PARIS: Entre nouvelles mesures et matches retour, l'Assemblée a démarré lundi l'examen de retouches à la loi de finances 2022, incluant des rallonges contre l'inflation, et relancé les débats tendus des dernières semaines sur les superprofits ou les superdividendes.
Il s'agit du deuxième projet de budget rectificatif cette année, après celui adopté cet été au terme de joutes acharnées conclues par un compromis avec la droite.
Un dénouement que le gouvernement espère reproduire pour ne pas avoir à activer une nouvelle fois l'article 49.3 de la Constitution, qui permet d'adopter des textes sans vote - sauf adoption d'une motion de censure.
La Première ministre Élisabeth Borne a déjà dégainé quatre fois cet outil sur les budgets de l’État et de la Sécurité sociale.
En sera-t-il autrement pour ces ajustements du budget 2022? "Le texte traduit une volonté de soutenir et protéger", a fait valoir le ministre délégué aux Comptes publics, Gabriel Attal, voulant croire "qu’une large majorité peut être rassemblée derrière".
Retour des superprofits et superdividendes
Il a défendu les mesures pour les universités face à la hausse des prix de l'énergie, pour les armées face à la flambée des carburants ou le prolongement de la ristourne à la pompe de 30 centimes par litre jusqu'au 15 novembre.
Le gouvernement prévoit aussi le versement d'un nouveau chèque énergie de 100 à 200 euros pour les plus modestes, soit un montant de 1,5 milliard d'euros.
M. Attal a promis de l'"ouverture" aux oppositions, notamment sur une aide exceptionnelle pour les Français se chauffant au bois.
Mais pas question de vivre une "redite des débats" sur le budget de l'Etat, a-t-il insisté.
En vain. Plusieurs dispositions, écartées ou non discutées en raison de la procédure de 49.3 sur ce texte, ont été remises sur la table.
La gauche a défendu une déclinaison de mesures pour une taxe sur les superprofits, rejetées par la majorité et le gouvernement qui défend son projet de mécanisme à l'échelle européenne.
Le rétablissement de l'exit-tax et un mécanisme de taxation des "superdividendes" - votés lors de l'examen du budget de l'Etat, puis écartés grâce au 49.3 - ont également été rediscutés et rejetés.
Dans un rare moment d'entente, les députés ont acté le lancement d'une mission sur les frais importants qui incombent aux résidents en Ehpad.
À l'origine, un amendement de la socialiste Christine Pires Beaune, soutenu par la gauche, le groupe Liot, et des LR. Il avait été adopté par les députés, puis écarté par l'exécutif, en raison de son coût estimé à environ 700 millions d'euros.
La députée l'a de nouveau défendu lundi, mais Gabriel Attal lui a proposé en retour de mener une mission sur cette question.
S'en est suivi un conciliabule avec une quinzaine de députés. Selon des participants, le ministre a proposé le retrait des amendements et que des mesures issues de la future mission soient soumises dans des textes l'an prochain.
La députée Pires Beaune a ensuite accepté publiquement, demandant toutefois "les moyens d'accompagnement des services (du ministère) pour faire un travail de qualité".
«Aucune mesure négative»
Du côté de la droite, on n'exclut pas de saisir la main tendue par l'exécutif pour voter ce budget rectificatif, bien qu'elle trouve toujours le gouvernement trop dépensier. "Nous réservons notre vote en fonction du sort des amendements", a dit la députée LR Véronique Louwagie, insistant sur des mesures pour la rénovation thermique des logements.
Un premier amendement sur un crédit d'impôt pour accélérer cette rénovation a été rejeté, mais Les Républicains ont prévu d'autres propositions.
La gauche juge globalement les mesures proposées insuffisantes, même si les socialistes n'excluent pas de s'abstenir face à un texte où il n'y a "aucune mesure négative". Elle insiste pour des gestes supplémentaires en faveur de la rénovation thermique, et pour les associations oeuvrant dans l'aide alimentaire.
"Certaines mesures vont clairement dans le bon sens", a admis le président LFI de la commission des Finances Eric Coquerel, en dépit de "problèmes (qui) ne sont traités qu'en surface".
Le député RN Alexandre Sabatou a lui jugé le texte "décevant", même s'il est "difficile de le rejeter en bloc".