Entre LFI et la communauté juive, la défiance grandit

La défiance grandit au sein de la communauté juive envers La France insoumise et son leader Jean-Luc Mélenchon, accusés depuis le 7 octobre de relayer voire nourrir un antisémitisme croissant. (AFP)
La défiance grandit au sein de la communauté juive envers La France insoumise et son leader Jean-Luc Mélenchon, accusés depuis le 7 octobre de relayer voire nourrir un antisémitisme croissant. (AFP)
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Publié le Jeudi 30 novembre 2023

Entre LFI et la communauté juive, la défiance grandit

  • La déception, nourrie du refus de LFI de qualifier le Hamas de «terroriste», a grandi lorsque Jean-Luc Mélenchon a estimé que la marche était le "rendez-vous" des "amis du soutien inconditionnel au massacre"
  • La critique de la politique d'Israël joue désormais un rôle central, expliquait lors de cette même convention le politologue Brice Teinturier

PARIS: La défiance grandit au sein de la communauté juive envers La France insoumise et son leader Jean-Luc Mélenchon, accusés depuis le 7 octobre de relayer voire nourrir un antisémitisme croissant.

"LFI, on sait qu’ils ne nous aiment pas", soupirait lors de la marche du 12 novembre contre l'antisémitisme Laura Cohen, une manifestante, résumant un sentiment fréquemment entendu parmi les Français juifs depuis l'attaque du Hamas contre Israël.

LFI avait boycotté cette manifestation contre l'antisémitisme en arguant de la présence du Rassemblement national. Une décision incompréhensible pour beaucoup de Juifs en quête de solidarité: "Ils ont jeté de l'huile sur le feu sur une situation déjà lourde", affirmait le lendemain le Grand rabbin de France Haïm Korsia.

La déception, nourrie du refus de LFI de qualifier le Hamas de "terroriste", a grandi lorsque Jean-Luc Mélenchon a estimé que la marche était le "rendez-vous" des "amis du soutien inconditionnel au massacre".

Mais le malaise remonte à plus loin.

Les relations sont tendues depuis longtemps avec le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), dont le président Yonathan Arfi a qualifié le leader Insoumis d'"ennemi de la République".

Beaucoup gardent en mémoire les propos de Jean-Luc Mélenchon en 2020 sur Jésus crucifié par "ses propres compatriotes", ou de 2019 sur les "oukases arrogants des communautaristes du Crif".

En 2018, il avait dû quitter sous les huées la marche blanche organisée en mémoire de Mireille Knoll, une octogénaire juive tuée à Paris.

"Une blessure profonde", affirme à l'AFP le député LFI Matthias Tavel, qui l'assure: "on est évidemment préoccupés par la montée de l'antisémitisme. Si ce n'est pas entendu, il faut qu'on le redise plus fortement".

«Dominant/dominé»

Car certains accusent LFI et la gauche radicale de flirter avec l'antisémitisme.

En privé, M. Mélenchon dénonce des accusations "ignobles" qui provoquent chez lui "des blessures dont on n'a pas idée".

Le sujet, abordé en table ronde lors de la dernière Convention du Crif le 19 novembre, a fait salle comble. Mais comment en mesurer sa réalité?

La CNCDH (Commission nationale consultative des droits de l’homme) a publié en juillet son rapport 2022 sur le racisme, et selon la chercheuse du CNRS Nonna Mayer qui l'a co-rédigé, les mesures de l'antisémitisme "sont maximales à l'extrême droite".

"Mais elles remontent à l'extrême gauche, chez les proches des Insoumis", ajoutait-elle lundi lors d'un colloque à Sciences-Po.

Le think-tank libéral Fondapol fait un constat similaire dans son baromètre 2022 de l'antisémitisme: outre chez les hommes et les plus de 65 ans, la diffusion des préjugés antisémites est "plus répandue à l'extrême gauche et à l'extrême droite".

Dans le passé pourtant, notamment au moment de mai 68, des militants juifs ont animé les mouvements d'extrême gauche.

En remontant plus loin, l'affaire Dreyfus avait marqué un coup d'arrêt à l'antisémitisme de gauche, resté sous cloche jusqu'à l'après-guerre, malgré des attaques visant Léon Blum.

"Le grand redéclencheur de l'antisémitisme à gauche sera la guerre des Six jours" en 1967, rappelait l'historien Emmanuel Debono à la Convention du Crif.

