PARIS: Lettre de démission en poche, le Premier ministre Jean Castex se prépare à quitter Matignon, alimentant le "feuilleton" de sa succession qui pourrait être confiée à une femme au retour d'Emmanuel Macron, en déplacement dimanche à Abou Dhabi.
Le chef de l'Etat sera de retour à Paris dimanche soir. La nomination d'un nouveau Premier ministre, suivie de celle du gouvernement, est attendue à partir de lundi, trois semaines déjà après sa réélection.
Le site internet du gouvernement a même affiché par erreur samedi matin, avant de la retirer, une page annonçant la démission du gouvernement Castex.
En attendant, le Premier ministre prépare ses cartons et sa lettre de démission est prête: "Très simple, très classique", a confié dimanche au Parisien Jean Castex, qui affirme partir "sans remords, ni regret".
"On peut me reconnaître de n’avoir jamais intrigué pour être ici, encore moins d’avoir utilisé mes fonctions pour ma carrière future. Donc, je ne demande strictement rien, aucun poste ministériel", a-t-il assuré.
Jean Castex a été obligé de renoncer au dernier moment à son ultime déplacement au Vatican, remplacé par le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin pour la canonisation de l'explorateur puis ermite Charles de Foucauld.
Car les deux chefs de l'exécutif ne peuvent être hors du territoire en même temps. Or, Emmanuel Macron s'est rendu aux Emirats arabes unis, partenaire stratégique, pour rendre hommage au président, le cheikh Khalifa ben Zayed Al-Nahyane, décédé vendredi. Il recevra lundi au déjeuner le président du Conseil européen Charles Michel.
«Ne pas plomber le message»
Comme pour le gouvernement Castex en 2020, le chef de l'Etat a laissé prospérer les spéculations: "Le feuilleton de la succession de Jean Castex n'en finit pas", s'impatiente le politologue Bruno Cautrès (Cevipof), qui trouve ce délai "très étonnant".
"Peut-être aussi que c'est une tactique du chef de l'État, histoire de préparer progressivement l'opinion à un nouveau casting", avance sur Franceinfo le directeur de recherche au CNRS.
Selon lui, il y a aussi "l'idée de ne pas plomber le message qui va être envoyé par le nouveau casting parce que, en quelques semaines, le nouveau gouvernement ou des nouveaux ministres ont le temps de prendre des décisions, de faire des déclarations qui ne plaisent pas forcément".
Le chef du Modem, François Bayrou, allié d'Emmanuel Macron, a lui justifié dimanche au Grand jury RTL-LCI-Le Figaro: "Il n'est pas inutile d'avoir une période pour mettre les choses en ordre et réfléchir à une nouvelle équipe".
Affirmant ne pas connaître le nom de le ou la futur(e) chef(ffe) du gouvernement, il a soutenu l'idée que ce soit une femme, comme des proches d'Emmanuel Macron l'on laissé entendre.
Edith Cresson, la seule à avoir occupé le poste de Premier ministre de mai 1991 à avril 1992, durant le second septennat de François Mitterrand, lui souhaite par avance "beaucoup de courage", dans un entretien au JDD.
Classe politique «machiste»
"Ce n'est pas le pays qui est machiste: c'est sa classe politique. Ce sont les mêmes attaques qu'aujourd'hui. On me prêtait des propos que je n'avais jamais tenus, on me lançait des critiques permanentes, on faisait des commentaires sur ma tenue vestimentaire", raconte l'ancienne dirigeante socialiste.
Après ceux de la ministre du Travail Elisabeth Borne, le nom qui revient avec insistance pour lui succéder est celui de Catherine Vautrin, ancienne ministre de la Cohésion sociale de Jacques Chirac, qui avait apporté son soutien à Emmanuel Macron avant le 1er tour.
"C'est une femme de qualité incontestablement" mais "est-ce qu'elle est prête à renier toutes les idées qu'elle a défendue depuis si longtemps" en faisant "ce pas supplémentaire pour appliquer une politique qui serait totalement contraire à ce qu'elle a défendu pendant des années?", a critiqué l'eurodéputée LR Nadine Morano sur Europe 1.
Pointe aussi le nom de la vice-présidente du Sénat Valérie Letard, estampillée "bébé Borloo" pour avoir débuté en politique à Valencienne au coté du centriste Jean-Louis Borloo, avant d'être secrétaire d'Etat chargée des technologies vertes dans son ministère de l'Ecologie de 2009 à 2010, au sein du gouvernement Fillon. Elle coche aussi la "case sociale" puisqu'elle a été secrétaire d'Etat à la Solidarité dans le même gouvernement Fillon de 2007 à 2009.
Au milieu de toutes ces spéculations, on en oublierait presque que la campagne des législatives a déjà débuté et se poursuit ce week-end à bas bruit.