Quels risques pour le Proche-Orient après le double assassinat de Haniyeh et Chokr?

Vu sur un mur de Beyrouth: Le Liban veut la paix, contrairement à Israël. (AFP)
Vu sur un mur de Beyrouth: Le Liban veut la paix, contrairement à Israël. (AFP)
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Publié le Samedi 03 août 2024

Quels risques pour le Proche-Orient après le double assassinat de Haniyeh et Chokr?

  • L’élimination successive de Chokr et ensuite la décapitation du Hamas donne le sentiment qu’une flambée générale sur tous les fronts faisant partie de l’axe iranien, menace la région
  • La réalité est plus nuancée, selon nombre de chercheurs français spécialistes de la région, dont la vice-présidente de l’institut de recherche « iReMMO » Agnès Levallois

PARIS: A travers deux opérations quasi simultanées, et à moins de douze heures d’intervalles, Israël a frappé deux gros coups, faisant planer sur le Proche-Orient la menace d’un embrasement généralisé.

La première opération, survenue mardi soir dans la banlieue sud de Beyrouth, aboutit à l’élimination du haut commandant militaire du Hezbollah Fouad Chokr.

La deuxième survenue à une heure tardive de la nuit à Téhéran a visé le leader du mouvement Hamas, Ismail Haniyeh.

Sur fond de guerre qui se prolonge depuis plus de neuf mois à Gaza, avec son lot quotidien de victimes et de destructions, ces deux événements ont secoué les chancelleries à travers le monde, et plongé les habitants des pays de la région dans l’appréhension et l’angoisse.

L’élimination successive de Chokr et ensuite la décapitation du Hamas, en la personne de Haniyeh qui menait lui-même les négociations pour une cessez-le-feu à Gaza donne le sentiment qu’une flambée générale sur tous les fronts faisant partie de l’axe iranien, menace la région.

Suite à ce double assasinat, l’Iran et ses alliées se retrouvent acculés à riposter et c’est la nature de cette riposte qui déterminera la suite des événements, et là les scénarios sont multiples

L’Iran acculé à riposter?

La réalité est plus nuancée, selon nombre de chercheurs français spécialistes de la région, dont la vice-présidente de l’Institut de recherche « iReMMO » Agnès Levallois, qui indique à Arab News en français que ces deux événements font entrer le conflit dans une nouvelle phase, délicate et compliquée. 

« Jusque-là j’étais dans l’idée qu’il n’y avait pas de volonté d’embrasement régional et que toutes les parties prenantes et en particulier les Américains et les Iraniens ne veulent pas d’un embrasement », affirme-t-elle.

Cependant suite au double assasinat, l’Iran et ses alliées se retrouvent acculés à riposter et c’est la nature de cette riposte qui déterminera la suite des événements, et là les scénarios sont multiples.

L’un de ces scénarios, selon Levallois, « consiste à faire réagir en même temps l’Iran, le Hezbollah, les Houthis du Yémen et tout cet axe dans le cadre d’une riposte plutôt calibrée et bien ciblée », tout en évitant de heurter de front les Américains.

« Si on est réellement dans cette logique, on peut encore éviter l’embrasement régional, puisque ça permettra à Netanyahu de considérer qu’il a gagné avec l’élimination de Haniyeh et Chokr, et il pourra présenter cela comme une victoire à son opinion publique » affirme Levallois.

« Ce sera le moins pire des scénarios », mais sinon les Iraniens « peuvent opter pour une réaction beaucoup plus forte en disant: maintenant il faut y aller et là, il sera impossible de prévoir où cela mènera ».

Cependant estime-t-elle, « il me semble que l’Iran ne souhaite pas une guerre régionale car il sait qu’il a beaucoup à perdre dans le cadre d’un tel cas ».

Pour le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu « c’est sa survie qui est en jeu » et le fait d’élargir la confrontation pourrait à un certain moment obligé l’Iran à « réagir au-delà de ce qu’il aimerait faire».

Israël et la logique de l’embrasement

De plus assure-t-elle, dans la configuration actuelle, « l’Iran n’est pas en position de force par rapport à Israël, il peut mener des opérations ponctuelles avec des capacités de nuisances évidentes, mais de là à initier un embrasement régional cela ne me paraît absolument pas souhaitable du point de vue iranien ».

Toutefois souligne Levallois, « je ne dirai pas la même chose d’Israël qui est, semble-t-il beaucoup plus dans une logique d’embrasement pour plusieurs raisons ».

Pour le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu « c’est sa survie qui est en jeu » et le fait d’élargir la confrontation pourrait à un certain moment obligé l’Iran à « réagir au-delà de ce qu’il aimerait faire» et ce afin de préserver sa crédibilité et pour maintenir sa position de puissance régionale.

