Chaque fois qu'une synagogue est vandalisée dans le monde arabe, ou même en Occident, l'incident est souvent qualifié de crime de haine et largement condamné.
Les Américains, en particulier, sont exposés à une large couverture de ces attaques dans les médias grand public, qui véhiculent les rapports sur les dommages matériels et les implications de la violence antisémite et alimentent les stéréotypes racistes associés aux Arabes, aux musulmans et, surtout, aux Palestiniens.
Les accusations de haine, d'antisémitisme et de racisme sont des armes souvent utilisées par les partisans d'Israël pour détourner la vérité sur les brimades souvent violentes que subissent les Palestiniens chrétiens et musulmans.
Mais lorsqu'une église chrétienne de Jérusalem est saccagée par des soldats israéliens envoyés pour faire taire plusieurs organisations de défense des droits de l'homme qui ont dénoncé la conduite criminelle d'Israël en matière d'apartheid, ces histoires servent d’appât politique et les dommages causés à l'église sont minimisés.
À quel point la situation des chrétiens en Israël est-elle mauvaise? À vrai dire, leur population n’a cessé de diminuer au fil des ans, et la politique israélienne à l'égard des chrétiens a été pleinement révélée lorsque des tireurs d'élite israéliens ont pris pour cible et tué Shireen Abu Akleh, une journaliste palestinienne chrétienne d'Al Jazeera qui était également citoyenne américaine.
Étonnamment, plus de cent jours se sont écoulés depuis qu'elle a été tuée, le 11 mai, alors qu'elle couvrait un raid israélien à Jénine. Elle a reçu une balle dans la tête alors qu'elle portait un gilet et un casque qui l'identifiaient clairement comme une journaliste et un membre des médias.
Tout comme le meurtre d'Abu Akleh va tomber dans l'oubli, les attaques contre les sites chrétiens vont se dissiper très rapidement.
Ray Hanania
Bien que les responsables américains aient dénoncé ce meurtre, rien n'a été fait et rien ne se fera. La poursuite de la violence des autorités israéliennes et les réponses défensives des civils palestiniens éclipsent l'horreur des crimes commis et se fondent dans l'indifférence.
La semaine dernière, des soldats israéliens ont attaqué à Ramallah les bureaux d'Al-Haq, une ONG indépendante palestinienne de défense des droits humains. Créée en 1979 pour protéger et promouvoir les droits de l'homme et l'État de droit dans les territoires occupés, deux principes que les politiques d'apartheid d'Israël ignorent souvent, Al-Haq est reconnue à l’échelle internationale pour son dévouement aux droits de l'homme et bénéficie d'un «statut consultatif spécial» auprès de l'ONU.
La perquisition d’Al-Haq s'inscrit dans le cadre d'une vaste campagne de répression menée par Israël contre les organisations de défense des droits humains. Des descentes similaires ont été menées dans les bureaux d'Addameer, du Bisan Center for Research and Development, de Defence for Children International Palestine, de l'Union of Agricultural Workers Committees et de l'Union of Palestinian Women's Committees.
Pour le gouvernement israélien, dévoiler les violations des droits de l'homme, fournir des services aux femmes et aux familles dans le besoin, défendre les enfants et faire des «recherches», chacune de ces actions est considérée comme un acte de «terrorisme».
Et lorsqu'Israël qualifie de «terroriste» un individu ou une organisation, les autorités peuvent faire à peu près tout ce qu'elles veulent, y compris endommager une église presbytérienne dans laquelle l’une de ces organisations louait des bureaux. Le diocèse épiscopal chrétien de Jérusalem a condamné l'attaque de l'église anglicane et épiscopale Saint-Andrews, qui a eu lieu à 3 heures du matin le 18 août. Elle est située à Ramallah, où vit l'une des plus grandes communautés chrétiennes de la Cisjordanie occupée.
Des fenêtres et des objets en verre ont été brisés. Des portes et des étagères ont été détruites. Les soldats israéliens sont entrés dans l'église en tirant, ont utilisé des grenades assourdissantes et ont terrorisé les personnes qui se trouvaient à l'intérieur.
Je n'ai vu aucune condamnation de la conduite israélienne de la part de Guilad Erdan, l'ambassadeur israélien aux Nations unies, ou de son prédécesseur, Danny Danon, en réponse à l'attaque de l'église chrétienne.
Ils sont cependant souvent parmi les premiers à crier à l'antisémitisme, comme lorsqu'Emma Watson, la star britannique de la série de films Harry Potter, a exprimé sa solidarité avec la cause palestinienne en publiant sur les médias sociaux une photo prise lors d'un rassemblement propalestinien et en déclarant: «La solidarité est un verbe.»
Emma Watson a également fait référence à une citation de la militante anglo-australienne Sara Ahmed, qui a déclaré: «La solidarité ne suppose pas que nos luttes sont les mêmes luttes, ou que notre douleur est la même douleur, ou que notre espoir concerne le même avenir. La solidarité implique un engagement, et un travail, ainsi que la reconnaissance que, même si nous n'avons pas les mêmes sentiments, ou les mêmes vies, ou les mêmes corps, nous vivons sur un terrain commun.»
Comme ces mots dangereux! Ils sont tellement plus violents que le fait d’endommager une église chrétienne!...
Danon a qualifié les actions de Watson d’antisémites. C’est un porte-parole éloquent d'Israël, mais il pourrait faire beaucoup plus pour la cause de la paix s'il se concentrait moins sur la diabolisation de ceux qui critiquent légitimement les actions du gouvernement et s'il cherchait plutôt des moyens de rapprocher les peuples israélien et palestinien.
Mais Danon et Erdan ne sont que la partie émergée de l'iceberg en ce qui concerne les efforts des mouvements pro-israéliens pour minimiser les crimes du gouvernement israélien contre les Palestiniens tout en exagérant la nature des opinions exprimées par les critiques d'Israël, aussi ineptes ou légères soient-elles.
Rien n'échappe à leur colère exagérée, car il s'agit d'une stratégie destinée à détourner l'attention du public des actions d'Israël et à façonner une compréhension pro-israélienne du conflit israélo-palestinien parmi les publics cibles, dont les Américains.
Tout comme le meurtre d'Abu Akleh va tomber dans l’oubli, les attaques contre les sites chrétiens vont se dissiper très rapidement. En effet, avant que vous puissiez vous concentrer sur ce qu'Israël a fait à Abu Akleh ou à l'église Saint-Andrews, quelque chose d'aussi flagrant se produira et permettra d’occulter les crimes racistes d'apartheid d'Israël.
Si Israël parvient à distraire suffisamment longtemps ses publics cibles, tels que les Américains, ces derniers finiront par adhérer sans réserve à ses mensonges et à sa propagande. Personne ne sait mieux que le gouvernement israélien que plus l'intensité des crimes contre une population est grande, plus il est difficile pour cette population de faire comprendre les principes sous-jacents qui motivent ces crimes.
De manière tragique, les Palestiniens facilitent la tâche d'Israël par leur manque de communication professionnelle et leur méconnaissance du pouvoir de la perception.
En effet, c’est sur la perception que se fonde la communication occidentale, et non sur la vérité.
Ray Hanania est un ancien journaliste politique et chroniqueur plusieurs fois primé de la mairie de Chicago. Vous pouvez le joindre sur son site personnel à l'adresse www.Hanania.com. Twitter: @RayHanania
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.