En France, des élections législatives à haut risque pour Macron

La formation politique d’Emmanuel Macron, table sur une majorité parlementaire absolue à l’issue des élections (Photo, AFP).
La formation politique d’Emmanuel Macron, table sur une majorité parlementaire absolue à l’issue des élections (Photo, AFP).
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Publié le Dimanche 12 juin 2022

En France, des élections législatives à haut risque pour Macron

  • Le résultat de ces élections façonnera le rapport de force entre les différentes composantes politiques pour les cinq prochaines années
  • Pour la première fois depuis l’entrée en vigueur de la réforme du quinquennat, un président en exercice est réélu pour un second mandat, ce qui donne au prochain scrutin législatif toute sa particularité

PARIS: À peine tournée la page de l’élection présidentielle, les Français sont à nouveau appelés aux urnes les 12 et 19 juin pour des élections législatives qui s’annoncent périlleuses pour Emmanuel Macron. Leur résultat façonnera le rapport de force entre les différentes composantes politiques pour les cinq prochaines années.

Elles comportent donc un enjeu d’envergure pour la classe politique qui s’acharne à remobiliser une opinion publique dont le désintérêt pour les échéances électorales était déjà flagrant lors de la présidentielle avec une abstention d’environ 30%.

Depuis la réforme qui a donné lieu à l’adoption du quinquennat pour le mandat présidentiel en 2002 et à l’inversion du calendrier électoral de façon à ce que les législatives succèdent à la présidentielle, les Français ont toujours assuré une majorité au président nouvellement élu, afin d’assurer une plus grande stabilité gouvernementale. Or cette année, et pour la première fois depuis l’entrée en vigueur de cette réforme, un président en exercice est réélu pour un second mandat. C’est précisément la reconduction du chef de l’État dans sa fonction qui donne au prochain scrutin législatif toute sa particularité.

Il est évident que la République en marche, rebaptisée «Renaissance», la formation politique d’Emmanuel Macron, table sur une majorité parlementaire absolue à l’issue des élections. Mais contrairement aux législatives de 2017, ce but semble incertain et loin d’être acquis, pour des raisons multiples. Tout d’abord le bilan du quinquennat Macron est négatif aux yeux d’un large nombre de Français qui a voté pour lui au second tour de la présidentielle par rejet de Marine Le Pen, la dirigeante du parti d’extrême droite, le Rassemblement national (RN). 

Ces électeurs misent sur les législatives pour rectifier le tir et priver le président réélu d’une majorité parlementaire absolue qui lui sera nécessaire pour mener à bien ses réformes. Pour illustrer clairement cet état d'esprit, il est utile de revenir aux résultats du premier tour de la présidentielle: Macron est arrivé en tête, mais il a été suivi de près par Le Pen et le dirigeant de la France insoumise, Jean-Luc Mélenchon. L’écart des voix entre les candidats n’était pas très important, Macron ayant obtenu 27,84% des suffrages, contre 23,15% pour Le Pen et 21,95% pour Mélenchon. L’échiquier politique est apparu partagé entre un bloc libéral, identitaire et populiste. 

S’appuyant sur les résultats de ce premier tour, Mélenchon a réussi la prouesse d’unir les forces de gauche, sous la bannière de la «Nouvelle union populaire, écologique et sociale» (Nupes), et  s’est lancé le défi d’arriver en tête aux législatives et de s’imposer comme Premier ministre de cohabitation face à Macron le libéral.

Une prétention qui n’est pas sans inquiéter le camp présidentiel, d’autant plus qu’un sondage BVA montre que 64% des Français souhaitent une cohabitation. C’est cette inquiétude qui transparaît dans les propos de Macron, qui a affirmé que même si la Nupes arrivait en tête, il n’avait nullement l’intention de choisir Mélenchon comme Premier ministre.

Les résultats du premier tour des législatives, qui suscitent peu d’engouement et ne sont suivies que par environ 37% des Français, montreront s’il existe une véritable volonté d’entraver l’action présidentielle et de propulser le pays dans une période d’instabilité. À défaut d’ancrage régional et en raison d’un mode de scrutin proportionnel, Le Pen se fixe un pari plus modeste, celui d’enfin obtenir un groupe parlementaire.

