AL-MUKALLÂ : Au moment où le Premier ministre yéménite a atterri mardi dans la ville portuaire d'Aden pour la première fois depuis des mois, des milliers de Yéménites sont descendus dans les rues de la ville méridionale de Taïz et de nombreuses autres villes pour protester contre la chute de la monnaie du pays et les prix qui montent en flèche.
Maeen Abdel Malik Saeed est retournée à Aden, la capitale intérimaire du Yémen, afin de raviver l'espoir d'une mise en œuvre rapide et complète de l'accord de Riyad et faire face à la crise financière qui a paralysé le pays.
Le Premier ministre et son cabinet ont quitté Aden en mars après que des manifestants séparatistes ont pris d'assaut le palais présidentiel.
Pour la deuxième journée consécutive, des manifestants ont défilé dans la ville densément peuplée de Taïz, brandissant des miches de pain et des affiches.
Ils ont exigé que le gouvernement verse les salaires et s'attaque à la dévaluation du riyal yéménite ainsi qu'à l'augmentation des prix du carburant et de la nourriture.
«J'ai faim», a crié un manifestant pendant que les forces de sécurité et des véhicules armés étaient déployés à l'extérieur des principales installations gouvernementales. Certains manifestants ont bloqué des routes et incendié des pneus de voiture.
Ce lundi, au moins cinq manifestants ont été blessés lorsque les forces de sécurité ont tiré à balles réelles pour empêcher les manifestants de bloquer les routes et de perturber la circulation.
Le comité de sécurité de la ville a déclaré qu'il protégeait les manifestations pacifiques, en mettant en garde contre les dommages des biens privés et publics.
Le 15 septembre, deux manifestants ont été tués lors de violentes manifestations contre la crise économique et la recrudescence des coupures de courant à Aden et Al-Mukallâ. Les manifestants se sont affrontés avec les forces de sécurité, ont brûlé des contenants à déchets et des pneus et ont pris d'assaut les installations publiques.
Le riyal yéménite a atteint cette semaine un creux record par rapport au dollar, s'échangeant à 1 200 riyals yéménites contre $1. Le dollar américain s'échangeait à 215 rials en janvier 2015.
En août, des mesures punitives sévères de la banque centrale basée à Aden contre plusieurs sociétés de change qui ont enfreint les règles monétaires ont aidé le riyal à se redresser de 10 %, passant de 1 050 riyals à 950 riyals contre $1.
Mais le riyal yéménite a dégringolé dans les semaines qui ont suivi, brisant pour la première fois le record historique de 1 200 par rapport au dollar américain, alors que de nombreuses entreprises ont fermé et que les banques des zones contrôlées par les Houthis étaient conseillées à délocaliser leurs activités à Aden.
Mardi, les contrôleurs de la banque centrale ont inspecté les sociétés de change et les magasins locaux, à la recherche de contrevenants aux règles de la banque. Les banques ont également annoncé que la Banque d'Angleterre avait accepté de débloquer leurs comptes, leur donnant accès à des millions de dollars.
Simultanément, les économistes ont averti que l'aggravation de la crise financière compliquerait la crise humanitaire déjà accablante au Yémen et alimenterait sans doute la violence.
Waled Al-Attas, professeur adjoint de finance et de sciences bancaires à l'Université Hadramout, a critiqué le silence du gouvernement yéménite et les solutions tardives à la dépréciation continue du riyal yéménite.
«L'État a renoncé à faire les choses les plus simples pour les citoyens et les a laissés à eux-mêmes», a-t-il déclaré à Arab News. «Cette situation est une véritable catastrophe car la chute du riyal se poursuit et que les prix montent, les salaires ont complètement perdu leurs valeurs».
Lors d'une brève visite dans la ville méridionale de Shabwa lundi, le Premier ministre yéménite a attribué la chute du riyal et la crise financière dans le pays à l'économie parallèle des Houthis et aux opérations militaires du mouvement ainsi qu'aux activités spéculatives des changeurs de devises.
«La situation économique est très difficile», a-t-il averti.
Pendant ce temps-là, des combats ont fait rage entre les troupes gouvernementales yéménites et les Houthis au cours des dernières 24 heures dans la province de Jouf et la province centrale de Marib. Des dizaines de combattants des deux côtés ont été tués.
Les affrontements les plus féroces de mardi ont été signalés dans l’arrondissement de Harib, dans la province de Marib du sud, où les troupes gouvernementales, soutenues par la couverture aérienne de la coalition arabe, ont déjoué les attaques consécutives des Houthis.
La milice Houthie a récemment ouvert de nouveaux fronts au sud de la ville de Marib après que ses forces n'ont pas réussi à faire des progrès importants dans leur progression à l'ouest de Marib. Dans la province de Jouf, les troupes gouvernementales ont annoncé la libération de plusieurs localités, à l'est de la ville de Hazem, la capitale de la province.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com