Ce sont des moments incommodes pour Benjamin Netanyahou. Certes, il vient de remporter les élections, mais pour celui qui a été la figure politique de proue en Israël pendant si longtemps, tout le débat politique d'aujourd'hui ne le concerne pas lui, mais plutôt ceux qu'il est sur le point de renforcer.Vendredi, le nouveau Premier ministre israélien a remis les clés de la sécurité nationale israélienne à l'une des plus fortes têtes brûlées racistes du firmament politique israélien.
Le chef du Jewish Power, Itamar Ben-Gvir, occupera le poste fraîchement créé de ministre israélien de la Sécurité nationale, avec des pouvoirs supplémentaires considérables.De nombreux Palestiniens affirment que, comme cette oppression aura désormais un visage raciste, il sera plus difficile pour le monde extérieur de l'ignorer. Un militant palestinien des droits humains m'a dit: «Oui, ce sont des brutes racistes violentes, mais ceux qui ont été au pouvoir cette année ont assassiné un nombre de plus en plus important de Palestiniens. Au moins, ces types-là ne se cachent pas derrière un discours fantaisiste et de faux sourires.»
D'autres Palestiniens affirment qu'ils doivent réagir. Le double attentat à la bombe contre des arrêts de bus à Jérusalem la semaine dernière semble être la première réponse des militants palestiniens. Les Israéliens n'ont pas subi de telles attaques depuis des années, et cela a été un réveil douloureux avant ce qui pourrait devenir une vague d'attaques, ce que le Hamas tenait à souligner.Les Juifs israéliens laïcs ressentent également le vent glacial du fascisme qui est sur le point de gouverner. Un Israélien de Tel-Aviv m'a dit: «Nous devrons nous battre pour notre démocratie, notre mode de vie et pour tout espoir de pouvoir vivre avec nos voisins. C'est effrayant.»
L'ère de Ben-Gvir et de son compagnon Bezalel Smotrich a commencé. Ils fixent l'ordre du jour et font fixer le cadre des prochains mois. Avant même qu’ils n’assument des fonctions ministérielles, l'atmosphère avait changé. Les colons et leurs partisans se sentent encore plus renforcés que d'habitude. Et ce n’est pas peu dire. Environ 20 % des soldats israéliens ont voté pour la coalition du Sionisme religieux de Ben-Gvir et Smotrich. Pour les Palestiniens, cela signifie que sur cinq soldats qu'ils voient, un aura voté pour une liste antiarabe et aura approuvé la politique de tirer pour tuer appliquée à leur encontre.C'est particulièrement visible à Hébron, la ville la plus tendue de la Cisjordanie occupée. Un soldat israélien y a été filmé en train de frapper un militant de gauche israélien.
À Hébron, de nombreux militants se sont mis depuis longtemps à porter des caméras corporelles pour se protéger et prouver la complicité existante entre colons et militaires. Un soldat était content d'être filmé en train de fièrement menacer: «Ben-Gvir va mettre de l'ordre ici. Vous avez perdu. Tout ce que vous faites ici est terminé. Lorsque l'activiste lui a demandé s'il faisait quelque chose contre la loi, le soldat a répondu: «Vous faites tout contre la loi. Je décide quelle est la loi, et vous agissez contre la loi.»Ben-Gvir est un héros à Hébron parmi les colons, notamment les 800 qui habitent le centre-ville, pour qui la ville a été divisée et le centre historique fermé à presque tous les Palestiniens. Ben-Gvir lui-même est un colon de Kiryat Arba, à l'est de la ville.
Il y a un peu plus d'une semaine, 30 000 colons israéliens et leurs partisans se sont rassemblés à Hébron. Ce qui a suivi était, comme beaucoup se sont accordés à le dire, presque un pogrom. Alors que l'armée israélienne ouvrait une entrée vers le reste de la ville, les colons ont fait irruption, détruisant les étals et battant les Palestiniens sous le regard des soldats.
