Lian, 5 ans, a été brûlée vive par les Houthis, le monde s'en souciera-t-il?

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Publié le Lundi 07 juin 2021

Lian, 5 ans, a été brûlée vive par les Houthis, le monde s'en souciera-t-il?

Lian, 5 ans, a été brûlée vive par les Houthis, le monde s'en souciera-t-il?
  • Tim Lenderking, l'envoyé spécial des États-Unis, a accusé la semaine dernière la milice pro-iranienne de ne pas avoir tenté de trouver une solution au conflit
  • Ce crime, pourtant documenté par les groupes de défense des droits de l'homme, n’a suscité ni commentaires ni condamnations

Mis à part de cruels terroristes, qui pourrait délibérément tirer un missile sur une station d’essence, et entraîner la mort d’au moins dix-sept personnes ? Qui, mis à part un groupe de sauvages, adeptes d’une idéologie sinistre, tirerait alors un autre missile sur une ambulance venue secourir les survivants ?

Ceux d'entre nous qui connaissent les coulisses de l’histoire et suivent le fil l'actualité pourraient aisément certainement dresser une liste de groupes radicaux capables de commettre de telles atrocités. Je reste cependant sans voix devant ceux qui ne condamnent pas ces crimes, ou qui s’abstiennent de les reconnaître pour ce qu’ils sont: des actes de terrorisme barbares d’une violence injustifiable.

Il se peut que certains ne le fassent pas car ils ne s'identifient pas aux victimes. D’autres estiment sans doute que les événements dans un pays comme le Yémen ne peuvent affecter le reste du monde. Le Yémen où, samedi soir, des terroristes houthis ont commis les atrocités que je viens de décrire.

Parmi les victimes de l’attaque figure Lian Taher Mohammed, 5 ans, une enfant innocente dont la vie extrêmement courte s’est inscrite sous le signe d’une double malédiction. D’abord, elle n’a pas eu la chance de vivre dans un pays plus sécuritaire, comme les États-Unis, le Japon ou la France. De plus, elle a eu le malheur de naître peu de temps après que les Houthis, soutenus par l'Iran, aient renversé le gouvernement légitime de son pays et déclenché une guerre sauvage et infernale à laquelle ils refusent aujourd’hui de mettre un terme. 

Nous ne pouvons pas savoir à quoi aurait ressemblé la vie de Lian si elle avait survécu, mais elle n'aurait certainement pas été facile sous les Houthis. Eux qui n'hésitent pas à recruter des enfants-soldats, et qui traitent les femmes comme des citoyennes de deuxième classe, comme vous le dirait la mannequin enlevée Entesar Al-Hammadi. D’ailleurs, même leur slogan officiel prône la mort des Juifs et des Américains sans exception.

Ce n'est pas la première barbarie à l’actif de ces monstres houthis, ni la première fois que le monde échoue à les contraindre à respecter les normes humaines et humanitaires les plus élémentaires. En effet, au début de l’année en cours, leur sauvagerie aurait même été apparemment récompensée quand l'administration Biden a annulé une décision de l'ère Trump de désigner les Houthis comme groupe terroriste, citant des raisons logistiques liées à la distribution de l'aide au Yémen. Mais on ne peut que se demander pourquoi cette même logique ne s'est pas appliquée ce mois-ci à Gaza, quand les États-Unis ont autorisé l’entrée des expéditions humanitaires sans pour autant retirer le Hamas de la liste des organisations terroristes.

Peu de temps après leur retrait de la liste des terroristes, les Houthis ont attaqué l'aéroport civil d'Abha en Arabie saoudite. Ils ont continué de cibler les secteurs civils saoudiens à force de missiles et des drones, comme ils l’ont encore fait à Khamis Mushait tôt dimanche. En mars, lors d’un terrifiant prélude à la frappe de samedi sur Marib, les Houthis ont brûlé vifs plus de quarante réfugiés éthiopiens dans un centre de détention à Sanaa. 

Aussi incroyable et choquant que cela puisse paraître, ce crime, pourtant documenté par les groupes de défense des droits de l'homme, n’a suscité ni commentaires ni condamnations. Visiblement, l'erreur des réfugiés était de croire que toutes les vies noires comptent, pas uniquement celles des Noirs américains tués par les policiers blancs.

Pour clore, il convient cependant de noter qu’une lueur d'espoir pourrait émerger de cette tempête de sauvagerie. Il semble en effet que ceux qui doutaient de leur vraie nature, ou qui pensaient que les Houthis réagissent aux gestes de bonne volonté, reviennent enfin à la raison.

Tim Lenderking, l'envoyé spécial des États-Unis, a accusé la semaine dernière la milice pro-iranienne de ne pas avoir tenté de trouver une solution au conflit. Il a de plus dénoncé leur refus de s'engager véritablement dans un cessez-le-feu.

Bien entendu, cette évolution des mentalités est la bienvenue, mais à moins qu’elle ne s'accompagne d'une pression internationale, les Houthis vont poursuivre leurs crimes contre l'humanité, contre les civils dans leur propre pays, ainsi que contre l’Arabie saoudite.

Solidaire de la petite Lian, Arab News a pris la décision de ne pas publier l'insupportable photo de son minuscule cadavre calciné. Pour honorer sa mémoire, nous publions sa photo telle qu'elle aurait aimé qu'on s’en souvienne : Une enfant innocente et souriante. 

Contrairement aux Houthis et à leurs marionnettistes iraniens, nous sommes incapables de glorifier la mort.

Puisses-tu reposer en paix, petite Lian.

 

Faisal J. Abbas est rédacteur en chef de Arab News. 

Twitter: @FaisalJAbbas