Le Conseil de sécurité de l’ONU (l’Organisation des nations unies) garde le silence devant les violations croissantes et flagrantes commises par le régime iranien contre les droits de l’homme.
Le mois dernier, des hackers ont piraté les caméras de surveillance de la prison iranienne la plus célèbre, Evin. Sur ces vidéos, on voit les prisonniers roués de coups et subir d’autres traitements violents.
Étonnamment, le régime a reconnu ces abus et le directeur des prisons d’Iran, Mohammed Mehdi Hajmohammadi, a même présenté ses excuses. «En ce qui concerne les images de la prison d’Evin, j’endosse la responsabilité de ces comportements inacceptables et m’engage à empêcher qu’ils se reproduisent ainsi qu’à punir les coupables. Je demande pardon auprès du Tout-Puissant, de notre cher Guide [le Guide suprême, Ali Khamenei], de la nation et des agents pénitentiaires honorables, dont le travail ne sera pas négligé en raison de ces erreurs», écrit-il dans un Tweet.
De tels abus sont systémiques dans les prisons iraniennes, mais les dirigeants jouissent malheureusement de l’impunité. Amnesty International, qui a examiné seize vidéos rendues publiques, déclare: «Ces vidéos qui ont été divulguées montrent des abus effroyables contre les détenus de la prison d’Evin et elles nous rappellent cruellement l’impunité dont bénéficient les agents pénitentiaires en Iran. Ces derniers soumettent les prisonniers à la torture et à d’autres traitements atroces, inhumains et dégradants.»
Il convient de noter qu’il ne s’agit pas d’un incident isolé. Le modus operandi du régime se caractérise par les abus, les mauvais traitements infligés aux opposants ainsi que par le recours à la brutalité et à la torture. Le mois dernier, plus de 1 000 survivants des prisons et des massacres du régime se sont rassemblés afin de raconter au monde leurs histoires tragiques. D’anciens prisonniers politiques et des témoins de scènes de torture et de meurtres brutaux à l’intérieur des prisons iraniennes sont ainsi apparus dans une conférence virtuelle à laquelle participaient également des centaines de hauts dignitaires internationaux, parmi lesquels des ministres des Affaires étrangères et des défenseurs des droits de l’homme d’Europe et d’Amérique du Nord.
Il est temps que la communauté internationale mette fin à la culture de l’impunité dont jouissent les dirigeants du régime. Khamenei, Ebrahim Raïssi, le président du pays, ainsi que Gholam-Hossein Mohseni Ejei, le chef du système judiciaire, devraient être poursuivis en justice pour les violations flagrantes des droits de l’homme auxquelles ils se livrent.
Le massacre de 1988 en Iran est l’un des crimes les plus horribles commis par une dictature au Moyen-Orient, si ce n’est dans le monde. Le régime des mollahs avait orchestré l’exécution d’au moins 30 000 prisonniers politiques. 90% d’entre eux faisaient partie de l’Organisation des moudjahidines du peuples iranien, un groupe d’opposition. Ils ont très probablement été tués en raison de leurs convictions politiques et de leur volonté de mettre en place un Iran libre et démocratique.
Le régime a toujours voulu réduire à néant toute opposition à son règne. Cette tendance dévastatrice a ruiné l’économie, instauré de désastreuses conditions sociales, entraîné des crimes contre l’humanité qui se poursuivent aujourd’hui, et elle a provoqué une prise en charge totalement ratée de la pandémie de Covid-19, qui a coûté la vie à plus de 100 000 Iraniens.
«Le modus operandi du régime se caractérise par les abus, les mauvais traitements infligés aux opposants ainsi que par le recours à la brutalité et à la torture.»
Dr Majid Rafizadeh
Le massacre de 1988 est un exemple de génocide, sans la moindre équivoque. En 2010, Raïssi déclarait que «tous les moudjahidines sont des ennemis de Dieu et passibles de la peine de mort». Le régime est particulièrement préoccupé par le Conseil national de la résistance iranienne, une vaste coalition d’organisations démocratiques qui constitue l’alternative au régime la plus populaire, la plus crédible et la mieux organisée. Maryam Radjavi, la présidente de cette organisation – une femme musulmane charismatique –, a mené une campagne internationale pour que justice soit rendue aux victimes du massacre de 1988 et à leurs familles. La semaine dernière, elle a écrit ces mots sur Twitter: «Ce mouvement en faveur de la justice est synonyme de persévérance et de résistance pour renverser ce régime et instaurer la liberté.» Le groupe a exhorté les États-Unis et l’Europe à reconnaître le massacre de 1988 comme un génocide et un crime contre l’humanité et à contraindre Raïssi à rendre des comptes.
La communauté internationale, particulièrement les États-Unis et l’Union européenne, doit désormais prendre en charge ce dossier. Il est indispensable que le monde comprenne qu’il n’existe pas de dirigeants modérés au sein du régime iranien et que le peuple iranien exige son renversement.
En 1988, Raïssi faisait partie d’un «comité de la mort» formé de quatre personnes qui a ordonné l’exécution de milliers de prisonniers innocents. Pour cette seule raison, aucun pays du monde ou forum international crédible ne devrait accepter de le recevoir. Il devrait être traduit en justice et tenu pour responsable de ses crimes horribles. C’est exactement ce que revendiquent le peuple iranien et l’opposition organisée.
Le secrétaire général de l’ONU, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, le Conseil des droits de l’homme, les rapporteurs spéciaux et les organisations internationales des droits de l’homme devraient être autorisés à visiter les prisons du régime iranien pour rencontrer les détenus, en particulier les prisonniers politiques. Les violations commises par le régime iranien à l’égard des droits de l’homme devraient également être présentées au Conseil de sécurité de l’ONU.
Il est impératif qu’une enquête internationale sur ces violations ainsi que sur les crimes contre l’humanité de 1988 soit ouverte. À mesure que les menaces contre la démocratie et les droits de l’homme s’intensifient à travers le monde, la communauté internationale doit faire preuve de détermination politique afin de punir les coupables qui continuent d’occuper des postes de direction au sein du régime iranien.
Dans le cas contraire, il y aura encore davantage de massacres et de violations des droits de l’homme, parce que le silence international sera perçu par le régime comme un permis de tuer.
Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain formé à Harvard. Twitter: @Dr_Rafizadeh
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com