Au sud d'Hébron, l'armée israélienne a détruit au bulldozer une école financée par l'UE à Masafer Yatta, afin d’aider les colons. Un témoin israélien m'a raconté comment l'armée a utilisé des grenades assourdissantes contre les écoliers, qui ont été forcés de sauter par la fenêtre de leurs salles de classe.Le mandat de Ben-Gvir ne devrait, en théorie, pas s'étendre en Cisjordanie. Celle-ci dépend du ministre de la Défense et de l'armée, qui, selon le droit international, devrait être le maître souverain effectif des 3 millions de Palestiniens et des 700 000 colons qui habitent ce territoire, les premiers en toute légalité, les seconds en violation du droit international.
Pourtant, Ben-Gvir va contrôler la police des frontières israélienne qui opère en Cisjordanie. Ainsi, en plus des colons armés qui le vénèrent, il aura également sa propre force à déployer, pour réprimer les manifestations et peut-être pour légaliser les avant-postes de colonisation. On voit mal qui mettra un frein à ses ambitions annexionnistes et expansionnistes.
Ben-Gvir peut également déclencher des conflits en s’ingérant dans de ce qui reste du statu quo sur le Al-Haram al-Sharif. Il considère que l'accord actuel est «raciste» car il ne permet pas aux Juifs de prier sur l'esplanade. Il a affirmé que les Juifs étaient «propriétaires des lieux».
Smotrich, également colon, a lui aussi les yeux rivés sur la Cisjordanie. Il a exigé non seulement le portefeuille israélien des Finances, mais aussi le contrôle de l'administration civile en Cisjordanie. Cela relevait également jusqu’ici du ministère israélien de la Défense.Si Netanyahou cède ce terrain dans les pourparlers de la coalition, ce sera une annexion à part entière. La gestion de la Cisjordanie aura été transférée de l'armée à un ministère civil israélien. Smotrich aura une énorme influence sur l'empire colonial des colons, qu'il étendra avec enthousiasme. Les Palestiniens obtiennent péniblement un permis de construire dans les 60 % de la Cisjordanie sous contrôle total israélien, et il espère avoir la capacité de leur refuser même ces quelques permis.
Pour les citoyens palestiniens d'Israël, le nouveau rôle de Ben-Gvir ne sera pas moins menaçant. Son parti sera en charge du développement dans les régions du Néguev et de la Galilée, qui comptent d'importantes populations palestiniennes. Les attaques de la semaine dernière à Abou Ghosh ne sont malheureusement, et presque certainement, qu'un début. Cinq voitures ont été incendiées dans cette ville palestinienne à l'ouest de Jérusalem. Les auteurs ont laissé l'une de leurs cartes de visite habituelles, un graffiti disant «Expulsez les Arabes».
«L'oppression systémique continuera, mais avec le renfort supplémentaire de fascistes vicieux à la barre»
Chris Doyle
L'oppression systémique se poursuivra, mais avec le renfort supplémentaire de fascistes vicieux à la barre, qui se soucient peu des opinions de leurs compatriotes israéliens, sans parler de la communauté internationale. Davantage de Palestiniens seront tués, davantage de vies seront gâchées. De nouvelles attaques contre des civils israéliens sont malheureusement probables.
Netanyahou peut sembler être le «modéré» de cette équipe hétéroclite de ministres, mais il a toujours été capable d’adapter ses positions politiques aux circonstances. Au mieux, il pourrait essayer d'utiliser la pression américaine pour calmer les éléments les plus zélés de son cabinet. Au pire, il peut chevaucher ce tigre extrémiste qu'il a aidé à faire naître.
Chris Doyle est le directeur du Council for Arab-British Understanding, basé à Londres.
Twitter: @Doylech
NDLR: Les opinions exprimées dans cette rubrique par leurs auteurs sont personnelles, et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d’Arab News.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com