Dans le sud de la Turquie, l'ancienne Antioche, une ville martyre après le séisme

Sertac Paul Bozkurt, fidèle chrétien local de l'Église orthodoxe d'Antioche, marche près de l'Église orthodoxe grecque détruite dans la ville historique d'Antakya, dans le sud du pays, le 12 février 2023, après qu'un tremblement de terre de magnitude 7,8 a frappé la région frontalière de la Turquie et de la Syrie plus tôt dans la semaine. (Photo de Yasin AKGUL / AFP)
Sertac Paul Bozkurt, fidèle chrétien local de l'Église orthodoxe d'Antioche, marche près de l'Église orthodoxe grecque détruite dans la ville historique d'Antakya, dans le sud du pays, le 12 février 2023, après qu'un tremblement de terre de magnitude 7,8 a frappé la région frontalière de la Turquie et de la Syrie plus tôt dans la semaine. (Photo de Yasin AKGUL / AFP)
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Publié le Lundi 13 février 2023

Dans le sud de la Turquie, l'ancienne Antioche, une ville martyre après le séisme

  • A Antakya, l'Antioche de l'Antiquité grecque, devenue une ville martyre du patrimoine turc, quatorze siècles d'histoire ont été jetés à terre par le séisme qui a fait plus de 35.000 morts en Turquie et en Syrie
  • Dans la vieille ville d'Antakya, de nombreuse rues ne sont même plus accessibles, obstruées par les décombres de bâtiments atomisés

ANTIOCHE: La flèche du dôme d'Habib-i Neccar, la plus vieille mosquée de Turquie, gît à l'horizontale au sommet des gravats qui recouvrent la salle de prière.

A Antakya, l'Antioche de l'Antiquité grecque, devenue une ville martyre du patrimoine turc, quatorze siècles d'histoire ont été jetés à terre par le séisme qui a fait plus de 35.000 morts en Turquie et en Syrie.

Habib-i Neccar, "considérée comme la première mosquée construite à l'intérieur des frontières de la Turquie d'aujourd'hui", selon le gouvernement turc, avait été érigée en 638.

Seuls les murs extérieurs ont tenu. Les fines peintures jaune, rouge et bleu et les calligraphies sont désormais exposées aux quatre vents, quand elles ne sont pas elles aussi ensevelies.

"Un peu de la barbe du prophète Mahomet était préservé dans une boîte" présentée dans la mosquée mais ne s'y trouve plus, s'inquiète Havva Pamukcu, une quinquagénaire couverte d'un voile qui confie avoir "le coeur brisé".

Quelques centaines de mètres plus loin, l'église grecque orthodoxe érigée au XIVe siècle - et rebâtie en 1870 après un tremblement de terre, déjà - a davantage souffert encore : la croix blanche qui trônait sur le toit pointu du bâtiment émerge désormais d'un chaos de pierres et de planches.

"Tous les murs sont tombés. Nous sommes au désespoir", déplore Sertac Paul Bozkurt, membre du conseil administrant ce lieu de culte, dont il espère la reconstruction.

Multitude de séismes

Dans la vieille ville d'Antakya, de nombreuse rues ne sont même plus accessibles, obstruées par les décombres de bâtiments atomisés.

Des charpentes nues, hors d'âge, reposent sur l'un des rares axes dégagés, jonché de grosses tuiles ocres portant le nom de leur fabricant : "Marseille, St André". Héritage de l'éphémère passé français des lieux.

Dans son passé millénaire, Antakya, l'ex-Antioche fondée en 300 avant Jésus Christ par un ancien général d'Alexandre le Grand, a successivement traversé des époques grecque, romaine, byzantine, perse, arabe, ottomane et même une court mandat français, entre la fin de la Première Guerre mondiale et 1939, quand la ville fut rendue à la Turquie.

Antioche a encaissé de nombreux séismes qui n'ont cessé de la détruire et de la remodeler, pratiquement un par siècle. En 147 et en 37 avant Jésus Christ, mais aussi en 115, en 458, etc. En 526, 250.000 personnes avaient péri; en 1054, dix mille... pour ne citer que les plus meurtriers.

