Eric Mathieu Ritter, une mode pour réenchanter la dystopie

Création Emergency Room (Instagram @emergencyroombeirut) ©Vogue Arabia
Création Emergency Room (Instagram @emergencyroombeirut) ©Vogue Arabia
Création Emergency Room (©Dunia Chahine)
Création Emergency Room (©Dunia Chahine)
Création Emergency Room (Abdu Ghafour)
Création Emergency Room (Abdu Ghafour)
Création Emergency Roome (© Eric Ritter)
Création Emergency Roome (© Eric Ritter)
Création Emergency Room (©Eric Ritter)
Création Emergency Room (©Eric Ritter)
Création Emergency Room (©Eric Ritter)
Création Emergency Room (©Eric Ritter)
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Eric Mathieu Ritter, une mode pour réenchanter la dystopie

  • Eric Ritter a découvert sa voie dans les souks de Tripoli, la "capitale" du Liban Nord qui s’enfonce dans la pauvreté
  • Fort d’une culture cosmopolite et d’une envie de balayer les codes convenus, Ritter a la confiance totale des brodeuses et couturières qu’il est chargé de former

 

BEYROUTH : Il fait partie de cette génération de jeunes couturier libanais portés par une longue tradition de fêtes et de glamour, mais qui imposent désormais leur éthique et leur style. Eric Mathieu Ritter a découvert sa voie dans les souks de Tripoli, la "capitale" du Liban Nord qui s’enfonce dans la pauvreté.

Prêt à faire carrière dans la mode à sa sortie d’Esmod Beyrouth, Eric Ritter est pris en stage par le créateur Rabih Kayrouz dans ses ateliers parisiens. Mais le jeune homme ne se retrouve pas dans le luxe de la Ville lumière et vit cette période avec un indéfinissable sentiment de manque. Quelques mois après son retour à Beyrouth, il se voit proposer une position de directeur dans un atelier caritatif, Tara w’Kheit, dans la ville de Tripoli. Là sont regroupées des femmes qui produisent de petits travaux d’aiguille et de crochet qui vont de l’insignifiant à l’inutile. Ces objets s’écoulent dans les ventes sans susciter de désir, malgré la qualité des finitions et le temps consacré à leur réalisation. Fort d’une culture cosmopolite et d’une envie de balayer les codes convenus, Ritter a la confiance totale des brodeuses et couturières qu’il est chargé de former. Avec leur aide, il va provoquer une petite révolution.

Des draps transformés en chemises

Pour le jeune Libanais, habité d’une conscience aiguë des désastres climatiques qui se profilent et de la nécessité d’une contribution de chacun pour inverser la tendance, le premier impératif était la durabilité, l’utilisation de ce qui existe. L’une des villes les plus pauvres du Liban, Tripoli lui offrait un trésor, avec ses souks, ultimes terminaux pour les invendus de la Planète. On imagine ici la fameuse scène de la Mélodie du bonheur où Julie Andrews arrache les rideaux de la chambre pour y tailler des vêtements de liberté aux enfants Von Trapp. Eric Ritter, qui enseigne parallèlement la mode à l’Académie libanaise des Beaux-arts, va faire feu de tout bois, des manteaux et des vestes avec des tapis, des robes de mariées avec des voilages, des blousons avec des accumulations de peluches à la manière des fauteuils des frères Campana. Les draps de lits bon marché imprimés de personnages de dessins animés vont se transformer en chemises, les draps de laine noirs utilisés dans la mode modeste ou les costumes masculins vont devenir des kimonos à bords francs, un peu grunge, résolument audacieux. Les traditionnels napperons en crochet, omniprésents sous les principaux objets des foyers traditionnels dont ils soulignent l’importance, notamment la télévision, vont se transformer sous l’impulsion du créateur en cagoules insolites, avec la complicité des couturières qui n’en reviennent pas de leur propre toupet. Le modèle phare est un blouson calqué sur la Jean Jacquet avec ses boutons pression et ses coutures apparentes, composé d’une débauche de chutes de tissus, du fleuri au texturé en passant par la dentelle. De ces collages naissent des produits uniques qui font la fierté des couturières qui les assemblent. 

