AMMAN: L'armée israélienne a annoncé dimanche une campagne de frappes "significatives" dans la bande de Gaza qu'elle a coupée en deux, en pleine tournée régionale du secrétaire d'Etat américain Antony Blinken axée sur l'aide humanitaire à la population palestinienne assiégée.
Près de 10.000 personnes ont été tuées dont la moitié des enfants, selon le gouvernement du Hamas, dans les bombardements israéliens dévastateurs dans la bande de Gaza depuis le début de la guerre, déclenchée le 7 octobre par une attaque du mouvement islamiste palestinien sur le sol israélien, d'une violence et d'une ampleur inédites depuis la création d'Israël en 1948.
Plus de 1.400 personnes ont péri en Israël, majoritairement des civils tués ce jour-là par les commandos du Hamas qui ont en outre enlevé et emmené plus de 240 personnes dans la bande de Gaza qu'ils contrôlent, d'après les autorités.
Israël a juré "d'anéantir" le Hamas et le Premier ministre Benjamin Netanyahou s'est dit opposé à toute pause dans la guerre tant que les otages n'auront pas été libérés. "Nous continuerons (l'offensive) jusqu'à remporter la victoire. Nous n'avons pas d'autre alternative", a dit M. Netanyahou.
Son armée pilonne sans cesse depuis le 7 octobre le petit territoire assiégé où vivent 2,4 millions d'habitants dans une situation humanitaire catastrophique, et y mène depuis le 27 octobre des opérations terrestres face à des combattants du Hamas retranchés dans un réseau de tunnels.
"Des frappes significatives sont maintenant en cours" dans la bande de Gaza, où l'internet et les lignes téléphoniques ont été coupés peu auparavant, et "elles se poursuivront cette nuit et dans les jours à venir", a déclaré dimanche soir le porte-parole de l'armée, Daniel Hagari.
Le gouvernement du Hamas a affirmé qu'Israël menait "d'intenses bombardements" autour de plusieurs hôpitaux, dont l'hôpital al-Shifa, le plus grand de Gaza.
Selon Daniel Hagari, les troupes opérant dans le territoire palestinien l'ont coupé en deux: "Gaza sud et Gaza nord". "Nous permettons encore un passage pour les civils du nord de Gaza et de la ville de Gaza vers le sud", a-t-il ajouté alors que 300.000 à 400.000 personnes se trouveraient encore dans le nord du territoire où la situation humanitaire est jugée catastrophique.
«Les enfants avaient très peur»
Israël ordonne depuis la mi-octobre aux civils d'évacuer le nord du territoire, où les combats sont les plus intenses, vers le sud.
"La situation est très difficile. Il n'y a pas de pain, pas d'eau, rien, même pas d'eau salée. On a vu des cadavres (sur la route), les enfants avaient très peur. La situation était très effrayante", a raconté Zakaria Akel qui fuyait avec sa famille vers le sud de la bande de Gaza.
En Israël, les sirènes d'alerte aux roquettes tirées depuis la bande de Gaza, ont retenti maintes fois à Tel-Aviv et dans des villes proches du territoire palestinien. Plusieurs roquettes ont été interceptées selon l'armée. Il n'y a pas eu de victime d'après les services de secours.
Lors d'une nouvelle mission dans la région, Antony Blinken est arrivé en soirée à Bagdad après des visites à Ramallah en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967, et à Chypre.
A Ramallah, il a mis en garde contre le "déplacement forcé" des civils palestiniens à Gaza et réaffirmé "l'engagement des Etats-Unis pour la livraison d'une aide humanitaire vitale et la reprise des services essentiels à Gaza", où Israël a coupé les livraisons en eau, en électricité et en nourriture.
En face, le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas a dénoncé "la guerre de génocide" menée selon lui par Israël à Gaza.
Le roi de Jordanie a annoncé le largage tôt lundi matin d'une aide médicale d'urgence à Gaza, destinée à un hôpital de campagne jordanien, ajoutant: "C'est notre devoir d'aider nos frères et sœurs blessés", sur X.
A Chypre, M. Blinken a discuté de la création "d'un couloir maritime", proposé par l'île de la Méditerranée orientale afin de fournir une aide humanitaire au territoire palestinien.
Antony Blinken a aussi réclamé l'arrêt "des violences des extrémistes" en Cisjordanie, où plus de 150 Palestiniens, selon l'Autorité palestinienne, ont été tués par des tirs de soldats ou de colons israéliens depuis le 7 octobre.
Internet coupé
Malgré de multiples appels à une trêve, les combats acharnés se poursuivent entre les soldats israéliens et le Hamas dans la bande de Gaza, où Israël a affirmé avoir frappé 2.500 cibles depuis le 27 octobre.
Les lignes téléphoniques et d'internet à Gaza ont été coupées par Israël, pour la troisième fois depuis le 7 octobre, selon l'opérateur palestinien Paltel.
L'armée israélienne, accusant de nouveau le Hamas d'utiliser les hôpitaux dans la guerre, a publié des images montrant, entre autres selon elle, des membres du Hamas tirant depuis un hôpital de Gaza. Le Hamas a catégoriquement nié.
Des images diffusées dans la journée par l'armée ont montré des soldats, accompagnés de chars et de bulldozers, patrouillant dans les décombres ou le long du littoral méditerranéen de la bande de Gaza.
Au moins 30 soldats ont été tués depuis le début de l'opération terrestre, d'après l'armée.
Israël a annoncé avoir achevé d'encercler la ville de Gaza, dans le nord, afin d'y détruire le "centre" du Hamas, classé organisation terroriste par les Etats-Unis, l'Union européenne et Israël.
Pas d'évacuations
En près d'un mois, les bombardements israéliens ont provoqué d'immenses destructions à Gaza et entraîné selon l'ONU le déplacement de 1,5 million de personnes.
Israël a placé depuis le 9 octobre en état de "siège complet" ce territoire pauvre de 362 km2, déjà sous blocus israélien depuis 2007.
Dans le sud de la bande de Gaza, près de la frontière avec l'Egypte, sont massées des centaines de milliers de personnes ayant fui le nord.
Cette frontière s'est ouverte partiellement le 21 octobre pour laisser transiter des convois humanitaires via le point de passage de Rafah. Au total, 450 camions avaient traversé la frontière samedi, selon l'ONU, qui réclame une aide plus importante.
Plusieurs centaines de blessés palestiniens, d'étrangers et de binationaux ont également pu quitter Gaza vers l'Egypte ces derniers jours. Mais aucune évacuation n'a eu lieu dimanche, selon des responsables.
A la frontière israélo-libanaise, les échanges de tirs sont quotidiens entre l'armée israélienne et le mouvement Hezbollah notamment, un allié du Hamas.
Dimanche, quatre membres de la famille d'un journaliste libanais à bord d'une voiture, dont trois enfants, ont été tués dans une frappe israélienne dans le sud du Liban, selon un média d'Etat libanais.
L'armée israélienne a indiqué avoir "frappé des cibles du Hezbollah" "en réponse à une attaque de missile qui a tué un civil israélien" dans le nord d'Israël. Parmi les cibles, des "véhicules et une rampe de missile", selon elle.
Depuis le 7 octobre, 81 personnes ont péri du côté libanais, selon un décompte de l'AFP, dont 59 combattants du Hezbollah. Six soldats et deux civils ont été tués du côté israélien.
Antony Blinken, qui s'était également rendu en Israël et en Jordanie lors de sa tournée, est encore attendu en Turquie, où le président Recep Tayyip Erdogan a décidé de rompre tout contact avec Benjamin Netanyahou.