La critique de la politique d'Israël joue désormais un rôle central, expliquait lors de cette même convention le politologue Brice Teinturier.

"Une grille de lecture un peu nouvelle s'installe sur un axe dominant/dominé" et sur Israël "s'installe l'idée que les Israéliens sont blancs, dominants, colonisateurs, et les Palestiniens des victimes, d'où le déplacement sémantique", selon lui.

Le reproche agace chez LFI, qui déplore un moyen d'empêcher toute critique du gouvernement Netanyahu.

"Beaucoup de gens confondent antisionisme et antisémitisme. On n’est évidemment pas antisémites", affirme à l'AFP Luc Delrue, 70 ans, un militant LFI angevin.

Le député LFI Louis Boyard estime lui que leurs "adversaires politiques inventent des prétextes" et il appelle à "séparer le religieux du politique dans cette histoire".

"On n'a jamais eu de sortie antisémite à LFI", renchérit son collègue Damien Maudet. Mais "si cette méfiance de la communauté juive à notre égard est avérée, c'est un problème", ajoute-t-il.

Car "un fossé se creuse", avertit un autre député LFI. "Il n'est pas encore infranchissable, mais cherchons à le combler plutôt que le creuser".


Ineligibilité: Le Pen empêchée, les idées d’extrême droite persistent

La décision, prononcée en l’absence de Marine Le Pen, qui avait choisi de quitter la salle d’audience, la condamne également à cinq ans de prison, dont trois avec sursis, et à une inéligibilité provisoire.  Outre Le Pen, huit eurodéputés du RN ont été reconnus coupables de détournement de fonds publics dans cette affaire liée à des soupçons d’emplois fictifs concernant les assistants parlementaires des députés européens du parti. (AFP)
La décision, prononcée en l’absence de Marine Le Pen, qui avait choisi de quitter la salle d’audience, la condamne également à cinq ans de prison, dont trois avec sursis, et à une inéligibilité provisoire. Outre Le Pen, huit eurodéputés du RN ont été reconnus coupables de détournement de fonds publics dans cette affaire liée à des soupçons d’emplois fictifs concernant les assistants parlementaires des députés européens du parti. (AFP)
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  • Par ce verdict, le tribunal porte un coup d’arrêt à la carrière politique de Le Pen, rendant impossible sa candidature à l’élection présidentielle de 2027
  • L’affaire a débuté en 2014, lorsque des accusations ont été lancées contre le RN, accusé d’avoir rémunéré, sur fonds européens, des assistants travaillant en réalité pour le parti

PARIS:  Inéligible pour une durée de cinq ans : une décision qui tombe ce lundi 31 mars, comme un couperet, pour la cheffe de file du Rassemblement National (RN), parti d’extrême droite, Marine Le Pen.

Par ce verdict, le tribunal porte un coup d’arrêt à la carrière politique de Le Pen, rendant impossible sa candidature à l’élection présidentielle de 2027.

La décision, prononcée en l’absence de Marine Le Pen, qui avait choisi de quitter la salle d’audience, la condamne également à cinq ans de prison, dont trois avec sursis, et à une inéligibilité provisoire.

Outre Le Pen, huit eurodéputés du RN ont été reconnus coupables de détournement de fonds publics dans cette affaire liée à des soupçons d’emplois fictifs concernant les assistants parlementaires des députés européens du parti.

L’affaire a débuté en 2014, lorsque des accusations ont été lancées contre le RN, accusé d’avoir rémunéré, sur fonds européens, des assistants travaillant en réalité pour le parti.

L’enquête a révélé par la suite qu’un système bien rodé d’emplois fictifs avait causé un préjudice estimé à 4,6 millions d’euros sur une période de dix ans.

Le jugement met fin à un suspense qui durait depuis novembre dernier, lorsque les procureurs avaient requis l’inéligibilité de Le Pen dans le cadre de cette affaire.

L’impact de ce verdict est pris très au sérieux par le chef du gouvernement français, François Bayrou, qui a ordonné à ses ministres de ne pas commenter la décision de justice.

Marine Le Pen a immédiatement annoncé son intention de faire appel de la décision, mais l’exécution provisoire de son inéligibilité s’applique immédiatement, même en cas de recours.

Cette décision pourrait provoquer de vives réactions, tant au sein de la classe politique que de l’opinion publique française.

L’impact de ce verdict est pris très au sérieux par le chef du gouvernement français, François Bayrou, qui a ordonné à ses ministres de ne pas commenter la décision de justice.