Une marque qui parle d’égalité

Avec le temps, en peu de temps d’ailleurs, Tara W’Kheit se transforme d’un atelier caritatif en une marque « trendy » qui draine curieux et passionnés sur son compte Instagram. Eric Ritter détourne ses propres initiales pour inventer un label qui annonce l’urgence du changement. Ce sera Emergency Room, une marque qui parle d’équité, d’égalité, d’inclusion, de compassion. A travers le vêtement ainsi posé et proposé, la beauté et la singularité sont à la portée de tous, tous âges, toutes formes de corps, toute perception de genre confondus. Dans un Liban qui semble s’effacer en accéléré, entre l’explosion du 4 aout et l’invasion agressive de la pandémie, les créateurs tiennent à bout de bras la petite lumière au fond du tunnel et continuent à faire rayonner quelque chose de leur pays dans les grandes manifestations internationales comme les compétitions Vogue Arabia ou Fashion Trust Arabia. Eric Ritter en fait partie.

Vidéo: "Not a fashion movie" , production The Clinic Studios

Instagram : @ emergencyroombeirut

@ ericmathieuritter

 

 

 

 

 

 

 


Hoor al-Qasimi nommée directrice artistique de la Biennale de Sydney

Al-Qasimi a créé la Fondation d’art de Sharjah en 2009 et en est actuellement la présidente et la directrice. (Instagram)
Al-Qasimi a créé la Fondation d’art de Sharjah en 2009 et en est actuellement la présidente et la directrice. (Instagram)
Al-Qasimi a créé la Fondation d’art de Sharjah en 2009 et en est actuellement la présidente et la directrice. (Instagram)
Al-Qasimi a créé la Fondation d’art de Sharjah en 2009 et en est actuellement la présidente et la directrice. (Instagram)
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  • Créée en 1973, la Biennale de Sydney est l'une des expositions les plus anciennes du genre
  • Depuis 2017, Al-Qasimi préside l'Association internationale des biennales ainsi que l'Institut d’Afrique

DUBAÏ : La Biennale de Sydney a annoncé cette semaine la nomination de la commissaire d’expositions émiratie Hoor al-Qasimi au poste de directrice artistique de sa 25e édition, qui se tiendra du 7 mars au 8 juin 2026.

Créée en 1973, la Biennale de Sydney est l'une des expositions les plus anciennes du genre et s’affirme en tant que première biennale établie dans la région Asie-Pacifique.

En 2009, Al-Qasimi a créé la Fondation d'art de Sharjah, dont elle est actuellement la présidente et la directrice. Tout au long de sa carrière, elle a acquis une vaste expérience dans la conception de biennales internationales, notamment en tant que commissaire de la deuxième Biennale de Lahore en 2020 et du Pavillon des Émirats arabes unis à la 56e Biennale de Venise en 2015.

Elle a également cocuraté la sixième édition de la Biennale de Sharjah en 2003 et en assure la direction depuis.

Al-Qasimi préside l'Association internationale des biennales ainsi que l'Institut d’Afrique depuis 2017.  Elle a précédemment siégé au conseil d'administration du MoMA PS1 à New York et à celui du Ullens Center for Contemporary Arts (UCCA), à Beijing, entre autres fonctions.

Elle est également directrice artistique de la sixième Triennale d'Aichi, qui se tiendra au Japon en 2025.

 


Cannes: le conflit israélo-palestinien en filigrane

L'actrice française Leila Bekhti porte un badge en forme de pastèque palestinienne alors qu'elle arrive à la projection du film "Furiosa : A Mad Max Saga" lors de la 77e édition du Festival de Cannes à Cannes, dans le sud de la France, le 15 mai 2024. (Photo Valery Hache AFP)
L'actrice française Leila Bekhti porte un badge en forme de pastèque palestinienne alors qu'elle arrive à la projection du film "Furiosa : A Mad Max Saga" lors de la 77e édition du Festival de Cannes à Cannes, dans le sud de la France, le 15 mai 2024. (Photo Valery Hache AFP)
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  • Sur TikTok, le hashtag «blockout2024» fait florès et invite les internautes à bloquer les comptes de stars restées silencieuses sur la guerre à Gaza
  • Vendredi, une projection privée du film-témoignage monté par le gouvernement et l'armée israélienne sur les massacres du 7 octobre, «Bearing Witness», a été envisagée avant d'être annulée «pour raisons de sécurité »

CANNES, France : Un symbole palestinien ou un portrait d'otage: à l'heure où le conflit entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza embrase les campus et les réseaux sociaux, les stars présentes au 77e Festival de Cannes préfèrent afficher un soutien discret.

