Dans l'est de la Turquie, un nouveau mur pour stopper les migrants afghans

Des migrants afghans se reposent en attendant d'être transporté par des passeurs après avoir traversé la frontière irano-turque le 15 août 2021 à Tatvan, sur la rive ouest du lac de Van, dans l'est de la Turquie. (Photo, AFP)
Des migrants afghans se reposent en attendant d'être transporté par des passeurs après avoir traversé la frontière irano-turque le 15 août 2021 à Tatvan, sur la rive ouest du lac de Van, dans l'est de la Turquie. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 18 août 2021

Dans l'est de la Turquie, un nouveau mur pour stopper les migrants afghans

  • Le retour au pouvoir des talibans à Kaboul a plongé l'avenir de nombreux Afghans dans l'incertitude et réveillé en Europe la peur d'une crise migratoire similaire à celle qui a fait trembler le continent en 2015
  • Les exilés qui parviennent à franchir la frontière ultrasécurisée entre l'Iran, pays voisin de l'Afghanistan, et la Turquie se cachent le jour et marchent la nuit vers l'ouest, vers les métropoles turques comme Istanbul ou, pour certains, vers l'Europe

VAN, TURQUIE : Un caleçon, une bouteille en plastique, de récentes traces de pas: ce sont les quelques indices laissés par les migrants afghans qui parviennent à contourner un nouveau mur en construction à la frontière entre la Turquie et l'Iran.

Le retour au pouvoir des talibans à Kaboul a plongé l'avenir de nombreux Afghans dans l'incertitude et réveillé en Europe la peur d'une crise migratoire similaire à celle qui a fait trembler le continent en 2015, avec l'afflux de millions de personnes fuyant les conflits au Proche-Orient et transitant par la Turquie. 

Les exilés qui parviennent à franchir la frontière ultrasécurisée entre l'Iran, pays voisin de l'Afghanistan, et la Turquie se cachent le jour et marchent la nuit vers l'ouest, vers les métropoles turques comme Istanbul ou, pour certains, vers l'Europe.

Originaire de Kandahar, dans le sud de l'Afghanistan, Mohammed Arif a donné 600 euros à un passeur pour l'emmener à Istanbul. Mais ce dernier s'est éclipsé dans la province de Van, dans l'est de la Turquie.

"Cela fait 25 jours que j'ai pris la route", explique le jeune homme âgé de 18 ans. "Rebrousser chemin est trop dangereux. De toute façon, où irais-je ?", interroge-t-il.

Un migrant afghan se repose en attendant d'être transporté par des passeurs après avoir traversé la frontière irano-turque le 15 août 2021 à Tatvan, sur la rive ouest du lac de Van, dans l'est de la Turquie
Un migrant afghan se repose en attendant d'être transporté par des passeurs après avoir traversé la frontière irano-turque le 15 août 2021 à Tatvan, sur la rive ouest du lac de Van, dans l'est de la Turquie. (Photo, AFP)

Pour le moment, les Nations unies n'ont pas relevé de mouvements migratoires "de grande ampleur" aux frontières afghanes et le nombre d'Afghans arrivant en Europe a baissé d'environ 40% lors des six premiers mois de l'année, selon Bruxelles.

Mais les images d'Afghans quittant leur pays, comme M. Arif, suscitent l'inquiétude des dirigeants en Europe comme en Turquie, où le président Recep Tayyip Erdogan est sous pression pour durcir sa politique migratoire en pleine crise économique.

« Je veux rester »

Mentionnant la construction du mur frontalier, M. Erdogan a ainsi promis la semaine dernière d'"arrêter complètement" les entrées illégales sur le territoire turc.

Les autorités semblent avoir accéléré ces derniers jours la construction de ce mur long de 243 kilomètres, bordé de fossés, à sa frontière avec l'Iran, qui est longue de plus de 500 kilomètres.

Quelque 156 kilomètres ont déjà été érigés et les patrouilles ont été renforcées, ont indiqué des responsables à l'AFP.

Mais Arif et des dizaines d'autres Afghans rencontrés par l'AFP ont réussi à traverser la frontière en le contournant.

Après plusieurs jours de marche, certains d'entre eux se reposaient près d'une voie ferroviaire à Tatvan, à 200 kilomètres à l'ouest de la frontière.

"L'Afghanistan est fini", soupire Nakivillah Ikbali, qui est passé par le Pakistan et l'Iran avant d'arriver en Turquie.

"La situation va empirer. J'ai 19 ans. J'aimerais aller à l'école ou à la mosquée, mais ma vie s'est envolée", dit-il.

Arman Ahmadi, âgé de 17 ans, en est à sa deuxième tentative. Il a été expulsé de Turquie après avoir été arrêté à Istanbul, où il travaillait clandestinement comme coiffeur. Il aimerait s'installer pour de bon dans ce pays.

