PARIS: La victoire « n'a jamais été aussi proche »: Marine Le Pen a lancé jeudi à Avignon un appel aux « patriotes de droite, patriotes de gauche » pour « faire barrage » à Emmanuel Macron lors du second tour de la présidentielle. Le président-candidat s'adressant pour sa part au Havre à la fibre écologique des électeurs.
Il s'agissait du premier grand meeting de l'entre-deux-tours pour la candidate d'extrême droite, deux jours avant un important rassemblement à Marseille du président-candidat. Objectifs pour les deux finalistes, élargir leurs bases du premier tour en attirant notamment les électeurs de leader insoumis Jean-Luc Mélenchon (21,95% des voix).
Devant 4 000 sympathisants, selon les organisateurs, brandissant des drapeaux tricolores et scandant « Marine présidente », Marine Le Pen a appelé à « faire barrage » à Emmanuel Macron et « cette caste qui nous gouverne avec arrogance », se présentant comme la candidate du « peuple face à l'oligarchie ».
Comme en écho aux appels du camp Macron à « faire barrage » à l'extrême droite, qui n'a jamais été aussi proche d'accéder au pouvoir sous la Vème République. Les sondages donnent pour l'heure une victoire du président sortant le 24 avril, entre 53 et 55% des voix. En 2017, il avait sèchement battu Marine Le Pen avec près de 64% des suffrages.
« Vision mondialiste »
« Patriotes de droite, patriotes de gauche ou d’ailleurs, je dis (...) notre seul parti, c’est la France », a lancé Marine Le Pen, veste rouge, devant trois drapeaux français.
Selon les enquêtes d'opinion, environ 80% des électeurs de l'ex-polémiste Éric Zemmour pourraient mettre un bulletin Le Pen dans l'urne le 24 avril, contre environ 20% pour les électeurs ayant voté Mélenchon.
Promettant un « Printemps français », si elle est élue, après un « quinquennat qui aura divisé, méprisé, blessé », elle a opposé la « vision mondialiste » du président sortant à sa « vision nationale », le « bloc populaire contre le bloc élitaire ». Elle reprenait une terminologie du politologue Jérôme Sainte-Marie, très écouté par l'extrême droite.
Développant les grands thèmes de son programme, elle a mis un accent tout particulier sur la mobilisation, son électorat jeune et populaire étant souvent enclin à l'abstention. « Nous voilà presque arrivés au bout du chemin », a-t-elle assuré depuis son pupitre où était inscrit « si le peuple vote, le peuple gagne ».
« Écologie de progrès »
Un peu plus tôt dans l'après-midi au Havre, ville dirigée par son ancien Premier ministre Édouard Philippe, Emmanuel Macron a consacré la totalité de son déplacement aux énergies renouvelables, qu'il veut développer de concert avec le nucléaire. En défendant particulièrement les éoliennes tant honnies par sa rivale d'extrême droite.
« Sortir du renouvelable est une aberration complète, nous serions le seul pays au monde à le faire », s'est insurgé sur France Bleu le président-candidat. « Dans le projet de Madame Le Pen, avec stupeur, j'ai en effet découvert (...) qu'on dépenserait des centaines de millions d'euros à démonter des éoliennes existantes ».
Il a affirmé croire à « l'écologie de progrès » qui « réconcilie l'industrie, l'emploi et l'écologie », en y investissant 10 milliards d'euros par an s'il est réélu.
« Je vais essayer de convaincre tous les électeurs », a-t-il ajouté, en multipliant toute la journée des bains de foule. Et en pensant en particulier à ceux de Jean-Luc Mélenchon, arrivé en tête au premier tour au Havre, et de l'écologiste Yannick Jadot.
Emmanuel Macron a ainsi tenu à rappeler ses points d'accord avec la gauche sur l'écologie. « Avec le projet de M. Jadot, de M. Mélenchon et c'est vrai aussi pour Mme (Anne) Hidalgo (PS), nous avions un accord sur le fait que l'Accord de Paris devait être notre cadre, et le Green Deal européen ».
« Mais l'extrême droite de Mme Le Pen a un projet qui est de sortir des Accords de Paris et du Green Deal européen », selon lui.
« Je ne vais pas demain proposer le projet de Jean-Luc Mélenchon ou de Yannick Jadot. Mais si je peux ajouter telle ou telle chose, par respect, si je trouve une cohérence avec le mien, je le ferai », a-t-il assuré.
Selon les enquêtes d'opinion, autour de 30% des électeurs de M. Mélenchon pourraient voter Macron au second tour et environ 60% de ceux qui ont voté pour le candidat écologiste.
Pouvoir d'achat, réforme des retraites, diplomatie et construction européenne, éoliennes : le président sortant et la candidate d'extrême droite défendent des projets radicalement différents et se rendent coup pour coup au cours d'une campagne électrique.
« Cette fois-ci, cette stratégie du +tout sauf Le Pen+ ne fonctionne plus, en partie d'ailleurs parce qu'elle s'est dédiabolisée, en partie parce qu'il faut convaincre les gens », a expliqué sur RFI un proche du président, Roland Lescure.
Enfin, en soirée, l'ancien président François Hollande a appelé à voter Pour Emmanuel Macron, son ancien ministre.