Ruban jaune accroché à la veste, l'acteur Philippe Torreton a gravi mardi les marches du Festival. Un symbole en soutien aux quelque 250 personnes prises en otage par le Hamas le 7 octobre.

L'actrice Leïla Bekhti, qui a récemment enregistré un message en faveur des enfants de Gaza pour l'Unicef, a arboré mercredi un pin's pastèque, l'un des symboles de la résistance palestinienne.

Des positionnements très discrets quant au conflit israélo-palestinien, au moment où sur TikTok, le hashtag «blockout2024» fait florès et invite les internautes à bloquer les comptes de stars restées silencieuses sur la guerre à Gaza. Beyoncé et Kim Kardashian figurent parmi les cibles de cette mobilisation propalestinienne et ont déjà perdu des centaines de milliers d'abonnés.

En réponse, des célébrités comme Omar Sy, membre du jury à Cannes, ont mis en ligne en début de semaine un appel au cessez-le-feu sur Instagram.

Sur le tapis rouge cannois, le message le plus fort à propos de ce conflit est venu jusqu'ici d'une survivante de l'attaque du Hamas le 7 octobre, Laura Blajman-Kadar, vêtue d'une robe jaune affichant des portraits d'otages israéliens et une écharpe noire «Bring them home» («Ramenez-les à la maison»).

Vendredi, une projection privée du film-témoignage monté par le gouvernement et l'armée israélienne sur les massacres du 7 octobre, «Bearing Witness», a été envisagée avant d'être annulée «pour raisons de sécurité, ont indiqué à l'AFP ses organisateurs.

Ce film, composé d'extraits des caméras et téléphones des assaillants du Hamas et d'images captées par des victimes et des secouristes, avait été diffusé le 14 novembre à l'Assemblée nationale en France. Des projections privées ont déjà eu lieu en marge de sommets comme Davos, selon les organisateurs.

- Haute surveillance -

Mais point de manifestation politique, ni côté public, ni côté montée des marches. Une discrétion à l'extrême, qui pourrait basculer avec la présentation vendredi à 18H00 de «La belle de Gaza», documentaire dans le milieu très fermé des femmes transgenres palestiniennes réfugiées à Tel-Aviv.

Même si le conflit israélo-palestinien, évoqué à travers la dureté des autorités pour les «clandestines» venues de Cisjordanie sans permis de travail, s'efface totalement dans ce film de Yolande Zauberman, supplanté par un autre type de conflit intime et universel.

Si aucun film palestinien n'est présent en sélection, «Vers un pays inconnu» du réalisateur danois d'origine palestinienne Mahdi Fleifel, suit deux jeunes cousins palestiniens se retrouvant en Grèce, après avoir fui un camp au Liban. Le film est présenté à la Quinzaine des cinéastes.

Au Marché du film, le plus grand au monde, le pavillon du «film arabe» a déroulé une grande banderole appelant à soutenir l'industrie des territoires occupés ou ses cinéastes en exil.

Le seul film israélien présenté cette année est le court-métrage d'Amit Vaknin, étudiante en cinéma à l'Université de Tel-Aviv. «It's no time for pop» s'attache à une jeune femme qui refuse de prendre part à des festivités patriotiques.

Le pavillon israélien a été maintenu, sous très haute surveillance, avec un filtrage sécuritaire drastique à l'entrée.

L'équipe de l'ambassade israélienne a déclaré à l'AFP avoir douté jusqu'au dernier moment du maintien de sa présence, moins d'une semaine après les manifestations monstre lors de l'Eurovision en Suède.

