Tout au long de la spectaculaire compétition de la Coupe du monde au Qatar, les journalistes israéliens ont passé plus de temps à raconter comment ils ont été «maltraités» par les Arabes sur place qu'à parler de football.
En Israël même, la violence est montée en flèche et, bien entendu, les Israéliens ne se concentrent que sur la violence dont ils sont victimes, tout en excusant celle qu'ils infligent aux Palestiniens.
Le double attentat à la bombe de la semaine dernière, qui a tué un adolescent israélien et en a blessé dix-huit autres, a provoqué l’ire des dirigeants israéliens et des médias, qui ont accusé les Palestiniens. Ce dont ils ont beaucoup moins parlé – et certainement sans émotion ni empathie – ce sont les meurtres par les forces de défense israéliennes, la police et les colons de dizaines d'adolescents palestiniens au cours de l'année dernière. Des dizaines de Palestiniens ont également été blessés. Et, bien sûr, aucune sanction n'a été prise pour incriminer le soldat israélien qui a assassiné la journaliste américano-palestinienne Shireen Abu Akleh.
Contrairement aux dirigeants israéliens, qui ne se désolent que de la mort des leurs, je suis attristé par toute cette violence. L'hypocrisie des Israéliens, qui condamnent la violence lorsque cela les arrange, renvoie une image peu glorieuse de leur peuple dans le monde entier, car chacun sait qu'Israël hausse les épaules face à la violence qu'il commet contre les Palestiniens.
Mais si je suis sincèrement attristé par tous les morts et les blessés – israéliens et palestiniens – ce sont les frustrations des journalistes israéliens qui couvrent la Coupe du monde au Qatar qui ont attiré mon jugement moral. Dès qu'ils en ont l'occasion, ils se plaignent d'être snobés par les Arabes, qui refusent de leur accorder des interviews.
Oh, pauvres petits Israéliens. Personne ne les aime vraiment. Personne ne veut être interviewé par eux. De nombreux athlètes arabes ont même refusé de concourir contre eux. Je me demande bien pourquoi.
Quel choc pour la réalité de la paix prétendument apportée par les accords d'Abraham! Si ces accords peuvent constituer un bon début sur la voie d'un accord de paix régional dont nous avons tant besoin, qu'ont fait les Israéliens pour répandre la paix à la suite des accords d'Abraham?
La vérité est peut-être qu'Israël n'en fait pas assez pour instaurer la paix dans la région. Il pourrait faire beaucoup plus pour concrétiser les accords d'Abraham et en faire un modèle pour un futur Moyen-Orient pacifique.
Plus important encore, le Qatar a retourné la situation contre les Israéliens, en leur rendant la monnaie de leur pièce. Cela devrait leur rappeler le manque de respect dont ils font preuve à l'égard des journalistes arabes, qui subissent la censure lorsqu'ils couvrent l'actualité en Israël et dans les territoires occupés. Je ne me souviens pas qu'un pays arabe ait exigé que les reportages des journalistes israéliens soient examinés par des censeurs avant d'être diffusés. La censure imposée à la couverture de la brutalité d'Israël à l'égard des Palestiniens fait honte aux journalistes qui s'y soumettent sans protester.
Mais avec le retour imminent de Benjamin Netanyahou à la tête du gouvernement, les choses ne vont pas s'améliorer, bien au contraire.
La semaine dernière, le Premier ministre désigné a chargé l'un des politiciens les plus extrémistes d'Israël, Itamar Ben-Gvir, président du parti Force juive, de superviser l'expansion des colonies illégales et la confiscation de nouvelles terres palestiniennes. Benjamin Netanyahou et Itamar Ben-Gvir ont accepté de modifier la loi sur le désengagement afin de permettre aux juifs de s'installer dans la colonie évacuée de Homesh, dans le nord de la Cisjordanie. Ils ont également accepté d'étendre les routes de contournement qui sont construites pour l'usage exclusif des colons israéliens juifs, et non pour les non-juifs qui vivent dans les territoires occupés.
Partout dans le monde on reconnaît qu'Israël hausse les épaules face à la violence qu'il commet contre les Palestiniens.
- Ray Hanania
Vous pouvez parier avec certitude qu'ils vont bientôt annexer la Cisjordanie, car c'est exactement ce que les partenaires politiques de M. Netanyahou réclament à cor et à cri depuis deux ans.
Les Palestiniens ne sont pas irréprochables, bien sûr. Ils ont aussi leurs extrémistes, comme nous avons pu le constater avec les deux attentats à la bombe. Mais le nombre d'actes de violence commis par les extrémistes palestiniens est loin d'égaler le nombre d'actes de violence commis par Israël.
Lors des dernières élections, les citoyens palestiniens d'Israël se sont tiré une balle dans le pied en refusant de voter pour le Premier ministre sortant, Yaïr Lapid, parce qu'ils n'étaient pas satisfaits de son leadership. Ils voulaient plus. Mais en s'abstenant de voter, ils se sont mis dans une situation difficile que Benjamin Netanyahou compte exploiter. Les Palestiniens obtiendront bien moins sous un gouvernement Netanyahou que sous Lapid, et les politiques de M. Netanyahou saperont les droits des Palestiniens et des Arabes et attiseront les flammes de l'extrémisme chez les politiciens israéliens.
Ray Hanania est un ancien journaliste politique et chroniqueur primé de la mairie de Chicago. Vous pouvez le joindre sur son site personnel à l'adresse www.Hanania.com.
Twitter : @RayHanania
NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.