"Antioche est le berceau de nombreux événements historiques", raconte Hakan Mertkan, un doctorant de l'université allemande de Bayreuth et auteur d'une monographie sur cette cité. Mais c'est aussi "un berceau de tremblements de terre (dont) les sols sont remplis d'histoire", s'attriste-t-il.

La Turquie comme la Syrie, au croisement de trois plaques tectoniques - ce qui explique le nombre des séismes qu'elles subissent - sont aussi "au carrefour d'une grande partie de l'histoire ancienne commune de l'humanité", note Aparna Tandon, chargée de programme pour le Centre international d'études pour la conservation et la restauration des biens culturels.

Carrefour de civilisations

Une demi-douzaine de sites classés au patrimoine mondial de l'humanité par l'Unesco sont situés dans la zone touchée par cette nouvelle catastrophe.

Comme Alep en Syrie, un "carrefour des civilisations" déjà "détruit à 60% en 1822 par un séisme", rappelle Youmna Tabet, du Centre du patrimoine mondial. Sa citadelle a cette fois-ci connu d'"importants dégâts", estime l'agence onusienne.

A l'inverse, sur les sites turcs classés, "il semble qu'il n'y ait pas beaucoup de dégâts", remarque Maria Liouliou, qui travaille avec Mme Tabet. La forteresse de Diyarbakir, en Turquie, paraît ainsi avoir modérément souffert, dit-elle.

Mais il faudra impérativement des experts pour évaluer la sévérité des dégâts, souligne Samir Abdulac, un cadre du Conseil international des monuments et des sites, une organisation internationale non-gouvernementale qui œuvre pour la conservation de ces lieux dans le monde.

Et il faudra aussi s'intéresser à des sites non inscrits par l'Unesco au patrimoine mondial comme celui d'Antakya, prévient-il.

M. Abdulac met en garde contre ce qui apparaîtrait comme de "simples fissures" sans conséquences à "l'oeil du profane" mais qui peuvent "fragiliser un monument" au point qu'il "s'écroule tout seul quelques semaines plus tard".

Toutefois, "la priorité est de sauver les vies", insistent les spécialistes du patrimoine interrogés par l'AFP, ce qui impose de prêter moins d'attention dans un premier temps à celui- ci pour ne pas être soupçonné de privilégier les vieilles pierres aux vivants.

En témoigne une rencontre de l'AFP avec un responsable de quartier dans la vieille ville d'Antakya qui, interrogé sur l'histoire locale, a subitement abandonné son calme.

"Je viens de perdre deux frères et un neveu. J'évacue ma femme et ma fille aujourd'hui. Je n'ai plus d'argent, plus rien", s'agace-t-il. "Franchement j'ai d'autres priorités que le patrimoine."


Armes à Israël: les républicains tentent de forcer la main à Biden

Des Palestiniens déplacés marchent autour d'une flaque d'eau devant des bâtiments et des tentes détruits à Khan Yunis, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 mai 2024, au milieu du conflit en cours entre Israël et le groupe militant Hamas. (Photo par AFP)
Des Palestiniens déplacés marchent autour d'une flaque d'eau devant des bâtiments et des tentes détruits à Khan Yunis, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 mai 2024, au milieu du conflit en cours entre Israël et le groupe militant Hamas. (Photo par AFP)
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  • Pour les républicains, Joe Biden n'a pas le droit d'interférer dans la manière dont Israël mène sa campagne militaire, qui a provoqué un désastre humanitaire à Gaza
  • Mais 16 démocrates se sont joints aux républicains pour adopter la proposition de loi, défiant le chef de l'Etat

WASHINGTON: La Chambre américaine des représentants, dominée par les républicains, a voté jeudi une mesure largement symbolique visant à forcer le président démocrate Joe Biden à mettre fin à sa suspension d'une livraison de bombes à Israël.