Un glissement de l’Iran vers une confrontation plus large estime la chercheuse « ne peut être que bénéfique pour Israël parce que ça peut permettre de resserrer les rangs des occidentaux autour de l’Etat israélien alors qu’en ce moment, certains pays estiment que Netanyahu va bien loin dans ses actions ».

En attendant la suite des évènements, Levallois considère « qu’il Il y a toujours moyen de retrouver le chemin de la raison et de l’apaisement, ce n’est pas très compliqué, mais la question est de savoir si les acteurs sur le terrain souhaitent cela aujourd’hui ? Est-ce qu' Israël souhaite cela ? On voit bien que non... »

« L’aspect un peu raisonnable qu’on puisse attendre est mis à mal par le contexte électoral américain » souligne t-elle, les Etats-Unis « vivent une période de flottement en raison de la campagne présidentielle et le risque est donc grand de voir le Premier ministre israélien profiter de ce flottement ».

C’est d’ailleurs la logique que suit Netanyahu, sachant que le président américain « est très limité dans ses pressions sur Israël », alors que la future candidate démocrate à la présidentielle Kamala Harris est « plus déterminée, mais elle est en période électorale ». Benjamin Netanyahu cherche donc « à profiter des quelques mois qui viennent et qui sont à mon avis extrêmement dangereux ».

« Tout va se jouer durant la période qui précède les élections américaines », car pour les israéliens, affirme Levallois, « c’est vraiment la fenêtre de tir, d’ailleurs c’est bien pour ça que Netanyahu avait dit que ce conflit allait durer des mois ».

Ainsi donc en plus des interrogations sur la nature de la riposte iranienne, « la grande question » concerne l’acteur israélien « avec l’extrême droite qui prend de plus en plus de poids et d’importance au sein du système israélien et sous la pression de cette extrême-droite, Netanyahu va de plus en plus loin » dans ses actions.

Par ailleurs, la majorité de la population israélienne soutient la guerre à Gaza de même que la volonté d’en finir avec le Hezbollah au Liban, et au milieu de tout ça il y a les familles des otages qui se rendent compte que l’espoir d’un règlement pour obtenir leur libération s’éloigne tous les jours un peu plus.


Le chef de la diplomatie syrienne félicite la Turquie pour son «accord» avec le PKK

Le ministre des Affaires étrangères syrien, Assaad al-Chaibani, a félicité lundi la Turquie pour "l'accord" avec le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) en vertu duquel il a décidé de se dissoudre, saluant un "moment charnière" pour la stabilité de la région. (AFP)
Le ministre des Affaires étrangères syrien, Assaad al-Chaibani, a félicité lundi la Turquie pour "l'accord" avec le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) en vertu duquel il a décidé de se dissoudre, saluant un "moment charnière" pour la stabilité de la région. (AFP)
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  • Le ministre des Affaires étrangères syrien, Assaad al-Chaibani, a félicité lundi la Turquie pour "l'accord" avec le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) en vertu duquel il a décidé de se dissoudre
  • "Au nom de la République arabe syrienne, je félicite le gouvernement turc et son peuple pour le récent accord avec le PKK"

ANKARA: Le ministre des Affaires étrangères syrien, Assaad al-Chaibani, a félicité lundi la Turquie pour "l'accord" avec le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) en vertu duquel il a décidé de se dissoudre, saluant un "moment charnière" pour la stabilité de la région.

"Au nom de la République arabe syrienne, je félicite le gouvernement turc et son peuple pour le récent accord avec le PKK", a déclaré M. Chaibani lors d’une conférence de presse conjointe avec ses homologues turc et jordanien à Ankara, estimant que "cette étape représente un moment charnière non seulement pour la sécurité intérieure de la Turquie, mais aussi pour la stabilité de notre région dans son ensemble".

 


Huit décennies de coopération stratégique entre l’Arabie saoudite et les États-Unis

