La récente percée diplomatique entre l'Arabie saoudite et l'Iran pourrait être considérée comme une opportunité pour l'État d'Israël, contrairement à ce qui se dit dans la presse occidentale et israélienne.
L'accord négocié à Pékin présente l'espoir de créer un Moyen-Orient plus tranquille et de réduire les tensions. Il pourrait encourager l'Iran à choisir une voie plus pacifique qu’une attitude hostile et agressive à l’égard des pays de la région. Un tel résultat serait extrêmement bénéfique pour Israël, qui a été l'une des principales cibles de l'hostilité iranienne, avec l'Arabie saoudite et les États-Unis.
Pendant des années, les États-Unis et Israël ont tout essayé pour traiter avec l'Iran, sans obtenir de résultats.
Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, a proféré durant toute une décennie des menaces contre le programme nucléaire iranien, mais en vain. L'Iran est plus proche que jamais d'obtenir la matière et le savoir-faire pour la fabrication de la bombe nucléaire.
Le président Barack Obama a cherché à persuader Téhéran d'être un meilleur citoyen du monde, en poussant l’Iran à conclure un accord nucléaire bien défini. Mais les États-Unis et d'autres puissances mondiales ont fait d’importantes concessions, tout en accélérant l'ingérence iranienne dans des pays comme l'Irak, la Syrie, le Liban et le Yémen.
Le président Donald Trump a abandonné l’accord nucléaire conclu en 2015 et l’a remplacé par une «pression maximale» via des sanctions et l'assassinat ciblé du commandant de la Force Al-Qods, Qassem Soleimani. En réponse, le gouvernement iranien a fait progresser son programme d'enrichissement d'uranium et a lancé une attaque impudente contre les installations pétrolières de l'Arabie saoudite en 2019.
Le président Joe Biden a tenté de revenir au statu quo d'avant Trump, pour constater que les Iraniens ne voulaient pas revenir à la situation antérieure et semblaient déterminés à maintenir le cap de l'escalade et de la provocation. Durant cette période, les menaces, les attaques et le soutien iraniens aux groupes terroristes ciblant les Juifs et Israël n'ont jamais ralenti.
L'approche de l'Arabie saoudite est différente, et offre pour cette raison de l'espoir, abstraction faite du pays qui a joué le rôle de médiateur. Comme l'ont déclaré des responsables des deux parties, l'accord propose le rétablissement des relations diplomatiques et des engagements en faveur de la désescalade et du respect de la souveraineté des États.
Mais la question est bien plus vaste. Cette avancée s'inscrit dans la volonté de l'Arabie saoudite et de ses voisins de tourner la page de l'histoire mouvementée de la région.
Comme l'ont souligné à plusieurs reprises des dirigeants sunnites influents tels qu'Ahmed al-Tayeb, le grand imam d'Al-Azhar, et le chef de la Ligue musulmane mondiale, le Dr Mohammed ben Abdelkarim al-Issa, le monde musulman doit dépasser les désaccords théologiques et tribaux qui ont entravé le chemin de sa progression commune.
En tant que rabbin, défenseur de longue date de la paix et partisan de liens plus étroits entre Israël et les pays musulmans, je vois de nouvelles opportunités et une nouvelle dynamique s’installer dans la région. L'Arabie saoudite étant à la table des négociations avec l'Iran, cela pourrait inciter potentiellement des voisins comme les signataires des accords d'Abraham, Bahreïn et les Émirats arabes unis (EAU) à s’y joindre. Israël pourrait même être représenté en vue de façonner potentiellement un Iran moins belliqueux.
Les Israéliens veulent obtenir la même chose que les Saoudiens de l'Iran – un pays se contentant d'opérer à l'intérieur de ses propres frontières, ne menaçant plus la sécurité de ses voisins et partageant les riches ressources de la région.
Ces dernières années, l'Arabie saoudite s'est fortement concentrée sur le développement économique pour mettre en œuvre la Vision 2030 et considère donc le rétablissement des relations avec Israël comme une nécessité. De même, comme l'Iran se trouve dans une situation économique difficile, le réchauffement des relations avec Israël ne pourrait que profiter aux Iraniens. Il faudra peut-être que le royaume d'Arabie saoudite mette également en avant cette réalité auprès de l'Iran.
Cette avancée s'inscrit dans la volonté de l'Arabie saoudite et de ses voisins de tourner la page de l'histoire mouvementée de la région.
Le Rabbin Marc Schneier
Malheureusement, la sagesse qui prévaut en Israël – et même parmi une grande partie de la communauté des experts américains – a été de considérer l'accord saoudo-iranien comme une «perte» pour Israël. Une telle évaluation pourrait être considérée comme une étroitesse de vue d'esprit.
Les nouvelles approches de la paix suscitent toujours le scepticisme, mais elles doivent être analysées sur les intentions et la mise en œuvre.
Le mois dernier, j'ai dirigé la toute première délégation américaine de synagogue dans le Royaume, et j'ai entendu le même refrain, puis je l'ai vu apparaître quelques jours plus tard à travers l'accord avec l'Iran. Je n'ai aucun doute sur la sincérité des intentions saoudiennes.
Espérons que ce soit au bénéfice de Téhéran. Pour nous autres, c'est peut-être le meilleur espoir en ce moment et celui que nous devrions envisager.
Le rabbin Marc Schneier est président de la Foundation for Ethnic Understanding, et consultant de renom de nombreux États du Golfe. Il est considéré comme l'une des personnalités juives les plus influentes du monde musulman.
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est celle de l’auteur et ne reflète pas nécessairement le point de vue d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com