Cette suspension de la livraison d'une cargaison d'armes, composée de bombes de 2 000 livres (907 kg) et de 500 livres (226 kg), a été décidée au moment où Washington, premier soutien militaire d'Israël, s'oppose à une offensive d'ampleur des troupes israéliennes à Rafah.

La mesure votée jeudi n'a aucune chance de devenir loi. En théorie, elle empêcherait M. Biden de geler toute aide militaire à Israël approuvée par le Congrès.

"Le président et son administration doivent immédiatement faire marche arrière et se tenir aux côtés d'Israël", a déclaré Mike Johnson, chef républicain de la Chambre des représentants, dans un communiqué.


Biden s'efforce de remobiliser l'électorat afro-américain

Le président américain Joe Biden s'exprime lors du service commémoratif des agents de la paix nationaux devant le Capitole américain à Washington, DC, le 15 mai 2024. (Photo, AFP)
Le président américain Joe Biden s'exprime lors du service commémoratif des agents de la paix nationaux devant le Capitole américain à Washington, DC, le 15 mai 2024. (Photo, AFP)
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  • Vendredi, Joe Biden ira prononcer un discours au Musée national de l'histoire et de la culture afro-américaine à Washington
  • La mobilisation des Afro-Américains avait été décisive dans la victoire de Joe Biden face à Donald Trump en 2020

WASHINGTON: A coup d'événements symboliques et d'interviews, Joe Biden, qui selon certains sondages serait en perte de vitesse auprès des Afro-Américains, s'efforce cette semaine de remobiliser cet électorat décisif.

Le président américain multiplie ainsi les hommages aux grandes luttes menées pour les droits civiques aux Etats-Unis.

Jeudi, le démocrate de 81 ans, qui va affronter son prédécesseur républicain Donald Trump pour un second mandat en novembre, a reçu les familles des plaignants d'un combat judiciaire emblématique contre la ségrégation scolaire, ayant débouché sur la décision "Brown vs Board of Education" de la Cour suprême.

Dans cet arrêt de 1954, la Cour a jugé que la séparation des élèves blancs et des élèves noirs dans les écoles violait la Constitution.

Vendredi, Joe Biden ira prononcer un discours au Musée national de l'histoire et de la culture afro-américaine à Washington.

Puis il rencontrera les représentants des "Divine Nine", des "fraternités" et "sororités" (associations typiques des universités américaines) fondées par des étudiants et des étudiantes noires.

Dimanche enfin, il doit s'exprimer lors de la remise des diplômes de l'université historiquement noire de Morehouse à Atlanta (sud-est), celle où étudia Martin Luther King, le grand meneur de la lutte pour les droits civiques dans les années 1960.

La Maison Blanche a d'ailleurs annoncé jeudi avoir investi au total 16 milliards de dollars dans la centaine d'universités historiquement noires du pays depuis l'élection de Joe Biden.

"Le président et moi-même restons déterminés à utiliser tous les moyens disponibles pour soutenir les universités historiquement noires", a commenté dans un communiqué la vice-présidente Kamala Harris, elle-même ancienne étudiante de l'un de ces établissements, la Howard University.

Gaza 

Reste à voir comment le démocrate, ferme soutien d'Israël, sera reçu à Morehouse, alors que certaines cérémonies de ce genre ont été perturbées récemment par des manifestants propalestiniens.

Concernant la guerre à Gaza, "il y a une inquiétude légitime", a dit le président américain, interrogé par une radio de la communauté afro-américaine à Atlanta (Géorgie, sud-est) à propos de ces mobilisations, en ajoutant: "Les gens ont le droit de manifester, de le faire pacifiquement."

Selon plusieurs sondages récents, Joe Biden, tout en restant nettement majoritaire auprès de cet électorat, perdrait du terrain auprès des électeurs noirs, en particulier les plus jeunes, dans certains Etats décisifs.

Parmi eux la Géorgie, ou encore le Wisconsin.

