Moins de lois, plus de décrets: Macron irrite le Parlement

En renouvelant son vœu de légiférer par voie règlementaire plutôt que législative, Emmanuel Macron s'est attiré les foudres des oppositions, notamment de la droite échaudée de voir la réforme de l'Aide médicale d’État pour les étrangers échapper à ses amendements. (AFP)
En renouvelant son vœu de légiférer par voie règlementaire plutôt que législative, Emmanuel Macron s'est attiré les foudres des oppositions, notamment de la droite échaudée de voir la réforme de l'Aide médicale d’État pour les étrangers échapper à ses amendements. (AFP)
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Publié le Vendredi 02 février 2024

Moins de lois, plus de décrets: Macron irrite le Parlement

  • Ce n'est pas la première fois que le président prône une forme de parlementarisme rationalisé, dans un contexte de majorité relative à l'Assemblée
  • «L'Assemblée nationale comme le Sénat vont être dépourvues de leurs prérogatives. La moindre des choses c'est qu'on soit éclairé sur des réformes importantes», a dénoncé Fabien Roussel

PARIS: En renouvelant son vœu de légiférer par voie règlementaire plutôt que législative, Emmanuel Macron s'est attiré les foudres des oppositions, notamment de la droite échaudée de voir la réforme de l'Aide médicale d’État pour les étrangers échapper à ses amendements.

"On va arrêter de faire des lois", aurait confié le chef de l’État lors d'un conseil des ministres mi-janvier, selon Le Parisien, une formule confirmée par une source au sein de la majorité. "C'est dans l'esprit de faire moins de loi, on ne peut pas arrêter totalement", tempère un proche.

De fait, devant les parlementaires de la majorité, Emmanuel Macron avait bien cité des pistes législatives sur l'énergie, le logement ou encore la fonction publique, tout en jugeant "plus que préférables" d'autres chemins dont la "voie réglementaire" lorsque c'est possible.

"C'est le retour du pire du présidentialisme", attaque Arthur Delaporte (PS), qui craint un recul de droits sociaux, sur l'assurance-chômage notamment, dans le dos du Parlement, "qui est la caisse de résonance du corps social".

Ce n'est pas la première fois que le président prône une forme de parlementarisme rationalisé, dans un contexte de majorité relative à l'Assemblée. Mais ses déclarations rapportées donnent des munitions à ses adversaires.

"Je n'ose imaginer ce qu'il en aurait été si ça avait été moi qui avait tenu ce type de propos", s'est plu à souligner mardi devant la presse Marine Le Pen (RN).

«Trahison»

Une annonce du Premier ministre Gabriel Attal à l'occasion de sa déclaration de politique générale, mardi, reste en travers de la gorge de toutes les oppositions: l'Aide médicale d’État pour les sans-papiers sera réformée par décret.

En décembre, l'ancienne cheffe du gouvernement, Élisabeth Borne, avait promis une réforme "par voie règlementaire ou législative", assurant que les parlementaires seraient "pleinement associés à ces travaux". Le président des Républicains, Éric Ciotti, a dénoncé une "trahison de la parole donnée".

À gauche, les opposants à une réforme de l'AME ne décolèrent pas non plus. "L'Assemblée nationale comme le Sénat vont être dépourvues de leurs prérogatives. La moindre des choses c'est qu'on soit éclairé sur des réformes importantes", a dénoncé le patron du PCF Fabien Roussel.

Gabriel Attal, qui affrontera lundi une motion de censure déposée par la gauche, a bien annoncé dans sa déclaration de politique générale plusieurs textes à venir devant le Parlement: sur Mayotte, l'industrie verte, ou pour déverrouiller l'économie. Et rappelé des chantiers législatifs en cours sur les prix de l'électricité, la Nouvelle-Calédonie, ou la fin de vie.

Mais à ce stade le calendrier de l'Assemblée, en ce qui concerne les initiatives gouvernementales, est loin de ressembler au champ de bataille parlementaire de l'an dernier, marqué par la réforme des retraites ou la loi immigration.