Le 14 février 1945, alors que la Seconde Guerre mondiale touche à sa fin, le président Franklin D. Roosevelt rencontre le roi Abdelaziz à bord de l'USS Quincy dans le Grand Lac Amer en Égypte, à la suite de la conférence de Yalta. Cette rencontre a marqué un tournant historique. Roosevelt demande l'avis du roi Abdelaziz sur la question des réfugiés juifs d'Europe et considère l'Arabie saoudite comme un acteur clé dans l'élaboration de l'ordre d'après-guerre. (Ministère des Affaires étrangères)
Le 14 février 1945, alors que la Seconde Guerre mondiale touche à sa fin, le président Franklin D. Roosevelt rencontre le roi Abdelaziz à bord de l'USS Quincy dans le Grand Lac Amer en Égypte, à la suite de la conférence de Yalta. Cette rencontre a marqué un tournant historique. Roosevelt demande l'avis du roi Abdelaziz sur la question des réfugiés juifs d'Europe et considère l'Arabie saoudite comme un acteur clé dans l'élaboration de l'ordre d'après-guerre. (Ministère des Affaires étrangères)
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  • Ce n’est pas un hasard si le président Donald Trump a choisi l’Arabie saoudite comme première étape de son premier voyage officiel à l’étranger durant son mandat
  • Depuis 1974, six présidents américains ont effectué des visites officielles en Arabie saoudite, preuve de l’importance stratégique continue du Royaume en tant que pôle de stabilité dans une région souvent marquée par des tensions

RIYAD: Au cours des huit dernières décennies, les relations entre l’Arabie saoudite et les États-Unis se sont progressivement transformées en un partenariat riche et diversifié, couvrant des domaines clés tels que la défense, le commerce, l’éducation, le tourisme, et bien d’autres. Cette relation s'appuie sur des liens solides à tous les niveaux – des responsables politiques jusqu'aux citoyens ordinaires.

Ce n’est pas un hasard si le président Donald Trump a choisi l’Arabie saoudite, aux côtés des Émirats arabes unis et du Qatar, comme première étape de son premier voyage officiel à l’étranger durant son mandat.

trump
Sur cette photo prise le 20 mai 2017, on voit le roi Salmane d’Arabie saoudite (à droite) accueillir le président américain Donald Trump (au centre), accompagné de la première dame Melania Trump, à leur arrivée pour une réception précédant un banquet au palais de Murabba à Riyad. (Palais royal saoudien/AFP)

Depuis 1974, six présidents américains ont effectué des visites officielles en Arabie saoudite, preuve de l’importance stratégique continue du Royaume en tant que pôle de stabilité dans une région souvent marquée par des tensions.

«Aujourd'hui, les relations américano-saoudiennes sont plus fortes que jamais, renforcées par les interactions à tous les niveaux entre nos deux pays, des responsables gouvernementaux aux citoyens ordinaires», a écrit Michael A. Ratney, le dernier ambassadeur des États-Unis en Arabie saoudite, dans une tribune publiée par Arab News le 22 septembre de l'année dernière.

Il a ajouté: «Cette force est palpable dans notre vaste coopération, qu'il s'agisse de sécurité, de commerce, de culture ou de nos efforts conjoints pour résoudre les conflits régionaux au Soudan, au Yémen et ailleurs.»

De la première coopération en matière de défense et d'énergie à la collaboration moderne dans les domaines de l'éducation, de la technologie, du tourisme et des arts, les relations bilatérales se sont approfondies au fil du temps, au gré des événements régionaux, des bouleversements mondiaux et des intérêts communs.

arabie saoudite
De la rencontre historique de 1945 entre le président Roosevelt et le roi Abdelaziz à la nouvelle ère de coopération dans le domaine de la haute technologie, les liens entre l'Arabie saoudite et les États-Unis ont résisté aux guerres, aux mutations économiques et aux changements politiques. Leur partenariat reste un point d'ancrage essentiel pour la stabilité mondiale. (AFP)

L'éducation est restée une pierre angulaire, notamment grâce au programme de bourses du roi Abdallah, qui a envoyé des milliers d'étudiants saoudiens aux États-Unis. Des étudiants américains sont également venus en Arabie saoudite grâce à l'université islamique de Médine et à des initiatives d'échange telles que le programme Fulbright et des partenariats tels que celui conclu entre l'université d'État de l'Arizona et le ministère saoudien de l'Éducation.

Ces dernières années, l'initiative Vision 2030 a insufflé un nouveau dynamisme à la collaboration entre l'Arabie saoudite et les États-Unis, ouvrant la voie à l'échange de connaissances et attirant des milliards de dollars d'investissements mutuels.

arabie saoudite
Une photo prise dans la ville côtière saoudienne de Djeddah, sur la mer Rouge, le 14 juillet 2022, avant une visite du président américain Donald Trump, montre des hôtes s'adressant à des invités lors d'une présentation de l'Initiative verte saoudienne, qui comprend également des objectifs de plantation d'arbres et de réduction des émissions. (AFP)

Comme les États-Unis, l'Arabie saoudite est une nation d'innovation, qui valorise l'esprit d'entreprise et le progrès technologique. Nombreux sont ceux qui font remonter l'élan des relations à la visite de Trump en 2017 ou à l'initiative Vision 2030. Mais les fondations ont été posées des décennies plus tôt.

