Les médias et Israël, un parti pris qui diabolise les Palestiniens

Les forces israéliennes arrêtent un groupe de Palestiniens lors d'affrontements entre des extrémistes juifs d'extrême droite et des résidents arabes, Lod, 13 mai 2021. (AFP).
Les forces israéliennes arrêtent un groupe de Palestiniens lors d'affrontements entre des extrémistes juifs d'extrême droite et des résidents arabes, Lod, 13 mai 2021. (AFP).
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Publié le Vendredi 04 juin 2021

Les médias et Israël, un parti pris qui diabolise les Palestiniens

Les médias et Israël, un parti pris qui diabolise les Palestiniens
  • La plupart des journalistes ne font pas de reportages depuis les territoires occupés, et se fient plutôt aux informations fournies par des sources
  • La police a tué des manifestants qui protestaient contre les politiques de nettoyage ethnique de Netanyahou à Cheikh Jarrah

Israël a entamé la dernière vague de violence contre les Palestiniens après que ses tribunaux aient décidé que les civils palestiniens devaient être expulsés de force de leurs maisons, dans le quartier de Cheikh Jarrah à Jérusalem-Est, afin d'accroître la présence juive dans la ville occupée. Les chrétiens et les musulmans palestiniens qui manifestaient contre les expulsions imminentes ont été attaqués le mois dernier par des soldats, des policiers et des colons israéliens, un acte tellement scandaleux que de nouvelles manifestations ont éclaté dans les territoires occupés, en Israël et dans le monde entier.

Ces manifestations se sont intensifiées au fur et à mesure qu'Israël accentuait sa riposte violente.

Cependant, au moment où des crimes de guerre sont commis par les soldats israéliens lourdement armés, par la police et les colons racistes, de nombreux médias traditionnels, dont la BBC, deviennent complices car ils minimisent la violence offensive d’Israël et amplifient la riposte défensive des Palestiniens.

La police a tiré sur des citoyens palestiniens en Israël, et a même tué des manifestants qui protestaient contre les politiques de nettoyage ethnique du Premier ministre Benjamin Netanyahou à Cheikh Jarrah. Toutefois, ces meurtres ont été minimisés par une grande partie des médias grand public.

La question de la partialité flagrante des médias peut être constatée dans un article de la BBC en date du 12 mai sur la façon dont les autorités israéliennes et les colons ont réagi aux manifestations palestiniennes non armées. L'article était intitulé «Israël déclare l’état d’urgence à Lod alors que les agitations se propagent», mais l’article n'aborde même cet angle qu'au 14e paragraphe.

Bien que l’article soit censé parler des citoyens palestiniens d’Israël qui se soulèvent pour protester contre la violence de Tel-Aviv, il s’agissait en réalité d’un exercice de relations publiques qui reflète les efforts d’Israël pour minimiser ses meurtres de Palestiniens et accentuer les morts de Juifs israéliens.

Le sujet principal de l’article de la BBC était enfoui sous 13 paragraphes de propagande déjà ressassée qui tentent d'attribuer les dernières violences aux roquettes du Hamas lancées de Gaza. En réalité, si Israël a tué plus de 250 Palestiniens lors des violences du mois dernier, les roquettes du Hamas n'ont tué qu'une poignée d'Israéliens. Ce sont des informations que la BBC ne veut visiblement pas divulguer.

Les manifestations de Lod sont si importantes car elles ont montré que l’inquiétude concernant la question des crimes de guerre d'Israël, et qui font actuellement l'objet d'une enquête par le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, ne se limite pas aux critiques étrangers.

Ray Hanania

La BBC a qualifié les manifestations de Lod d'«émeutes d'Arabes israéliens» dans le cadre d'un «conflit plus large entre les forces israéliennes et les militants palestiniens». Lorsque l'article aborde enfin les événements qui ont eu lieu à Lod, elle mentionne, sans l’identifier ou le décrire, un Palestinien «mort pendant les manifestations dans la ville». La BBC utilise le terme passif «mort» pour décrire les morts palestiniens sans imputer le blâme, tout en utilisant le verbe «tuer», nettement plus agressif, pour décrire le décès d’Israéliens, et blâme le Hamas et les Palestiniens. Ces préjugés subtils sont vraiment significatifs pendant la lecture de l’article.

L’article comprend aussi de fausses accusations d’antisémitisme, et cite les médias israéliens selon lesquels des synagogues et plusieurs entreprises (vraisemblablement juives) auraient été «incendiées». Il n'y a aucune allusion de la destruction des entreprises et des maisons des Palestiniens lorsqu'ils ont été confrontés aux soldats, à la police et aux colons israéliens.

Les manifestations de Lod sont si importantes car elles ont montré que l’inquiétude concernant la question des crimes de guerre d'Israël, et qui font actuellement l'objet d'une enquête par le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, ne se limite pas aux critiques étrangers. Selon des citoyens palestiniens d'Israël, la police israélienne à Lod, avec le soutien de soldats et de colons armés, a été impliquée dans une «émeute à grande échelle» contre les civils. Appeler les manifestations des Palestiniens des «émeutes» va sans doute faciliter à justifier la violence d’Israël contre ses propres citoyens, même s’ils vivent déjà dans une société aux allures d’apartheid où les chrétiens et les musulmans sont victimes de discrimination même par la loi.

L'article de la BBC mentionne d’ailleurs à deux reprises qu'un père israélien et sa fille de 16 ans ont été tués par une roquette du Hamas. Ainsi, les médias, la BBC dans ce cas, écrivent un article sur les attaques contre les citoyens palestiniens d'Israël en y ajoutant des détails superflus sur la façon dont les roquettes du Hamas ont tué deux Israéliens.

Ce que la BBC omet de mentionner dans plus de 40 paragraphes de propagande déguisée en information, est que l'armée israélienne censure chaque histoire de violence rapportée par chaque agence de presse en Israël ainsi que dans les Territoires occupés. Les journalistes doivent satisfaire les Israéliens, sinon ils pourraient être expulsés du pays, ce que de nombreux médias occidentaux évitent en embauchant des journalistes juifs pro-israéliens qui vivent en Israël.

La plupart des journalistes ne font pas de reportages depuis les territoires occupés, et se fient plutôt aux informations qui leur sont fournies par des sources, notamment l'armée israélienne. Ce stratagème aide Israël à amplifier sa revendication d'innocence et à promouvoir l'histoire de propagande selon laquelle les Palestiniens sont les vrais méchants.

Quiconque lit cet article de la BBC peut facilement voir comment les faits sont faussés en faveur d'Israël, et comment les médias subjectifs manquent à leur devoir de communiquer objectivement la vérité.

Ray Hanania est un ancien journaliste politique et chroniqueur primé de la mairie de Chicago.

Il peut être contacté sur son site Web personnel à l'adresse www.Hanania.com.

Twitter : @RayHanania

NDLR: Les opinions exprimées par les auteurs de cette section sont les leurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d'Arab News.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com