Pour ce faire, elle s’adosse à son score au second tour de la présidentielle et compte plus précisément sur les 150 circonscriptions où elle est arrivée en tête face à Macron. Elle affirme pouvoir gagner les législatives dans ces mêmes circonscriptions. Il va de soi qu’elle aussi veut empêcher le président de la République d’avoir les pleins pouvoirs et nourrit l’espoir de se dresser face à lui comme cheffe de l’opposition. Alors que les sondages la gratifient de 20 à 50 sièges parlementaires, ce qui est bien éloigné des 150 sièges qu’elle convoite, la leader du RN doit gérer les tensions sur le terrain entre les candidats de son parti et ceux d’Éric Zemmour (également d’extrême droite), dont elle a refusé la main tendue. Les résultats dérisoires de ce dernier à la présidentielle ne représentent aucune valeur ajoutée aux yeux de Marine Le Pen. 

Macron, quant à lui, la renvoie dos à dos avec Mélenchon, les deux présentant selon lui un projet «de désordre» et de «soumission» face à la Russie. Pour ce qui est enfin du parti Les Républicains (droite traditionnelle), qui a essuyé une débâcle spectaculaire à la présidentielle, c’est le sauve-qui-peut. Les députés de ce parti, au nombre de 80, comptent sur leur ancrage local pour conserver leurs sièges. Le résultat du scrutin permettra de dire si ce parti sera à même de se reconstruire ou s’il est voué à disparaître.


Les députés érigent l'agriculture en « intérêt général majeur »

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  • "La protection, la valorisation et le développement de l'agriculture et de la pêche sont d'intérêt général majeur en tant qu'ils garantissent la souveraineté agricole et alimentaire de la Nation, qui contribue à la défense de ses intérêts fondamentaux"
  • L'engagement avait été pris par Emmanuel Macron au salon de l'Agriculture, alors que la colère des agriculteurs battait son plein

PARIS: Les députés ont approuvé jeudi un article du projet de loi agricole qui prévoit de conférer à l'agriculture un caractère "d'intérêt général majeur", une innovation juridique censée répondre à une demande des agriculteurs, mais dont les oppositions contestent la portée.

"La protection, la valorisation et le développement de l'agriculture et de la pêche sont d'intérêt général majeur en tant qu'ils garantissent la souveraineté agricole et alimentaire de la Nation, qui contribue à la défense de ses intérêts fondamentaux", énonce cet article-clé du projet de loi.

L'engagement avait été pris par Emmanuel Macron au salon de l'Agriculture, alors que la colère des agriculteurs battait son plein. "Sur le plan juridique, ça positionne l'agriculture en équilibre avec l'environnement", avait approuvé Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, premier syndicat agricole.

"Cela va venir produire, sur le long terme, des effets dans la manière dont vont pouvoir être pondérés différents objectifs de politiques publiques, et dans la manière dont, sur le terrain, des projets agricoles pourront être évalués, réalisés et développés", a affirmé le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau.

Plusieurs députés -- à l'instar de juristes --, doutent cependant de sa portée.

La mesure "crée le fantasme d'une remise en cause de la charte de l'environnement" et "donne l'illusion au monde paysan qu'on a répondu de façon démagogique à toutes ces attentes d'être au-dessus du reste des normes, du droit", a fustigé Dominique Potier (PS).

Nicole Le Peih, rapporteure Renaissance, a admis qu'il s'agissait d'une "innovation juridique" qui ne "modifie pas la hiérarchie des normes".

"Il n'y a pas de remise en cause du principe constitutionnel de la protection de l'environnement" mais "lorsque plusieurs dispositions législatives seront en présence, voire seront contradictoires, l'agriculture fera désormais l'objet d'une attention spécifique", a-t-elle soutenu.

« Intentions »

L'article propose également une longue définition de la souveraineté alimentaire et agricole de la France, reposant notamment sur sa capacité à "produire, transformer et distribuer" les produits nécessaires à "une alimentation suffisante, saine (et) sûre".

Il pose aussi le principe "d'ici au 1er juillet 2025 puis tous les dix ans d'une programmation pluriannuelle de l'agriculture".

Le reste consiste surtout en une longue liste de bonnes pratiques que les politiques publiques sont censées suivre pour assurer cette "souveraineté alimentaire".