Un migrant afghan se repose en attendant d'être transporté par des passeurs après avoir traversé la frontière irano-turque le 15 août 2021 à Tatvan, sur la rive ouest du lac de Van, dans l'est de la Turquie
Des migrants afghans se reposent en attendant d'être transporté par des passeurs après avoir traversé la frontière irano-turque le 15 août 2021 à Tatvan, sur la rive ouest du lac de Van, dans l'est de la Turquie. (Photo, AFP)

La Turquie "me dit de rentrer en Afghanistan, mais c'est la guerre !", s'exclame-t-il. "Je ne veux pas aller en Europe. Si la Turquie accepte de m'accueillir, c'est ici que je veux rester".

« Pas le choix »

Selon les chiffres officiels, la Turquie accueille 120.000 réfugiés afghans, plus environ 300.000 migrants afghans en situation irrégulière. 

Metin Corabatir, ancien porte-parole en Turquie de l'Agence des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), explique que l'Iran, pays situé entre l'Afghanistan et la Turquie, absorbait jusqu'à présent une grande partie des flux migratoires d'Afghanistan.

L'Iran a ainsi "accueilli deux millions d'Afghans pendant l'invasion soviétique (de l'Afghanistan) en 1979", dit-il à l'AFP.

Mais après des années de sanctions américaines liées au programme nucléaire de Téhéran, l'économie iranienne est en lambeaux.

"Dans quelle mesure l'Iran pourra-t-il offrir une protection à de nouveaux arrivants ? Nous ne le savons pas encore", souligne M. Corabatir.

A Tatvan, Mohammed Zamir, 16 ans, ne voit aucun avenir pour lui sans aide d'un pays étranger.

"Les talibans vous tuent si vous allez à l'école, ils vous tuent si vous soutenez le gouvernement (afghan). Et si vous soutenez les talibans, c'est le gouvernement qui vous tue", lâche-t-il.

"Les gens n'ont pas d'autre choix. Ils n'ont pas d'argent, pas de travail", poursuit-il. "Que pouvons-nous faire là-bas ? Où irons-nous si les pays voisins ne nous accueillent pas ?"

 


L'Allemagne aux urnes, sous pression de l'extrême droite et de Trump

Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
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  • Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.
  • Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

BERLIN : Alors qu'elle est déstabilisée par les crises, l'Allemagne vote dimanche pour des élections législatives où l'opposition conservatrice part largement favorite après une campagne bousculée par le retour au pouvoir de Donald Trump et l'essor de l'extrême droite.

Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.

« Nous traversons une période très incertaine », constatait Daniel Hofmann, rencontré à la sortie d'un bureau de vote à Berlin.

Selon cet urbaniste de 62 ans, qui se dit préoccupé par la « sécurité européenne » sur fond de guerre en Ukraine, le pays a besoin d'un « changement, une transformation ».

Récession économique, menace de guerre commerciale avec Washington, remise en cause du lien transatlantique et du « parapluie » américain sur lequel comptait Berlin pour assurer sa sécurité : c'est le « destin » de l'Allemagne qui est en jeu, a déclaré samedi le chef de file des conservateurs Friedrich Merz.

Ce dernier semble très bien placé pour devenir le prochain chancelier et donner un coup de barre à droite dans le pays, après l'ère du social-démocrate Olaf Scholz. D'après les derniers sondages, il recueillerait environ 30 % des intentions de vote.

Visiblement détendu, souriant et serrant de nombreuses mains, le conservateur de 69 ans a voté à Arnsberg, dans sa commune du Haut-Sauerland, à l'ouest.

Son rival social-démocrate, visage plus fermé, a lui aussi glissé son bulletin dans l'urne, à Potsdam, à l'est de Berlin.

Les électeurs ont jusqu'à 18 heures (17 heures GMT) pour voter. Les premiers sondages sortie des urnes seront publiés dans la foulée.

Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

Le parti anti-migrant et pro-russe a imposé ses thèmes de campagne, suite à plusieurs attaques et attentats meurtriers perpétrés par des étrangers sur le territoire allemand.

L'AfD a également bénéficié du soutien appuyé de l'entourage de Donald Trump pendant des semaines.

Son conseiller Elon Musk, l'homme le plus riche du monde, n'a cessé de promouvoir la tête de liste du parti allemand, Alice Weidel, sur sa plateforme X.

« AfD ! » a encore posté M. Musk dans la nuit de samedi à dimanche, accompagnant son message de drapeaux allemands.
Les élections législatives anticipées ont lieu la veille du troisième anniversaire de l'invasion russe en Ukraine, un événement particulièrement marquant en Allemagne.

Le conflit a mis fin à l'approvisionnement en gaz russe du pays, qui a accueilli plus d'un million d'Ukrainiens. La perspective d'une paix négociée « dans le dos » de Kiev et des Européens inquiète tout autant.

Interrogé sur ces élections allemandes, le président américain a répondu avec désinvolture qu'il souhaitait « bonne chance » à l'allié historique des États-Unis, qui ont leurs « propres problèmes ».