«Clés du camion»

Seul un texte du gouvernement, pour lutter contre les dérives sectaires, est au programme pour l'instant. La loi sur l'agriculture, toujours attendue, est suspendue le temps de lui donner l'épaisseur nécessaire pour répondre à la colère de la profession.

Le fait que le calendrier parlementaire soit allégé suscite des avis partagés dans la majorité.

"On le demande depuis le début de cette législature. Cela peut nous dégager du temps pour contrôler l'action du gouvernement (...) et l'application de la loi. Action qui doit se faire principalement sur le terrain", souligne Olga Givernet (Renaissance).

Mais "on n'empêchera jamais un parlementaire de déposer des propositions de loi, de mettre au débat des sujets", relativise un cadre.

S'il appelle à "un grand texte sur le logement", et "sur l'offre de soins", Mathieu Lefèvre (Renaissance), juge qu'il ne "faut pas avoir de tabou". "Si c'est efficace, si ça permet de foncer et d'être utiles aux Français, il faut y aller", y compris par décret, plaide-t-il.

Un autre cadre, soucieux de bousculer quand il faut le chef de l'État, appelle à ne pas se contenter de "dire que tout ce qu'il fait est formidable. Sinon on n'a plus qu'à rentrer chez nous et lui laisser les clés du camion".


« Attentat terroriste » en France : un mort, le ministre de l'Intérieur blâme l'Algérie sur l'immigration

La police scientifique française travaille sur le site d'une attaque au couteau où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux policiers à Mulhouse, dans l'est de la France, le 22 février 2025. (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
La police scientifique française travaille sur le site d'une attaque au couteau où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux policiers à Mulhouse, dans l'est de la France, le 22 février 2025. (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
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  • dans l'est de la France, un homme de 37 ans, fiché pour risque de « terrorisme », a tué une personne et blessé au moins trois policiers à l'arme blanche.
  • Selon le président Emmanuel Macron, il s'agit d'un « acte de terrorisme », tandis que le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a mis en cause la non-coopération de l'Algérie sur l'immigration.

MULHOUSE, FRANCE : Samedi, dans l'est de la France, un homme de 37 ans, fiché pour risque de « terrorisme », a tué une personne et blessé au moins trois policiers à l'arme blanche. Selon le président Emmanuel Macron, il s'agit d'un « acte de terrorisme », tandis que le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a mis en cause la non-coopération de l'Algérie sur l'immigration.

Selon des témoignages concordants obtenus par l'AFP, l'assaillant a crié « Allah u Akbar » (« Dieu est le plus grand » en arabe) à plusieurs reprises samedi, lors de l'attaque menée dans la ville de Mulhouse, ainsi que lors de son interpellation par les forces de l'ordre.

Selon le parquet de Mulhouse, l'assaillant a agressé les victimes avec un couteau, blessant notamment un Portugais de 69 ans qui est décédé.

Deux policiers municipaux ont été grièvement blessés, l'un à la carotide et l'autre au thorax, a affirmé à l'AFP le procureur de Mulhouse Nicolas Heitz. Si le second a pu sortir de l'hôpital, le premier doit être transféré dimanche au centre hospitalier de Colmar, à environ 40 kilomètres de Mulhouse. Trois autres policiers municipaux auraient été plus légèrement atteints, a précisé le procureur.

En déplacement au Salon de l'agriculture à Paris, Emmanuel Macron a dénoncé un « acte de terrorisme islamiste » qui ne fait pas de doute.

Nicolas Heitz a déclaré que le suspect était inscrit au fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste.

Interrogé sur la chaîne TF1, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a indiqué que le suspect faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et accusé l'Algérie de l'avoir refusé à dix reprises.

« Une fois de plus, c'est le terrorisme islamiste qui a frappé. Et, une fois de plus, j'ajoute que ce sont les désordres migratoires qui sont aussi à l'origine de cet acte terroriste », a-t-il lancé.