 


Pour sa nouvelle création, Angelin Preljocaj livre son «Requiem(s)»

Le chorégraphe et danseur français Angelin Preljocaj participe à une répétition de sa chorégraphie, le ballet «Le lac des cygnes» du compositeur russe Tchaïkovski, avec les danseurs du «Ballet Preljocaj», au Théâtre de l'Archeveche à Aix-en-Provence, dans le sud de la France, le 23 juillet 2020. (Clement Mahoudeau AFP)
Le chorégraphe et danseur français Angelin Preljocaj participe à une répétition de sa chorégraphie, le ballet «Le lac des cygnes» du compositeur russe Tchaïkovski, avec les danseurs du «Ballet Preljocaj», au Théâtre de l'Archeveche à Aix-en-Provence, dans le sud de la France, le 23 juillet 2020. (Clement Mahoudeau AFP)
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  • Dans la salle du Grand Théâtre de Provence d'Aix, 300 personnes ont assisté à la répétition générale, la veille de la première, et les deux premières dates de «Requiem(s)» étaient annoncées complètes
  • Cette mosaïque d'émotions jaillit aussi de la musique qui accompagne les 19 danseurs, avec des ruptures aussi rapides qu'un claquement de doigts, passant brutalement du +Lacrimosa+ du requiem de Mozart à une chanson de métal

AIX-EN-PROVENCE, France : De la tristesse, de la rage parfois mais aussi des moments de joie, le chorégraphe français Angelin Preljocaj présente ce week-end à Aix-en-Provence, en première mondiale, «Requiem(s)», un spectacle autour de toutes les facettes de la mort et du deuil.

«C'est un thème magnifique et puis l'année 2023 était une année assez dure pour moi personnellement. J'ai perdu beaucoup d'amis, mes parents aussi. Je me suis dit que c'était peut-être le moment de faire un requiem», confie M. Preljocaj à l'AFP.

Basé avec son ballet à Aix-en-Provence, dans le sud de la France, au Pavillon noir, le chorégraphe d'origine albanaise est connu notamment pour ses ballets «Le Parc» et «Blanche-Neige», et ses collaborations fréquentes avec des artistes issus de la musique électro comme Air, le DJ Laurent Garnier et les Daft Punk.

Dans la salle du Grand Théâtre de Provence d'Aix, 300 personnes ont assisté à la répétition générale, la veille de la première, et les deux premières dates de «Requiem(s)» étaient annoncées complètes.

Pour ce spectacle, Angelin Preljocaj dit s'être longuement documenté, allant piocher des références entre autres chez le sociologue Émile Durkheim, qui expliquait que les hommes ont fait société quand ils ont commencé à donner une cérémonie pour leurs morts.

Les facettes de ce cérémonial ressortent tout au long du ballet, tantôt langoureux, tantôt très rythmé, parfois complètement frénétique, les danseurs jouant avec les différentes émotions liées au deuil.

«Ce n'est pas toujours triste, il y a beaucoup de joie dans le spectacle aussi, de la rage parfois, de la mélancolie», énumère le chorégraphe.

- De Mozart au métal -

Cette mosaïque d'émotions jaillit aussi de la musique qui accompagne les 19 danseurs, avec des ruptures aussi rapides qu'un claquement de doigts, passant brutalement du +Lacrimosa+ du requiem de Mozart à une chanson de métal.

«Les musiques m'apportaient des nuances d'émotions différentes et j'avais envie de travailler avec ces choses-là, par exemple les cantates de Bach (1685-1750), Ligeti (1923-2006), Mozart (1756-1791)... et du métal. Je me suis beaucoup amusé avec ça», sourit Angelin Preljocaj.

Des décors aux costumes en passant par la lumière, les danseurs se retrouvent plongés dans une bichromie noire et blanche pudique, seulement troublée par quelques très rares touches de rouge.

Après une heure trente de danse, le public a applaudi de longues minutes.

«Un spectacle, c'est comme une photographie qu'on met dans le révélateur; le révélateur c'est le public, et ce soir c'était très très chaleureux», souffle le chorégraphe à l'issue de la générale.

Après les deux dates inaugurales au Grand Théâtre de Provence vendredi et samedi, une tournée à Paris et dans plusieurs autres villes de France, le spectacle reviendra au mois d'octobre à Aix puis sera joué le 4 décembre à Modène (Italie) puis en 2025 à Athènes, Madrid et Fribourg (Suisse).