Le discours de son vice-président JD Vance à Munich, dans lequel il exhortait les partis traditionnels allemands à mettre fin à leur refus de gouverner avec l'extrême droite, a creusé un peu plus le fossé entre Washington et Berlin.

Friedrich Merz souhaite que l'Allemagne puisse « assumer un rôle de leader » en Europe.

Dans le système parlementaire allemand, il pourrait s'écouler des semaines, voire des mois, avant qu'un nouveau gouvernement ne soit constitué.

Pour former une coalition, le bloc mené par les conservateurs CDU/CSU devrait se tourner vers le parti social-démocrate (SPD), excluant ainsi toute alliance avec l'AfD, avec laquelle il a entretenu des relations tendues durant la campagne, notamment sur les questions d'immigration.

Les sondages lui attribuent 15 % des voix. Ce score serait son pire résultat depuis l'après-guerre et signerait probablement la fin de la carrière politique d'Olaf Scholz. Mais auparavant, le chancelier devra assurer la transition.

« J'espère que la formation du gouvernement sera achevée d'ici Pâques », soit le 20 avril, veut croire Friedrich Merz.

Un objectif difficile à atteindre si les deux partis qui ont dominé la politique allemande depuis 1945 sont contraints, faute de majorité de députés à eux deux, de devoir trouver un troisième partenaire.

La fragmentation au Parlement dépendra notamment des résultats de petits partis et de leur capacité ou non à franchir le seuil minimum de 5 % des suffrages pour entrer au Bundestag.


Sécurité européenne, Ukraine : réunion des ministres européens de la Défense lundi

Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
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  • Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien
  • Cette réunion des ministres de la Défense s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

PARIS : Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien et de renforcer la sécurité du Vieux continent, a-t-on appris dimanche auprès du ministère français des Armées.

Cette réunion, qui se tiendra dans l'après-midi à l'initiative de l'Estonie et de la France, rassemblera également les ministres de la Défense de Lituanie, de Lettonie, de Norvège, de Finlande, de Suède, du Danemark, des Pays-Bas, d'Allemagne, d'Italie, de Pologne et du Royaume-Uni, selon cette source.

À cette occasion, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, se rendra à Tallinn aux côtés de son homologue estonien Hanno Pevkur, après avoir participé aux célébrations de la fête nationale estonienne.

La France déploie environ 350 militaires en Estonie dans le cadre d'un bataillon multinational de l'OTAN.

Cette réunion des ministres de la Défense, trois ans jour pour jour après l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie, s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

La semaine passée, plusieurs chefs de gouvernement européens avaient été conviés à Paris par le président Emmanuel Macron. D'après un résumé obtenu de sources parlementaires, ils se seraient accordés sur la nécessité d'un « accord de paix durable s'appuyant sur des garanties de sécurité » pour Kiev, et auraient exprimé leur « disponibilité » à « augmenter leurs investissements » dans la défense.

Plusieurs pays membres avaient en revanche exprimé des réticences quant à l'envoi de troupes européennes en Ukraine, dans l'hypothèse d'un accord mettant fin aux hostilités.


Le ministre russe des Affaires étrangères effectue une visite en Turquie lundi

Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
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  • La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.
  • Le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

ISTAMBUL : Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est attendu en Turquie lundi, jour du troisième anniversaire du déclenchement de l'invasion russe de l'Ukraine, ont annoncé dimanche des sources diplomatiques turques.

M. Lavrov doit s'entretenir à Ankara avec son homologue turc Hakan Fidan, ont indiqué ces mêmes sources, précisant que les deux hommes discuteraient notamment d'une solution au conflit ukrainien.

Dimanche, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a confirmé à l'agence Tass qu'une délégation menée par Sergueï Lavrov devait se rendre prochainement en Turquie pour y discuter d'« un large éventail de sujets ».

La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.

Mardi, en recevant son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

Toutefois, ces dernières semaines, Moscou et Washington ont entamé un dialogue direct, alors que les relations se réchauffent entre Donald Trump et Vladimir Poutine.

Mardi, Russes et Américains se sont rencontrés en Arabie saoudite pour entamer le rétablissement de leurs relations, une réunion dénoncée par Volodymyr Zelensky qui redoute un accord sur l'Ukraine à leur insu.

M. Lavrov, dont la dernière visite en Turquie remonte à octobre, doit se rendre dans la foulée en Iran, un allié de la Russie.

La Turquie, qui est parvenue à maintenir ses liens avec Moscou et Kiev, fournit des drones de combat aux Ukrainiens mais n'a pas participé aux sanctions occidentales contre la Russie.

Ankara défend parallèlement l'intégrité territoriale de l'Ukraine et réclame la restitution de la Crimée du Sud, occupée par la Russie depuis 2014, au nom de la protection de la minorité tatare turcophone de cette péninsule.