposent ne doivent pas être autorisées à retarder l'élection d'un nouveau président à cause de cet accord. Cela condamnerait le Liban à une impasse politique qui serait difficile à surmonter.
« Cet accord ne doit cependant pas être perçu comme un prélude à un traité de paix entre Israël et le Liban, ni comme une trahison quelconque envers le peuple palestinien.»
Maria Maalouf
Malgré cet accord conclu sous l'égide des États-Unis, de nombreuses questions difficiles subsistent quant aux relations libano-américaines. Les États-Unis s'inquiètent toujours de l'influence de l'Iran au Liban. Bien que ces inquiétudes soient justifiées, les États-Unis doivent apprécier ce que le Liban a accompli ; il aurait été politiquement impossible pour le Liban de conclure un tel accord avec Israël sans déjouer les manœuvres de l'Iran. L'Iran pousse toujours le Liban vers l'instabilité et cherche à y maintenir un état de chaos.
Le Hezbollah, mandataire de l'Iran au Liban, prétend, hélas, qu'il a forcé Israël à accepter ses demandes et à faire des concessions sur l'accord maritime. Le Hezbollah a malicieusement tenté de faire échouer les négociations. Toutefois, il n'y est pas parvenu parce que les mensonges qu'il a répandus n'étaient pas avantageux pour la sécurité du Liban. En parvenant à cet accord, le Liban a mis fin à un désaccord politique qui a toujours contrarié la politique étrangère américaine. L'Amérique devrait maintenant aider le Liban à définir la mise en œuvre de cet accord et les prochaines étapes de sa relation avec Israël. L'accord ne résoudra certainement pas tous les problèmes du Moyen-Orient, mais il devrait inciter les Américains à déployer de nouveaux efforts pour mettre fin à la guerre en Syrie et réduire les tensions entre Israël et les Palestiniens.
L'accord doit être perçu simplement. Il ne s'agit pas d'une doctrine de la politique étrangère du Liban, mais plutôt d'une manière pragmatique pour le Liban d'aborder ses relations extérieures. Par ailleurs, l'accord doit prévenir toute éventualité d'une guerre future entre le Liban et Israël. Pourtant, cela ne sera pas facile, parce qu'il existe au Liban des forces qui cherchent à provoquer des affrontements armés avec Israël. Enfin, l'Amérique, l'Europe, Israël et le Liban doivent tous travailler dur pour faire respecter cet accord maritime, et le monde entier doit l'approuver. Cela renforcera la légitimité de l'État au Liban et améliorera la stature du pays dans le monde.
Maria Maalouf est journaliste, présentatrice, éditrice et auteure libanaise. Elle est titulaire d'un master en sociologie politique de l'Université de Lyon.
Twitter : @bilarakib
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com