BEYROUTH: Israël a intensifié ses raids au cours des derniers jours en Syrie, visant notamment les positions des groupes pro-iraniens. Quelles sont les raisons et les conséquences de cette escalade ?
Quelles positions Israël a-t-il visées ?
Israël, qui affirme régulièrement son intention d'empêcher l'Iran d'étendre son influence en Syrie, a ciblé ce pays voisin à quatre reprises en cinq jours, une fréquence inhabituelle.
Les raids ont notamment visé des positions de groupes pro-iraniens. Deux officiers des Gardiens de la révolution iranienne, l'armée idéologique de la République islamique, ont été tués le 31 mars selon Téhéran.
Principal allié régional de Damas, l'Iran soutient le régime du président syrien Bachar al-Assad et assure déployer surtout des conseillers militaires sur le terrain.
Lors du dernier raid israélien, dans la nuit de lundi à mardi, deux civils ont été tués près de Damas, selon les médias d'État syriens.
Depuis le début de la guerre en Syrie en 2011, Israël a mené des centaines de frappes aériennes contre des positions du régime ainsi que des forces iraniennes et du Hezbollah libanais, alliés de Damas et ennemis jurés d'Israël.
L'État hébreu commente rarement ces frappes. Mais son Premier ministre Benjamin Netanyahou a déclaré dimanche qu'Israël demeurait "déterminé" à combattre ses "ennemis sur tous les fronts, partout et à chaque fois que c'est nécessaire".
Pourquoi cette escalade ?
Les analystes interrogés par l'AFP évoquent plusieurs scénarios qui pourraient justifier l'intensification des frappes, parmi lesquels un lien avec l'attentat de Megiddo, dans le nord d'Israël, le 13 mars, dans lequel l'État hébreu voit la main du Hezbollah.
L'attentat "a déclenché des frappes israéliennes contre des bases iraniennes et du Hezbollah en Syrie", estime Fabrice Balanche, maître de conférence à l'Université Lumière Lyon 2.
Un civil israélien avait été grièvement blessé dans l'attentat, et son auteur qui a été abattu est soupçonné de s'être infiltré à partir du Liban.
Le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a refusé de révéler si sa puissante formation était impliquée dans cet incident, affirmant que le silence était une arme dans sa bataille avec Israël.
"Le gouvernement israélien n'a pas voulu frapper le Liban car il ne souhaite pas une escalade de ce côté de la frontière", ajoute M. Balanche.
Après la mort des deux officiers iraniens, "l'Iran a envoyé un drone en Israël en représailles, ce qui a provoqué de nouvelles frappes israéliennes. Voilà pourquoi nous avons autant de frappes si rapprochées", explique l'analyste.
Israël a annoncé avoir abattu dimanche un drone survolant son territoire avant de frapper à nouveau la Syrie lundi.
L'hypothèse d'un lien avec l'attentat de Meggido est partagée par Carmit Valencia, directrice du programme de recherche sur la Syrie à l'institut des études nationales de sécurité de Tel-Aviv (INSS).
"Israël envoie le message qu'il est déterminé à protéger ses frontières, sa sécurité et ses citoyens, malgré la crise interne", explique-t-elle.
Depuis début 2023, Israël est en proie à d'importantes manifestations contre un projet controversé de réforme judiciaire, mis en "pause" par le gouvernement pendant un mois.
Israël, qui veut maintenir sa supériorité militaire, "ne veut pas permettre à l'Iran de s'implanter avec des capacités exceptionnelles en Syrie", souligne de son côté l'expert militaire Riad Kahwaji.
"L'Iran peut aider le régime contre l'opposition. Mais Israël ne lui permettra pas d'apporter des missiles balistiques, anti-aériens et anti-navires et des drones d'une manière qui conteste sa supériorité aérienne et maritime et sa capacité à lancer des attaques quand il le souhaite", ajoute-t-il.
Quelles conséquences ?
À la suite de la mort des deux officiers iraniens, Téhéran "se réserve le droit de riposter (...) au moment et à l'endroit appropriés", selon le porte-parole de la diplomatie iranienne Nasser Kanani.
"Il y a une crise interne en Israël et des problèmes internes en Amérique. Peut-être que l'entité sioniste veut exporter sa crise dans la région en provoquant l'escalade. L'agenda iranien est différent de celui d'Israël", a estimé l'ambassadeur iranien à Beyrouth, Mojtaba Amaani, sur Twitter.
De son côté, le ministère syrien des Affaires étrangères a dénoncé mardi les frappes israéliennes et mis en garde Israël contre "le danger que pose cette politique agressive, qui entraîne la région vers une escalade globale (...)".