Un incroyable accord sur les frontières maritimes entre Israël et le Liban a été conclu: une lumière d’espoir pour le pays du Cèdre. La communauté internationale doit maintenant s’assurer qu’il profite aux Libanais.
Alors que le monde bruisse de mille bruits de bottes et que l’Ukraine est en guerre aux frontières de l’Europe, la paix vient de faire irruption au Moyen-Orient, alors qu’elle avait déserté la région depuis si longtemps. Le Liban et Israël viennent en effet de signer un accord historique portant sur les eaux territoriales.
Cette étape extraordinaire dans la normalisation des relations entre deux pays amis de la France ne peut nous laisser indifférents.
Le président Macron, comme beaucoup d’autres leaders, ont, à différentes reprises, souhaité et espéré des réformes de fond du Liban, au regard notamment de la corruption endémique qui mine le pays.
L’arrivée de revenus nouveaux va attirer toutes les convoitises. C’est pourquoi je pense que, dans le respect de la souveraineté du Liban, ses amis doivent prendre une initiative forte.
On pourrait très bien imaginer un «fonds énergie pour le Liban» comportant une gouvernance internationale et réservant une place aux associations qui, au Liban, luttent contre la corruption.
Dans l’intérêt de tous les Libanais, les habituels bailleurs de fonds (la France, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis) devraient engager une réflexion sur le contrôle de ces nouveaux revenus et des contrats qui sont déjà en négociation, avec les autres bailleurs de fonds du Liban, en associant évidemment le FMI et la Banque mondiale, pour garantir que les revenus à venir servent aux Libanais durement éprouvés par une crise interminable.
Les différentes conférences CEDRE organisées pour soutenir l’économie du pays ont été des échecs pour le peuple libanais. Cette fois, la pax doit lui profiter directement.
Les récentes affaires de clients braquant leurs banques pour récupérer leur propre argent montrent combien le pays vit sous perfusion. Comme tous les malades sous perfusion, l’arrivée massive d’air (ici d’argent) pourrait provoquer une fausse route… loin des destinataires naturels: les Libanais.
On pourrait très bien imaginer un «fonds énergie pour le Liban» comportant une gouvernance internationale et réservant une place aux associations qui, au Liban, luttent contre la corruption.
Le modèle du Fonds souverain norvégien, adapté aux circonstances, serait intéressant, les pratiques de ce pays nordique étant connues pour leur éthique et leur probité. Il faut en effet, et dès à présent, assurer une totale transparence dans la négociation des contrats avec un contrôle parlementaire accru.
Il faut aussi être vigilant pour prévenir les conflits d’intérêts qui pourrissent la vie politique, et pas seulement au Liban, et interdire aux personnes en charge de la négociation d’avoir des intérêts directs ou indirects dans les opérations à venir sur ce sujet.
C’est d’autant plus crucial quand on connaît la corruption endémique du pays, la colère de la rue et des Libanais privés de tout, y compris de leur propre argent. Quand on sait aussi que le procès de l’explosion du port de Beyrouth s’enlise pour les mêmes motifs.
Le peuple libanais a vécu trop d’injustices, nous serions coupables et complices si nous n’agissions pas, en proposant un mécanisme de protection internationale.
Que les amis du Liban, comme des fées, se penchent avec volonté et éthique au-dessus du berceau de cet accord historique.
Que ce miracle diplomatique soit le signe d’un renouveau de la paix et de la prospérité dans cette région qui a trop souffert.
Que la manne pétrolière serve aux Libanais sans être confisquée par des politiciens sans scrupule.
C’est le devoir et l’honneur de la communauté internationale de s’en assurer.
Nathalie Goulet est une femme politique française. Sénatrice de l'Orne depuis 2007, elle est membre du groupe Union des démocrates et indépendants au Sénat.
Twitter: @senateur61
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.