Cependant, cette consigne n’empêchera probablement pas les divisions de se manifester.

Nombreux sont ceux qui se réjouissent de ce verdict, qui stoppe net la progression de Le Pen vers l’Élysée, où elle s’est déjà présentée à deux reprises, parvenant à atteindre le second tour et à accroître le nombre de voix en sa faveur.

D’autres, en revanche, y voient un complot politico-judiciaire visant à entraver la progression de Le Pen vers la fonction suprême et à briser un élan populaire de plus en plus marqué.

La dynamique populaire de Le Pen

Il suffit de se rappeler les élections européennes de 2024, où le RN est arrivé en tête des forces politiques françaises, reléguant au second plan le parti « Renaissance », soutien du président Emmanuel Macron.

Les élections législatives anticipées, convoquées à la suite des européennes, n’ont pas inversé la tendance.

Au contraire, elles ont permis à Le Pen de diriger un groupe parlementaire conséquent de 142 députés, soudé et influent lors des discussions et des votes à l’Assemblée nationale, contrairement aux autres blocs.

Plutôt que de s’attaquer aux causes profondes de cette désaffection, les partis traditionnels ont préféré fermer les yeux, s’étonnant ensuite de voir les extrêmes gagner du terrain.

Ces résultats illustrent la dynamique populaire derrière Marine Le Pen, alimentée par un désamour croissant entre les Français et leur classe politique traditionnelle.

Ce phénomène s’explique également par le sentiment d’abandon face aux inégalités sociales, à l’insécurité et à un fossé toujours plus grand entre le peuple et des dirigeants perçus comme déconnectés des réalités quotidiennes.

Plutôt que de s’attaquer aux causes profondes de cette désaffection, les partis traditionnels ont préféré fermer les yeux, s’étonnant ensuite de voir les extrêmes gagner du terrain.

De nombreux observateurs estiment que ceux qui se réjouissent de la chute de Le Pen se méprennent : la décision de justice freine peut-être son ascension à l’Élysée, mais pas la progression des idées d’extrême droite dans l’opinion publique.

Bien au contraire, ces idées, nourries par la frustration et le sentiment d’injustice ressentis par une partie des Français, se renforceront probablement grâce à la posture de victime que Le Pen ne manquera pas d’exploiter.

D’ailleurs, ce procédé est déjà enclenché.

Commentant le verdict du tribunal sur X, le prėsident du RN, Jordan Bardella a indiqué « aujourd’hui, ce n’est pas seulement Marine Le Pen qui est injustement condamnée : c’est la démocratie française qui est exécutée ».

 


Macron fixe une série d'objectifs pour la conférence de l'ONU sur les océans en juin à Nice

Le président français Emmanuel Macron prononce un discours lors d'un événement international de deux jours « SOS Océan ! », en amont de la troisième Conférence des Nations unies sur les océans (UNOC-3), prévue en juin 2025, à Paris, le 31 mars 2025. (Photo par Michel Euler / POOL / AFP)
Le président français Emmanuel Macron prononce un discours lors d'un événement international de deux jours « SOS Océan ! », en amont de la troisième Conférence des Nations unies sur les océans (UNOC-3), prévue en juin 2025, à Paris, le 31 mars 2025. (Photo par Michel Euler / POOL / AFP)
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  • Emmanuel Macron a fixé  lundi huit objectifs à la prochaine Conférence des Nations unies pour l'Océan qui se tiendra en juin à Nice.
  • L'accord trouvé à l'ONU en mars 2023 pour « la conservation et l'utilisation durable » de la haute mer a été signé par 110 États, mais n'est à cette heure ratifié que par 21 d'entre eux.

PARIS : Emmanuel Macron a fixé  lundi huit objectifs à la prochaine Conférence des Nations unies pour l'Océan qui se tiendra en juin à Nice, dont l'entrée en vigueur de l'accord sur la gouvernance de la haute mer, l'arrêt de la surpêche mondiale et la défense de la science à l'heure de sa remise en cause aux États-Unis.

L'accord trouvé à l'ONU en mars 2023 pour « la conservation et l'utilisation durable » de la haute mer a été signé par 110 États, mais n'est à cette heure ratifié que par 21 d'entre eux.

« L'objectif pour Nice, c'est d'avoir au moins les 60 ratifications qui lui permettront d’entrer en vigueur. Nous n'y sommes pas encore (...). Il y a encore un très gros travail à faire », a concédé le président français à l'occasion d'un sommet « SOS Océan » qui était organisé à Paris.