Devant l'hôtel de police de Mulhouse, où il a rendu hommage au sang-froid des policiers, M. Retailleau a précisé que le suspect présentait également « un profil schizophrène » et que son acte présentait « une dimension psychiatrique ».

Selon des sources syndicales, le suspect était placé sous contrôle judiciaire avec assignation à résidence.

Les faits se sont déroulés à 15 h 40 (14 h 40 GMT), près d'un marché très animé du quartier populaire.

L'homme a d'abord blessé grièvement des agents de stationnement, puis un sexagénaire portugais, mortellement atteint d'un coup de couteau.

« Nous ne savons pas s'il s'est trouvé par hasard sur son chemin ou s'il a fait un acte de bravoure en s'interposant », a indiqué le ministre.

L'assaillant a ensuite été poursuivi par des policiers municipaux qui sont parvenus à le maîtriser sans faire usage d'armes à feu.

À la nuit tombée, plusieurs membres de la police scientifique s'affairaient encore à la lueur d'un projecteur sur la dalle située à l'extérieur du marché couvert. Le périmètre était gardé par des militaires.

« Le fanatisme a encore frappé et nous sommes en deuil », a réagi le Premier ministre centriste François Bayrou, qui a adressé ses « félicitations aux forces de l'ordre pour leur intervention rapide ».

« L'horreur vient de saisir notre ville », a déploré la maire de Mulhouse, Michèle Lutz, sur Facebook.

En janvier, un homme de 32 ans avait blessé une personne au couteau dans un supermarché d'Apt, dans le sud de la France, en criant « Allah Akbar ». Il a été inculpé et écroué pour tentative d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste.

Fin janvier, le procureur antiterroriste, Olivier Christen, avait souligné que « l'absence d'actes terroristes mortels en France en 2024 ne reflète pas une diminution du risque terroriste », rappelant que neuf attentats ont été déjoués l'an dernier sur le territoire français.


Plusieurs centaines de personnes ont manifesté lors d'un rassemblement antifasciste à Paris

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  • Plusieurs centaines de personnes étaient rassemblées samedi après-midi à Paris contre le fascisme, après l'agression d'un homme à l'arme blanche devant une association culturelle turque la semaine passée.
  • « Nous sommes là car nous avons été attaqués. Nous sommes là pour montrer que Paris n'est pas à eux. Nous continuerons la lutte antifasciste et révolutionnaire », a lancé au micro un leader de Young Struggle.

PARIS : Plusieurs centaines de personnes étaient rassemblées samedi après-midi à Paris contre le fascisme, après l'agression d'un homme à l'arme blanche devant une association culturelle turque la semaine passée, pour laquelle six membres de l'ultradroite ont été inculpés, a constaté un journaliste de l'AFP.

« Paris, Paris, Antifa ! », « Pas de quartier pour les fachos, pas de fachos dans nos quartiers », « Nous sommes tous antifascistes », ont scandé les manifestants réunis place de la République. Un drapeau rouge « No pasaran » a été accroché sur un flanc de la statue, au centre de la place emblématique.

Ce rassemblement se tient six jours après l'agression à l'arme blanche d'un homme membre du collectif Young Struggle, qui se présente comme une « organisation de jeunesse socialiste » et adhérent au syndicat CGT. Il avait dû être hospitalisé quelques heures.

Dimanche dernier, « une vingtaine de personnes » appartenant à la mouvance d'ultradroite, « cagoulées et munies de tessons de bouteille » selon la préfecture de police, avaient pénétré dans la cour d'un immeuble où se situe une association culturelle de travailleurs immigrés de Turquie et agressé une personne avant de prendre la fuite.

Six jeunes hommes ont été inculpés pour violences volontaires aggravées. L'un d'eux, qui avait du sang sur ses vêtements et qui a reconnu sa participation, a été incarcéré.

« Nous sommes là car nous avons été attaqués. Nous sommes là pour montrer que Paris n'est pas à eux. Nous continuerons la lutte antifasciste et révolutionnaire », a lancé au micro un leader de Young Struggle, avant de faire siffler le nom de Bruno Retailleau, ministre français de l'Intérieur et connu pour ses positions très conservatrices.

