Le gouvernement des États-Unis a reconnu avril comme le mois du patrimoine arabo-américain. Cette célébration reflète le chemin parcouru par la communauté. Cependant, elle met également en lumière ce que les Arabes des États-Unis doivent encore accomplir.
L’idée de célébrer le patrimoine arabo-américain a lentement évolué parmi les Arabes américains à mesure que la communauté grandissait. Elle apparaît comme une réponse naturelle à la discrimination antiarabe croissante aux États-Unis.
Le premier Arabe à avoir foulé le sol des États-Unis – selon le site officiel du département d’État, qui a élargi sa reconnaissance de la diversité raciale pour inclure les Arabes ces dernières années – était le Marocain Estebanico Azemmouri, en 1527, suivi par Antonio Bishallany, qui venait du Liban. Il n’est donc pas surprenant que le Maroc soit devenu plus tard la première nation arabe à reconnaître les États-Unis après avoir proclamé son indépendance, en 1776, ou que la communauté libano-américaine soit aujourd’hui non seulement le groupe arabe le plus ancien et le plus important aux États-Unis, mais aussi le plus engagé au sein de la société américaine.
Vivre aux États-Unis n’est pas facile pour les immigrants et cela n’a certainement pas été facile pour les Arabes. Les stéréotypes négatifs sur les Arabes se sont rapidement transformés en représentations racistes dans les médias américains, y compris dans les livres et les journaux, à la télévision, à la radio et dans les films de Hollywood.
Cela n’a pas aidé que le terme «Arabe» soit intrinsèquement contesté par son propre peuple, avec des différences qui émanaient de ses vingt-deux pays d’origine. L’Égyptien Gamal Abdel Nasser a tenté de corriger cela et de créer une nation arabe dans les années 1960, mais l’idée a disparu après la victoire d’Israël lors de la guerre des Six Jours.
La diversité arabe est l’une des raisons pour lesquelles un débat est en cours sur la manière de compter le nombre de personnes originaires du monde arabe ou du Moyen-Orient dans le recensement américain. Le fait d’être inclus dans le recensement active des lois qui renforcent le droit de vote et les droits politiques des groupes minoritaires tout en imposant la distribution de fonds fédéraux pour renforcer leur autonomisation. Cependant, les Arabes ne sont pas inclus, ce qui les plonge dans un état d’incertitude. Ils sont facilement pris pour cibles par les ennemis, marginalisés par le gouvernement et privés de financement.
Le mot «Arabe» est utilisé pour refléter le dégoût, plutôt que comme une source de fierté à partager avec d’autres Américains dans une nation qui prétend prôner la diversité et l’empathie pour les immigrants.
Oui, la situation s’est améliorée depuis 1972, lorsque le président Richard Nixon a lancé l’opération Boulder afin de surveiller l’immigration de «subversifs» et d’individus considérés comme une menace pour les États-Unis. Elle s’est ensuite étendue aux Arabes. La plupart des Arabes des États-Unis étaient victimes de cette surveillance.
Au même moment, la peur des Arabes était attisée par les thèmes antiarabes qui dominaient l’industrie cinématographique hollywoodienne. Bien sûr, Hollywood dépeint de nombreux groupes ethniques et raciaux de manière négative. Mais, pour la plupart de ces victimes du racisme, Hollywood a également inclus des modèles et des personnages positifs afin d’équilibrer les stéréotypes. Ce n’est que très récemment que les Arabes ont commencé à voir quelques personnages positifs dans le monde de Hollywood.
Vivre aux États-Unis n’est pas facile pour les immigrants, et cela n’a certainement pas été facile pour les Arabes.
Ray Hanania
Même aujourd’hui, alors que quarante-cinq États reconnaissent le mois du patrimoine arabo-américain, cinq États ne le font pas. Et quelque vingt-six États ont adopté des lois contre le militantisme arabo-américain en rendant illégal le soutien à la campagne intitulée «Boycott, désinvestissement et sanctions». Alors que Joe Biden est devenu l’année dernière le premier président américain à reconnaître officiellement le mois du patrimoine arabo-américain, un seul État – l’Illinois – a adopté une loi qui désigne officiellement le mois d’avril comme tel.
Le président Biden a également nommé plus de deux douzaines d’Arabes américains au sein de son administration, comblant un vide qui avait désavantagé les Arabes pendant de nombreuses années. Mais ces personnes n’ont pas le droit de faire des déclarations publiques sur la politique américaine au Moyen-Orient. Ils ont également dû «nettoyer» leurs comptes sur les réseaux sociaux pour effacer les opinions impopulaires et sont rarement autorisés à s’exprimer publiquement. Je ne sais pas si c’est réellement un exploit que d’avoir un plus grand nombre d’Arabes qui travaillent pour le gouvernement américain, mais dont les opinions politiques sont réprimées.
Bien que les médias grand public célèbrent les mois du patrimoine des Afro-Américains, des Hispaniques, des Asiatiques, des Amérindiens et d’autres, il y a très peu de reconnaissance pour le patrimoine arabe pendant le mois – avril – qui lui est dédié.
Le racisme contre les Arabes existe toujours aux États-Unis. Il est aggravé par la multiplicité du peuple arabe – vingt-deux nationalités différentes, ainsi que des groupes encore plus divers qui, tous, célèbrent leur individualité. Bien que les Égyptiens, les Jordaniens, les Palestiniens et les Saoudiens se considèrent tous comme ayant des identités distinctes, ce n’est pas le cas aux yeux des Américains. Les États-Unis nous mettent tous dans un même sac, y compris les personnes d’Asie du Sud et d’autres qui partagent nos caractéristiques et notre religion dominante, l’islam.
La communauté arabo-américaine doit reconnaître ce défi et souligner son identité comme arabe, et comme un groupe originaire du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord. Nous ne devrions pas contribuer à l’approche mal informée des États-Unis à l’égard de la culture et de l’ethnicité arabes. Tant que nous ne nous mobiliserons pas en tant qu’Arabes, nous serons toujours victimes de stéréotypes négatifs.
Certes, le mois du patrimoine arabo-américain est un moment de fierté. Mais ce n’est là qu’une première étape.
Ray Hanania est un ancien journaliste politique et chroniqueur plusieurs fois primé de la mairie de Chicago. Il peut être contacté sur son site Internet personnel à l’adresse www.Hanania.com.
Twitter: @RayHanania
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.