Ce n'est donc pas un hasard si Joe Biden a aussi accordé un entretien, également diffusé jeudi, à une radio afro-américaine de Milwaukee, dans cet Etat de la région des Grands Lacs.

Il y vante ses actions sociales et économiques en faveur des Afro-Américains et critique son opposant républicain.

"Il n'a littéralement rien fait (pour la communauté afro-américaine" et il veut empêcher son accès au vote", a dit Joe Biden.

Sur les ondes de la radio de Géorgie, il a déclaré: "Rappelez-vous qui est Trump. Il a accusé à tort les +Cinq de Central Park+", de jeunes Afro-Américains victimes d'une erreur judiciaire retentissante, "il a donné naissance aux théories du complot" autour de la nationalité de l'ancien président Barack Obama.

La mobilisation des Afro-Américains avait été décisive dans la victoire de Joe Biden face à Donald Trump en 2020. Il avait alors remporté 92% de leurs voix, contre 8% à son adversaire républicain, selon l'institut Pew Research.


Le micro d’une étudiante coupé alors qu’elle demande à Columbia de se mobiliser pour Gaza

Saham David Ahmed Ali s’exprime lors de la cérémonie de remise des diplômes de la Mailman School of Public Health de l’université Columbia. Son micro s’est coupé à deux reprises pendant son discours. (Capture d’écran)
Saham David Ahmed Ali s’exprime lors de la cérémonie de remise des diplômes de la Mailman School of Public Health de l’université Columbia. Son micro s’est coupé à deux reprises pendant son discours. (Capture d’écran)
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  • Le microphone s’est coupé à deux reprises pendant son discours, ce qui a incité les étudiants à huer et à scander «laissez-la parler» pendant que Mme Ali marquait une courte pause
  • On ne sait pas si le problème est dû à un défaut technique ou si le microphone a été délibérément coupé

LONDRES: Un microphone a brièvement été coupé cette semaine lors d’un discours prononcé au cours de la cérémonie de remise des diplômes de l’université Columbia aux États-Unis. L’oratrice avait critiqué la position de l’université à l’égard de Gaza.

Mardi, l’étudiante Saham David Ahmed Ali a prononcé un discours devant les diplômés de la Mailman School of Public Health. Elle a appelé à une action contre Israël, critiquant le «silence sur le campus de l’université Columbia».

Le microphone s’est coupé à deux reprises pendant son discours, ce qui a incité les étudiants à huer et à scander «laissez-la parler» pendant que Mme Ali marquait une courte pause. Elle a ensuite pu continuer. On ne sait pas si le problème est dû à un défaut technique ou si le microphone a été délibérément coupé.

Saham David Ahmed Ali a déclaré que l’université devait révéler ses relations avec des entreprises «tirant profit du génocide palestinien» et qu’elle devait immédiatement s’en désengager.

Elle a également demandé à Columbia d’appeler à un cessez-le-feu immédiat à Gaza, où les civils palestiniens sont actuellement confrontés à la famine, selon l’ONU, alors qu’Israël poursuit sa campagne militaire qui a fait plus de trente-cinq mille morts, des milliers d’autres blessés et des centaines de milliers de déplacés à la suite de l’attaque menée par le Hamas contre Israël le 7 octobre.

L’université Columbia a été témoin d’importantes manifestations sur son campus depuis le 17 avril après que la présidente de l’université, Minouche Chafik, a témoigné devant le Congrès américain au sujet d’incidents présumés d’antisémitisme contre des étudiants juifs sur son campus.

Les manifestants ont ensuite occupé certaines parties du campus, notamment le Hamilton Hall de l’université. La police de New York a arrêté des centaines de personnes à la suite de ces manifestations, qui ont également déclenché des mouvements similaires dans d’autres grandes universités américaines, ainsi que des contre-manifestations d’étudiants brandissant des drapeaux israéliens et américains.

Columbia a également pris la mesure inhabituelle d’annuler sa cérémonie d’ouverture cette année à la suite des manifestations, organisant uniquement des cérémonies de remise des diplômes propres à l’université.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com