La fragmentation des nations arabes

Il ne fait aucun doute que des fractures historiques continuent de saigner et que la coexistence, l’acceptation de l’autre ainsi que le rejet de la haine et du sectarisme nécessitent encore des efforts institutionnels plus soutenu. (AFP).
Il ne fait aucun doute que des fractures historiques continuent de saigner et que la coexistence, l’acceptation de l’autre ainsi que le rejet de la haine et du sectarisme nécessitent encore des efforts institutionnels plus soutenu. (AFP).
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Publié le Vendredi 03 mai 2024

La fragmentation des nations arabes

La fragmentation des nations arabes
  • La cohésion sociale est le tissu solide qui lie les membres de la société, unit leurs cœurs et les incite à travailler pour le bien commun
  • Si les divisions sociétales ne sont pas sérieusement abordées, leur persistance peut menacer les fondements de l’État-nation et saper la stabilité et la paix dans le monde

Dans un monde en proie à des tempêtes de changements et de conflits, lorsque nous voyons et vivons la fragmentation interne des nations arabes et que les gens s’entre-déchirent quotidiennement, nous prenons conscience de l’importance de la cohésion sociale et de l’unité nationale. Ces deux forces constituent une base solide pour la construction d’une société prospère, d’un État fort et d’un peuple uni pour faire face aux défis.

La cohésion sociale est le tissu solide qui lie les membres de la société, unit leurs cœurs et les incite à travailler pour le bien commun. L’unité nationale, quant à elle, représente un profond sentiment d’appartenance à la nation, un engagement envers ses valeurs et ses principes ainsi qu’un sentiment de responsabilité pour son progrès et sa prospérité.

La cohésion sociale et l’unité nationale sont des forces indispensables pour surmonter les défis auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui. Face à l’extrémisme qui répand son poison par des discours de haine et face aux divisions qui sont fomentées à des fins politiques, nos peuples risquent de se désintégrer.

Les divisions que nous observons et suivons avec préoccupation et intérêt entre les membres d’un même peuple et d’une même nation ne sont pas un phénomène temporaire ou historiquement accidentel sur la scène politique générale ou au niveau de l’individu.

Elles se sont plutôt intensifiées dans de nombreux pays arabes, où les organisations terroristes extrémistes et les États qui les soutiennent, ainsi que les puissances régionales expansionnistes, ont alimenté des facteurs de fragmentation sociale. Ces derniers ont fait basculer certaines nations dans des conflits sectaires et ethniques, tandis que d’autres sont presque tombées dans le piège de la guerre de religion.

Il ne fait aucun doute que des fractures historiques continuent de saigner et que la coexistence, l’acceptation de l’autre ainsi que le rejet de la haine et du sectarisme nécessitent encore des efforts institutionnels plus soutenus pour approfondir leurs racines, les ancrer et les transmettre d’une génération à l’autre.

Comprendre l’histoire des conflits entre les cultures et les sociétés aide à reconnaître les causes des divisions actuelles et à trouver des solutions appropriées. En même temps, les dirigeants politiques et la communauté internationale doivent surmonter ces divisions historiques et œuvrer en faveur d’une culture de tolérance et de coexistence entre les cultures et les religions.

Si les divisions sociétales ne sont pas sérieusement abordées, leur persistance peut menacer les fondements de l’État-nation et saper la stabilité ainsi que la paix dans le monde. La persistance de conflits internes dans certains pays pourrait conduire à la propagation du chaos et du radicalisme, ce qui aurait un impact négatif sur la stabilité régionale et internationale.

Il est honteux et embarrassant que notre région arabe souffre de cette fragmentation interne et de ces luttes de pouvoir quotidiennes. Ces pays arabes ont peut-être besoin de dirigeants qui ont une vision consciente de l’avenir de leurs peuples.

Nous pensons que la communauté internationale doit travailler de manière solidaire pour résoudre cette crise qui s’aggrave et trouver des solutions globales et efficaces. Ces solutions pourraient inclure la promotion du développement durable, de la justice sociale et de la lutte contre la corruption, ainsi que le renforcement du rôle des institutions éducatives et culturelles dans la promotion d’une culture de tolérance et de coexistence.

Les divisions sociales ne sont pas une maladie propre à chaque pays, mais un fléau mondial. L’une des principales solutions pour les surmonter consiste à lutter contre toutes les formes et pratiques de haine, de sectarisme, de rejet des autres et de discrimination fondée sur la religion, la couleur de peau, l’appartenance ethnique ou le sexe au moyen d’instruments et de mécanismes juridiques plus stricts.

Il est encore plus important de freiner ou d’éradiquer tous les courants extrémistes qui alimentent les divisions, provoquent l’hostilité et la haine et les nourrissent comme un terreau propice à leur développement.

Si nous ne le faisons pas, nous sacrifierons et saperons les fondements de l’État-nation dans le monde entier. Cela pourrait signifier une perte profonde de l’une des principales réalisations sur la voie de la paix et de la sécurité mondiales depuis que l’État-nation est devenu la base de la stabilité et de l’entente mondiale sur la sécurité internationale par le biais des Nations unies et d’autres institutions.

Surmonter les divisions sociétales exige des efforts globaux et une coopération transfrontalière.

Nous devons tirer les leçons de l’histoire et de ce qui se passe aujourd’hui, travailler ensemble pour changer les mentalités rigides et construire des sociétés plus cohésives et plus tolérantes. Nous devons reconnaître que, au bout du compte, l’unité et la solidarité sont le seul moyen de parvenir à un monde stable et pacifique.

Salem AlKetbi est un politologue émirati et ancien candidat au Conseil national fédéral.

X: @salemalketbieng

NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com