Les racines remontent aux années 1940, après l'unification du Royaume par le roi Abdelaziz al-Saoud – alors connu en Occident sous le nom d'Ibn Saoud – qui a réuni les tribus de Najd et de Hijaz en 1932 pour former l'Arabie saoudite.

Le 14 février 1945, alors que la Seconde Guerre mondiale touchait à sa fin, le président Franklin D. Roosevelt a rencontré le roi Abdelaziz à bord de l'USS Quincy dans le Grand Lac Amer en Égypte, à la suite de la conférence de Yalta. Cette rencontre a marqué un tournant historique. Roosevelt demande l'avis du roi Abdelaziz sur la question des réfugiés juifs d'Europe et considère l'Arabie saoudite comme un acteur clé dans l'élaboration de l'ordre d'après-guerre.

Roosevelt avait compris que, même si la Seconde Guerre mondiale approchait de sa fin, un nouvel ordre mondial se dessinait déjà en toile de fond – et que l’Arabie saoudite serait un partenaire stratégique incontournable pour les États-Unis. Le président américain et le roi Abdelaziz ont noué une relation fondée sur un respect mutuel. En témoignage de cette amitié naissante, Roosevelt offrit au souverain saoudien un avion de ligne DC-3, bientôt suivi de deux autres, un geste symbolique qui contribua à la création de la compagnie aérienne nationale Saudia .

Roosevelt est décédé deux mois après cette rencontre historique, connue sous le nom de «Pacte du Quincy», qui posa les fondations d’une alliance durable. En 1953, les deux pays scellèrent officiellement leur coopération militaire en signant un accord d’assistance mutuelle en matière de défense.


Libération attendue d'un otage à Gaza: ni cessez-le-feu, ni libération de prisonniers palestiniens 

A l'issue de discussions avec des représentants américains sur une trêve à Gaza, le mouvement islamiste palestinien Hamas a annoncé dimanche qu'il allait libérer l'otage israélo-américain Edan Alexander retenu dans le territoire palestinien depuis les attaques du 7 octobre 2023. (AFP)
A l'issue de discussions avec des représentants américains sur une trêve à Gaza, le mouvement islamiste palestinien Hamas a annoncé dimanche qu'il allait libérer l'otage israélo-américain Edan Alexander retenu dans le territoire palestinien depuis les attaques du 7 octobre 2023. (AFP)
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  • Dans un communiqué de ses services, M. Netanyahu a au contraire répété que les négociations en vue d'un accord pour obtenir la libération de tous les otages encore retenus à Gaza se feraient "sous le feu"
  • A l'issue de discussions avec des représentants américains sur une trêve à Gaza, le mouvement islamiste palestinien Hamas a annoncé dimanche qu'il allait libérer l'otage israélo-américain Edan Alexander

JERUSALEM: Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a affirmé lundi que la libération d'un otage israélo-américain annoncée par le Hamas ne donnerait lieu ni à un cessez-le-feu dans la bande de Gaza ni à une libération de prisonniers palestiniens.

Dans un communiqué de ses services, M. Netanyahu a au contraire répété que les négociations en vue d'un accord pour obtenir la libération de tous les otages encore retenus à Gaza se feraient "sous le feu" et que son pays se préparait toujours à "une intensification des combats".

A l'issue de discussions avec des représentants américains sur une trêve à Gaza, le mouvement islamiste palestinien Hamas a annoncé dimanche qu'il allait libérer l'otage israélo-américain Edan Alexander retenu dans le territoire palestinien depuis les attaques du 7 octobre 2023.

Aucune date n'a été fournie, mais la famille de l'otage a indiqué dimanche avoir été informée que la libération d'Edan Alexander, 21 ans, était attendue "dans les prochains jours".

"Israël ne s'est engagé à aucun cessez-le-feu ni à la libération de terroristes (prisonniers palestiniens qu'il détient, ndlr), mais uniquement à un couloir sécurisé permettant la libération d'Edan", a déclaré M. Netanyahu.

Selon lui, la libération attendue du seul otage vivant ayant la nationalité américaine a été rendue possible grâce à la "pression militaire" israélienne dans la bande de Gaza.

"Nous sommes au coeur de jours décisifs, au cours desquels une proposition a été présentée au Hamas permettant la libération de nos otages. Les négociations se poursuivront sous le feu, parallèlement aux préparatifs en vue d'une intensification des combats", a ajouté le chef du gouvernement israélien.

Sur les 251 personnes enlevées en Israël lors des attaques sans précédent perpétrées par le Hamas le 7 octobre 2023, 58 sont encore retenues à Gaza, dont 34 déclarées mortes par l'armée israélienne.