L'article a surtout permis à chaque groupe de faire valoir sa vision de l'agriculture, et au camp présidentiel de jouer la carte de la co-construction.

Il a intégré certains objectifs proposés par Les Républicains (justifier et évaluer les surtranspositions avant de les mettre en place, valoriser les agricultrices) ou la gauche (améliorer les conditions de travail des agriculteurs, développer la prévention sanitaire).

Mais l'article "n'a aucune valeur normative" et n'apporte "aucune contrainte", a déploré Sébastien Jumel (PCF). Aurélie Trouvé (LFI), a dénoncé l'absence de mesures pour des "prix planchers".

"C'est caricatural", a rétorqué Henri Alfandari (Horizons), estimant que les agriculteurs demandaient aussi de la clarté sur leurs missions. L'article pose des "intentions qui encouragent", pour Julien Dive (LR).

Les députés RN ont eux fustigé le manque de soutien à leurs amendements.

Les règles de la procédure parlementaire ont aussi donné lieu à une fin de séance kafkaïenne, les députés passant près d'une heure et demie à voter ou rejeter près de 560 amendements, dont certains avaient été débattus de nombreuses heures auparavant.

"C'était complètement dingue", soupirait une députée en sortant, mi-amusée, mi-fatiguée.


Nourriture, santé: opérations de « ravitaillement » en vue en Nouvelle-Calédonie

Les autorités de Nouvelle-Calédonie ont annoncé plusieurs mesures vendredi pour pallier les difficultés d'accès à l'alimentation et aux soins, notamment en libérant les grands axes routiers pour une opération de "ravitaillement", après quatre jours d'émeutes sur l'archipel. (AFP).
Les autorités de Nouvelle-Calédonie ont annoncé plusieurs mesures vendredi pour pallier les difficultés d'accès à l'alimentation et aux soins, notamment en libérant les grands axes routiers pour une opération de "ravitaillement", après quatre jours d'émeutes sur l'archipel. (AFP).
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  • "Il y a des problèmes d'approvisionnement que nous allons résoudre: une manœuvre de ravitaillement va être mise en place"
  • Pour cela, le Haut-commissaire compte sur les renforts de sécurité intérieure qui sont arrivés dans la nuit de jeudi à vendredi, soit près d'un millier d'effectifs

NOUMEA: Les autorités de Nouvelle-Calédonie ont annoncé plusieurs mesures vendredi pour pallier les difficultés d'accès à l'alimentation et aux soins, notamment en libérant les grands axes routiers pour une opération de "ravitaillement", après quatre jours d'émeutes sur l'archipel.

"Il va falloir faire un énorme travail pour rétablir le fonctionnement de la société du Grand Nouméa, qui a été durement impactée par tout ce qui a été pillé et détruit", a prévenu vendredi le représentant de l'Etat sur ce territoire du Pacifique sud, Louis Le Franc.

Le Haut-commissaire de la République a retenu pour l'heure deux "priorités": alimentation et santé.

"Il y a des problèmes d'approvisionnement que nous allons résoudre: une manœuvre de ravitaillement va être mise en place", a-t-il déclaré devant la presse à Nouméa.

Pour cela, le Haut-commissaire compte sur les renforts de sécurité intérieure qui sont arrivés dans la nuit de jeudi à vendredi, soit près d'un millier d'effectifs. Ils doivent permettre de dégager les axes routiers "qu'on a besoin d'emprunter pour que les convois de réapprovisionnement alimentaire, de réapprovisionnement en médicaments, puissent se diriger vers les structures où c'est nécessaire, vers les surfaces commerciales".

Les forces de l'ordre doivent aussi "libérer tous ces barrages" qui émaillent encore l'agglomération, selon lui.