« Il faut rendre possible un espace de gestion durable de la haute mer et de ses ressources », avec la création d'aires marines protégées et des études d’impact environnemental, a-t-il insisté.

Emmanuel Macron a aussi appelé à continuer la lutte contre la « pêche illégale, illicite et non déclarée », qui représente encore entre 10 et 20 % de la production selon lui.

Le chef de l'État espère par ailleurs des « résultats tangibles » en matière de décarbonation du transport maritime, avec un objectif de neutralité totale à l'horizon 2050. Cela devra passer par des « investissements massifs » dans la transition vers les carburants durables.

Il a aussi insisté sur la « mobilisation de nouveaux financements » dans l'électrification des ports, la recherche ou l'innovation.

« Nous vivons une période où beaucoup de grandes puissances stoppent leurs financements vers les organismes de recherche publique, contestent la véracité des résultats établis scientifiquement », a-t-il relevé dans une allusion au président américain Donald Trump.

La France plaide ainsi pour un moratoire sur l'exploitation des grands fonds marins faute de connaissances scientifiques suffisantes. « Il ne doit pas y avoir d'action concernant l'océan qui ne soit éclairée par la science », a martelé le président français.


Réunion de crise au siège du RN après la condamnation de Le Pen

Le vice-président du RN et maire de Perpignan, Louis Aliot (C), s'adresse à la presse à son arrivée au siège du parti d'extrême droite français à Paris, le 31 mars 2025.(Photo by Thomas SAMSON / AFP)
Le vice-président du RN et maire de Perpignan, Louis Aliot (C), s'adresse à la presse à son arrivée au siège du parti d'extrême droite français à Paris, le 31 mars 2025.(Photo by Thomas SAMSON / AFP)
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  • Marine Le Pen et l'état-major du Rassemblement national étaient réunis lundi après-midi au siège du parti à Paris.
  • Cette réunion au sommet devait acter la riposte face à une décision judiciaire qui pourrait empêcher une quatrième tentative de conquête du pouvoir et forcer le parti à se trouver un nouveau champion.

PARIS : Marine Le Pen et l'état-major du Rassemblement national étaient réunis lundi après-midi au siège du parti à Paris, dans la foulée de la condamnation de leur cheffe de file à une peine d’inéligibilité immédiate qui hypothèque sa candidature à la présidentielle de 2027.

Partie sans un mot du tribunal de Paris à la mi-journée, juste avant l'énoncé de sa sentence, Marine Le Pen s'est aussitôt engouffrée dans une voiture qui l'a conduite vingt minutes plus tard au siège du parti d'extrême droite, dans le cossu 16ᵉ arrondissement de la capitale.

Plusieurs de ses proches ont suivi dans son sillage, dont l'eurodéputée Catherine Griset -elle aussi condamnée en tant qu'ex-assistante parlementaire de Mme Le Pen à Bruxelles- ainsi que le député du Pas-de-Calais Bruno Bilde.

Une partie de la garde rapprochée de la patronne du RN a accompagné le cortège : son directeur de cabinet Ambroise de Rancourt, son conseiller presse Victor Chabert et le secrétaire général du groupe à l'Assemblée Renaud Labaye.

D'autres les ont rejoints sur place, à commencer par le président du RN Jordan Bardella, puis le maire de Perpignan Louis Aliot (condamné dans la même affaire mais sans exécution immédiate de sa peine), le député Laurent Jacobelli et Marine Le Pen, sœur de la triple candidate malheureuse à l'élection présidentielle.

Cette réunion au sommet devait acter la riposte face à une décision judiciaire qui pourrait empêcher une quatrième tentative de conquête du pouvoir et forcer le parti à se trouver un nouveau champion.

Le premier élément de réponse est venu de l'avocat de Mme Le Pen, Rodolphe Bosselut, qui a affirmé en arrivant à son tour au siège du parti que sa cliente allait « faire appel », devant de nombreux micros et caméras de journalistes.

Elle reste « combative », a assuré quelques minutes plus tôt M. Jacobelli devant les journalistes. « Ceux qui croient que cette exécution politique l’a mise à genoux se trompent lourdement », a également assuré sur LCI l'eurodéputé Matthieu Valet, autre porte-parole du parti.

L'intéressée aura l'occasion d'en faire la démonstration devant un large public lundi soir, lors du 20 heures de TF1.