PARIS: Une information judiciaire pour "tentative d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste" va être ouverte dimanche sur la violente agression en prison d'Yvan Colonna, a annoncé le procureur national antiterroriste, peu avant le début d'une nouvelle manifestation en Corse.
"Pour la cinquième fois depuis 2016, c'est dans un établissement pénitentiaire qu'un crime terroriste a été commis par les jihadistes", a déclaré devant la presse Jean-François Ricard.
Les faits commis à la maison d'arrêt d'Arles mercredi "démontrent que cette menace jihadiste portée par des personne détenues pour des faits de terrorisme radicalisées reste un sujet de préoccupation majeur", a-t-il souligné.
Dans ce contexte, le parquet national antiterroriste (Pnat) devait ouvrir dimanche une information judiciaire pour "tentative d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste" et "association de malfaiteurs terroriste".
L'agresseur du militant indépendantiste corse, Franck Elong Abe, qui a passé quatre jours en garde à vue, sera ainsi présenté à des juges d'instruction parisiens en vue de sa mise en examen pour "tentative d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste". Le Pnat va requérir son placement en détention provisoire.
L'enquête s'attachera à "retracer avec la plus grande minutie le parcours en détention" de l'agresseur, "déterminer la totalité de ses contacts notamment parmi les personnes partageant son idéologie" et "éclaircir les éventuelles interactions (...) susceptibles d'avoir joué un rôle dans les faits", a précisé M. Ricard.
«Acharnement systématique»
Il a confirmé que Franck Elong Abe, qui purgeait plusieurs peines dont une de 9 ans pour "association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte de terrorisme", avait, lors de sa garde à vue, expliqué son acte "par ce qu'il considérait comme des blasphèmes" proférés selon lui ces derniers mois par Yvan Colonna.
Ce dernier aurait notamment déclaré quelques jours avant l'agression qu'il "crachait sur Dieu", selon M. Ricard.
Retraçant minute par minute le déroulement de l'agression mercredi matin, le procureur a déclaré que "l'acharnement systématique déployé par le mis en cause" ne laissait "que peu de doutes sur son intention homicide".
Affecté aux fonctions d'auxiliaire de nettoyage des salles de sport, le détenu d'origine camerounaise a commis cette agression sur Yvan Colonna alors qu'ils se trouvaient sans surveillance dans une salle de sport.
Il a "pendant plus de huit minutes (...) porté des coups violents à la victime" et "mis en œuvre des techniques de strangulation et d'étouffement, y compris en utilisant des sacs poubelle et des serviettes".
Le pronostic vital du militant indépendantiste corse, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour l'assassinat du préfet Claude Erignac en 1998, est à cette heure "toujours engagé", selon M. Ricard.
La famille d'Yvan Colonna a aussitôt réagi, estimant par la voix de son avocat, Me Patrice Spinosi, que le procureur antiterroriste n'avait apporté "aucune réponse aux questions" qu'elle se posait et n'avait "nullement fait mention des fautes de surveillance de l'administration pénitentiaire ni des raisons de l'absence de toute réaction des surveillants".
Depuis l'agression, les manifestations s'enchaînent en Corse, de rassemblements devant les préfectures aux blocages de ferries, sur fond de questions sur les conditions de l'agression d'Yvan Colonna qui réclamait de longue date son rapprochement dans une prison de l'île.
Pour y faire face, deux escadrons de gendarmes mobiles et une compagnie de CRS sont arrivés en renfort.
Dimanche après-midi, des centaines de personnes affluaient à Corte (Haute-Corse) pour une nouvelle manifestation de soutien au militant indépendantiste derrière des banderoles "Gloire à toi Yvan" et "Etat français assassin".
La manifestation de dimanche a été initiée par des syndicats étudiants nationalistes, rejoints par l'ensemble des partis nationalistes de l'île, le Syndicat des travailleurs corses (STC) et les associations de défense des prisonniers corses.
La Ligue des droits de l'Homme de Corse a annoncé dimanche sur Twitter participer à la manifestation