PARIS: La nomination comme ministre français de la Justice d'Eric Dupond-Moretti, ténor du barreau qui s'est prononcé dans le passé pour le retour des jihadistes français de Syrie et d'Irak afin qu'ils soient jugés dans leur pays, suscite l'espoir de leurs familles et d'avocats.
Quelque 150 Français ont été arrêtés pour avoir appartenu au groupe Etat islamique (EI) et sont presque tous détenus dans des camps et prisons dirigés par des Kurdes, dans le nord-est de la Syrie. Onze autres ont été condamnés à mort en Irak. A cela s'ajoute près de 300 de leurs enfants qui sont également détenus dans les deux pays.
En février 2019, Eric Dupond-Moretti s'était clairement montré favorable au retour en France à la fois des adultes, pour être jugés, et des enfants. « Il faut les rapatrier, surtout lorsqu'ils encourent la peine de mort, les juger en France. Il faut qu'ils aient droit à un procès équitable », avait-il déclaré.
« La France a voté l'abolition de la peine de mort en 1981 », avait ajouté M. Dupond-Moretti. « Ce sont des citoyens français, qu'on le veuille ou non, et on ne peut pas fermer les yeux et faire comme si de rien n'était ».
Une excellente nouvelle pour les enfants
L'avocate Marie Dosé, qui défend plusieurs de ces Français et réclame leur rapatriement ainsi que celui de leurs enfants, dit attendre que le nouveau ministre de la Justice « passe des paroles aux actes ».
Sur Twitter, le collectif Famille Unies, qui regroupe des proches de ces détenus français, a espéré que l'arrivée de Dupont-Moretti soit « l'occasion d'aborder la question » de ces prisonniers conformément « aux droits humains et à la sécurité à long terme », et de « rapatrier enfin les enfants français ».
Les enfants subissent de plein fouet les conditions de vie précaires dans les camps syriens. En 2019, 371 sont morts dans celui d'Al-Hol, selon une responsable du Croissant-Rouge kurde.
La nomination de M. Dupond-Moretti « est une excellente nouvelle pour les enfants », a abondé pour sa part Me Ludovic Rivière, défenseur de plusieurs enfants, saluant « une voix forte qui saura faire valoir ses convictions ».
Lors de sa passation de pouvoir avec Nicole Belloubet mardi, où il a notamment affirmé que son ministère serait "celui des droits de l'Homme", le nouveau garde des Sceaux n'a pas mentionné le sujet des détenus jihadistes.
Restera-t-il constant dans ses déclarations ? Si oui, pourrait-il faire infléchir la politique de la France sur ce sujet très sensible?
« Nicole Belloubet s'était elle aussi, prononcé pour le rapatriement » mais elle a été rappelée à l'ordre, souligne Me Rivière.
En janvier, Mme Belloubet avait évoqué l'hypothèse d'un rapatriement massif de jihadistes français détenus en Syrie au vu de la situation sécuritaire instable sur place. Mais le gouvernement avait aussitôt fait savoir que sa ligne n'avait pas changé.