France-Palestine: l'Assemblée rejette la transformation du groupe d'étude en « groupe d'amitié »

Un manifestant brandit des fusées tandis que deux autres tiennent une banderole « Solidarité avec la Palestine » lors d'une manifestation pro-palestinienne dans la cour de l'Institut d'études politiques (Sciences Po) à Lyon, dans le centre-est de la France, le 30 avril 2024. (AFP).
Un manifestant brandit des fusées tandis que deux autres tiennent une banderole « Solidarité avec la Palestine » lors d'une manifestation pro-palestinienne dans la cour de l'Institut d'études politiques (Sciences Po) à Lyon, dans le centre-est de la France, le 30 avril 2024. (AFP).
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  • L'Assemblée compte déjà en son sein "un groupe d'étude à vocation internationale" (GEVI) sur la Palestine, présidé par le député MoDem Richard Ramos, et qui réunit en son sein des députés de plusieurs bancs
  • M. Ramos souhaitait qu'il soit transformé en un "groupe d'amitié", comme il en existe pour la plupart des Etats, dont Israël

PARIS: Le Bureau de l'Assemblée nationale, sa plus haute instance collégiale, a rejeté mercredi la demande de transformation d'un groupe d'étude France-Palestine en "groupe d'amitié", estimant que ses critères de création n'étaient pas réunis, au grand dam de la gauche et de son président MoDem.

L'Assemblée compte déjà en son sein "un groupe d'étude à vocation internationale" (GEVI) sur la Palestine, présidé par le député MoDem Richard Ramos, et qui réunit en son sein des députés de plusieurs bancs. M. Ramos souhaitait qu'il soit transformé en un "groupe d'amitié", comme il en existe pour la plupart des Etats, dont Israël.

Ces structures, qui disposent d'un budget, peuvent prendre des initiatives diplomatiques et culturelles, notamment auprès de Parlements et parlementaires étrangers, en effectuant par exemple des déplacements ou en invitant au contraire des représentants et citoyens étrangers en France.

La demande de M. Ramos a été rejetée par 11 voix contre 8, dans un contexte tendu par la guerre entre Israël et le Hamas, et la menace d'une large offensive terrestre à Rafah.

La gauche a voté pour. La droite et l'extrême droite s'y sont opposées selon des sources parlementaires, comme la plupart des élus du camp présidentiel.

M. Ramos a dénoncé une "erreur historique".

La présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet s'est prononcée contre, les critères présidant à la création d'un groupe d'amitié n'étant pas réunis selon son entourage: l'existence d'un Parlement dans l'Etat, la reconnaissance de l'Etat par l'ONU, et des relations diplomatiques avec la France.

L'Autorité palestinienne dispose d'une représentante en France mais "ça fait plus de 17 ans (2006, NDLR) qu'il n'y a pas eu d'élections législatives, et la Palestine n'est pas reconnue à l'ONU", argue une source parlementaire.

"Le Parlement existe", et s'il n'y a pas eu d'élections c'est parce qu'"on n'arrive pas à faire avec nos amis Israéliens de vote à Jérusalem-Est", a rétorqué M. Ramos.

Le MoDem divisé 

Un autre argument de certains opposants à la mesure est que les GEVI permettent de conduire des initiatives diplomatiques similaires aux groupes d'amitié. Mais M. Ramos plaide pour qu'un groupe d'amitié France-Palestine vienne "travailler de façon commune" avec le groupe France-Israël, par exemple pour organiser des voyages à Jérusalem.

"En diplomatie il faut une symétrie des formes", a-t-il insisté.

Il a par ailleurs regretté que deux députées MoDem aient voté contre le groupe d'amitié sur ce vote serré, alors qu'il assure que son groupe politique s'est prononcé hier "à 80% pour" entériner la création d'un groupe d'amitié.

"J'ai pris une décision personnelle mais fondée sur le droit", a répondu Elodie Jacquier-Laforge, vice-présidente MoDem de l'Assemblée. "Nous souhaitons arriver à une situation où la Palestine sera reconnue comme un Etat de plein droit à l'ONU, mais notre volonté n'est malheureusement pas une réalité".

Le président de la commission des Affaires étrangères Jean-Louis Bourlanges, également MoDem, a regretté dans un communiqué la décision du bureau de l'Assemblée.

"Par la décision de son bureau, l'Assemblée s'est non seulement refusée à s'engager, fût-ce par une décision symbolique, dans une direction salutaire mais elle a de surcroît marqué le pas derrière un gouvernement qui (...) n'a pas hésité à voter au Conseil de sécurité des Nations unies en faveur de la reconnaissance de l'Etat palestinien", a-t-il commenté.