« Partout, l'extrême droite se répand, encouragée par les saluts nazis de Elon Musk et Steve Bannon », a déclaré à sa suite Mathilde Panot, cheffe des députés du parti de gauche radicale LFI (La France Insoumise).

Steve Bannon, ancien conseiller de Donald Trump, a récemment été sous le feu des projecteurs pour un geste qualifié de salut nazi lors de la convention CPAC, la grand-messe des conservateurs américains près de Washington.

Il a brièvement tendu sa main en l'air après avoir déclaré devant les supporters de Donald Trump : « Nous n'allons pas reculer, nous n'allons pas capituler, nous n'allons pas abandonner. Luttez, luttez, luttez ! »

En janvier, le milliardaire Elon Musk, conseiller de Donald Trump, avait lui-même été épinglé pour un geste ambigu analogue.


Macron dira à Trump qu'entre alliés on ne peut pas "faire souffrir l'autre" avec des droits de douane

Le président français Emmanuel Macron (C) et la ministre française de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire Annie Genevard (D) écoutent des artisans du cuir lors de la journée d'ouverture et de l'inauguration par le président français du 61e Salon international de l'agriculture au parc des expositions de la Porte de Versailles à Paris, le 22 février 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron (C) et la ministre française de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire Annie Genevard (D) écoutent des artisans du cuir lors de la journée d'ouverture et de l'inauguration par le président français du 61e Salon international de l'agriculture au parc des expositions de la Porte de Versailles à Paris, le 22 février 2025. (AFP)
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  • "Entre alliés, on ne peut pas faire souffrir l'autre avec des tarifs" douaniers, a déclaré Emmanuel Macron samedi au premier jour de l'ouverture du Salon de l'agriculture à Paris
  • Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump a annoncé la mise en place de droits de douane réciproques

PARIS: "Entre alliés, on ne peut pas faire souffrir l'autre avec des tarifs" douaniers, a déclaré Emmanuel Macron samedi au premier jour de l'ouverture du Salon de l'agriculture à Paris alors que Donald Trump menace d'imposer des droits de douane sur de multiples produits européens.

"Je vais (lui) en parler parce qu'on a besoin d'apaiser tout ça", a relevé le président français qui doit rencontrer son homologue américain lundi à Washington.

"La filière agricole et agroalimentaire (française), c'est une grande filière d'exportation, donc il faut la défendre pour la rendre encore plus compétitive", a-t-il ajouté.

Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump a annoncé la mise en place de droits de douane réciproques, c'est-à-dire que les États-Unis appliqueront le même niveau de droits de douane sur les produits en provenance d'un pays que le niveau appliqué dans ce pays aux produits américains.

Il a également annoncé le retour de droits de douane sur l'acier et l'aluminium. Et, s'il a déjà visé le Canada, le Mexique et la Chine, il a régulièrement assuré que les pays européens étaient également menacés.

En France, les viticulteurs sont particulièrement inquiets d'un retour des droits de douane américains sur le cognac et le vin, qu'ils exportent en masse vers les États-Unis, d'autant que le cognac souffre déjà d'un différend commercial entre l'UE et la Chine, son premier marché en valeur.

"Je suis déterminé sur tous les sujets pour avoir un échange" avec Donald Trump, a encore dit Emmanuel Macron. "On partagera nos accords, nos désaccords et j'espère surtout qu'on trouvera des solutions sur la question de l'Ukraine".

Le président américain est reparti à la charge vendredi contre son homologue ukrainien. Tout en estimant que Volodymyr Zelensky et Vladimir Poutine allaient "devoir se parler", pour "mettre fin au massacre de millions de personnes", il a jugé que la présence de l'Ukrainien n'était "pas importante" dans des négociations avec la Russie.

Il a ciblé par ailleurs Emmanuel Macron, et Keir Starmer, qui n'ont selon lui "rien fait" pour mettre un terme à la guerre. Le Premier ministre britannique est attendu jeudi à Washington.